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LOUISE
MICHEL
Ballade en l'honneur de Louise Michel
Madame et Pauline Roland
Charlotte, Théroigne, Lucile.
Presque Jeanne d'Arc, étoilant
Le front de la foule imbécile,
Nom des cieux, coeur divin qu'exile :
Cette espèce de moins que rien
France bourgeoise au dos facile
Louise Michel est très bien.
Elle aime le Pauvre âpre et franc
Ou timide, elle est ta faucille
Dans le blé mûr pour le pain blanc
Du Pauvre, et la sainte Cécile,
Et la Muse rauque et gracile
Du Pauvre et son ange gardien
A ce simple ; à cet imbécile.
Louise Michel est très bien.
Gouvernements et mal talent,
Mégathérium ou bacille,
Soldat brut, robin insolent,
Ou quelque compromis fragile.
Tout cela son courroux chrétien
L'écrase d'un mépris agile.
Louise Michel est très bien.
Envoi
Citoyenne ! Votre évangile
On meurt pour ! c'est l'Honneur! et bien
Loin des Taxil et des Bazile
Louise Michel est très bien
(Hommage de Paul Verlaine à Louise Michel)
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La Vierge rouge a été une des héroïnes
de La
Commune (mouvement d’insurrection des ouvriers et des chômeurs,
en 1871, réprimé de façon sanglante par l’armée
aux ordres du gouvernement)
On ne sait pas toujours qu'elle était, aussi, poète.
Louise
Michel, née "de parents inconnus" en 1830, a été
élevée par ses grands-parents, en Haute-Marne. Elle
a écrit Lors même qu'il n'y aurait pas un
peu d'atavisme dans ma facilité à rimer, qui ne
serait devenu poète, dans ce pays de Champagne et Lorraine,
où les vents soufflent en bardits de révolte et
d'amour ! et ses premières rimes ont été
de répéter grand-père, grand-mère
Une biographie : http://www.chez.com/durru/lmichel/lacommune.htm
Dans une lettre adressée à Victor Hugo, on lit avec
émotion l'attachement profond de Louise pour sa grand-mère.
(Louise avait envoyé dès l'âge de vingt ans quelques-uns
de ses poèmes à Hugo, qui était alors une référence
pour les jeunes poètes)
Monsieur,
Je ne sais ce que je vous dirai mais
je suis au désespoir et il faut que je vous écrive
pour souffrir moins. Je ne m'inquiète pas si ma lettre
doit vous paraître étrange car vous ne me connaissez
pas et tout ce qui me tourmente ne peut vous toucher, mais il
faut que je vous le dise pour me calmer un instant.
Mme Demahis, ma grand-mère que je n'ai jamais quittée,
est dangereusement malade et je me trouve sans force et sans
courage contre cette affreuse inquiétude. Je suis comme
folle, je ne sais pas ce que je fais ni ce que je dis. L'idée
de la perdre est horrible pour moi et je n'en ai pas d'autre.
Je vois bien qu'il n'y a plus d'espoir et que tout ce qu'on
me dit de rassurant n'est que pour me consoler et cependant,
malgré son âge, je ne puis m'imaginer qu'il me
soit possible de vivre sans elle. J'oublie presque qu'il me
resterait ma mère à consoler. Depuis que je suis
au monde, je n'ai jamais quitté mon aïeule. Elle
a été ma seule institutrice. Nous ne vivions que
l'une pour l'autre et maintenant tout cela va finir. Je ne sais
ce que je vous dis. Mes idées se brouillent mais vous
me pardonnerez et vous m'écrirez quelques lignes pour
me donner un peu de courage car je n'en ai plus. On dit que
je suis pieuse, eh bien, si je la perdais, il me semble que
je ne croirais plus rien. Dieu serait trop cruel.
Je trouve sous ma main je ne sais quels brouillons ; je vous
les envoie. Ce sont peut-être les derniers que vous recevrez
de moi. Si je la perdais, je ne ferais plus rien ou bien cela
me ferait mourir. Alors, frère, vous feriez quelques
vers sur ma tombe. Adieu, pardon de cette lettre, je suis folle
de douleur, je ne sais que devenir, tout me semble mort, écrivez-moi.
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Louise Michel a signé ses premiers poèmes d'un pseudo
masculin qui vous dira quelque chose : Enjolras. L'a-t-elle emprunté
à Hugo, ou est-ce le contraire ? Elle a été poète
toute sa vie, elle écrivait beaucoup mais a perdu ou détruit
pas mal de ses poèmes. Institutrice, elle part enseigner à
Paris, et sera publiée dans des revues. Ce sera également
la prise de conscience républicaine qui aboutira à son
engagement lors de la Commune. Elle y sera à la fois meneuse,
soldat et ambulancière. Ce ne sont pas ces événements
qui l'ont rendu poète ; par contre, elle y a acquis une renommée
politique internationale. Après la Commune, qui a fait entrer
son nom dans l’histoire, elle a été condamné
à mort et sa peine a été commuée en déportation
en Nouvelle-Calédonie. Ayant vu condamner ses compagnons (Blanqui,
Ferré) à la peine capitale, elle la réclame pour
elle-même. Compte-rendu
de son procès
Victor Hugo rendra hommage au courage de Louise, la rendant ainsi
encore plus célèbre.
Viro
Major, le poème de Hugo
C’est sans doute en pensant aux ouvriers massacrés ou
condamnés à mort qu’elle a écrit ce poème
; sous la forme plaisante d’une chanson, il est en fait très
engagé ; le titre en espagnol signifie Corrida de la Mort
(Jacques Bonhomme était un sobriquet donné aux ouvriers
et aux gens du peuple par les classes aisées)
Chanson de cirque
Corrida de Muerte
Les hauts barons blasonnés d'or,
Les duchesses de similor,
Les viveuses toutes hagardes,
Les crevés aux faces blafardes,
Vont s'égayer. Ah ! oui, vraiment,
Jacques Bonhomme est bon enfant.
C'est du sang vermeil qu'ils vont voir.
Jadis, comme un rouge abattoir,
Paris ne fut pour eux qu'un drame
Et ce souvenir les affame ;
Ils en ont soif. Ah ! oui, vraiment,
Jacques Bonhomme est bon enfant.
Peut-être qu'ils visent plus haut :
Après le cirque, l'échafaud ;
La morgue corsera la fête.
Aujourd'hui seulement la bête,
Et demain l'homme. Ah ! oui, vraiment
Jacques Bonhomme est bon enfant.
Les repus ont le rouge aux yeux.
Et cela fait songer les gueux,
Les gueux expirants de misère.
Tant mieux ! Aux fainéants la guerre ;
Ils ne diront plus si longtemps :
Jacques Bonhomme est bon enfant.
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Et c’est peut-être dans sa prison qu’est né
ce poème, une métaphore facile à comprendre
Hirondelle
Hirondelle qui vient de la nuit orageuse,
Hirondelle fidèle, où vas-tu ? dis-le-moi.
Quelle brise t'emporte, errante voyageuse ?
Écoute, je voudrais m'en aller avec toi,
Bien loin, bien loin d'ici, vers d'immenses rivages,
Vers de grands rochers nus, des grèves, des déserts,
Dans l'inconnu muet, ou bien vers d'autres âges,
Vers les astres errants qui roulent dans les airs.
Ah ! laisse-moi pleurer, pleurer, quand de tes ailes
Tu rases l'herbe verte et qu'aux profonds concerts
Des forêts et des vents tu réponds des tourelles,
Avec ta rauque voix, mon doux oiseau des mers.
Hirondelle aux yeux noirs, hirondelle, je t'aime !
Je ne sais quel écho par toi m'est apporté
Des rivages lointains ; pour vivre, loi suprême,
Il me faut, comme à toi, l'air et la liberté.
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Elle a écrit Le Pôle sud à bord du voilier
qui l'amenait en Nouvelle-Calédonie, avec ses compagnons déportés.
Ce poème montre sa confiance envers la découverte et
les progrès de la science. Il a des allures prophétiques
(traversée du continent antarctique, radioguidage). On voit
aussi que cette femme ne se laisse pas abattre par les événements,
sait dépasser ses soucis personnels et garde sa faculté
à s’émerveiller. On retrouve aussi l’institutrice,
avide de savoir et d’enseigner.
Le Pôle sud (À travers la vie et la mort
Maspero 1982)
Pourquoi ne pas aller vers le mystère immense ?
On est sur le chemin ; jusque-là nous verrons
Les hardis baleiniers franchissant la distance ;
Un jour avec eux nous irons.
Nous verrons sous les eaux les immenses prairies
Où la plante sans fleurs a des rameaux géants,
Où la bête fleurit — varech, holothuries,
Coraux, monstres, nains ou géants.
Nous verrons, nous verrons l'éclat du jour polaire,
Et nous irons toujours, nous irons, nous irons ;
Peut-être un continent s'étend sur ce mystère
;
Alors, nous le traverserons.
Bien plus vite on ira sur les routes nouvelles ;
Navires sous-marins et navires des airs
Bientôt tous viendront là. Blanches on voit leurs
ailes
Aujourd'hui sur les grands flots verts.
Bientôt on entendra souffler comme une bête
La machine puissante, et l'électricité
Conduire dans les airs les flottes. Ô tempêtes
!
Glaces et nuit, tout est dompté
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En Nouvelle Calédonie elle donnera des leçons aux canaques,
et soutiendra
leur révolte
Elle y a écrit le Chant
des captifs
À son retour de déportation, elle donnera de nombreuses
conférences, et sera la porte-parole du mouvement anarchiste.
Elle s’irritera de voir ses poèmes si peu publiés
Ils ne m’empêcheront pas d’être poète,
quand même !
Elle mourra en 1905 ; ayant tout au long de sa vie écrit,
et accompagné son destin de poèmes qui en sont le reflet
Bibliographie
À travers la vie, poésies Fayard 1984
Œuvres posthumes, Librairie Internationale d'Alfortville
1905
Mémoires, Sulliver 1997
Daniel Armogathe a rassemblé deux cent poèmes de Louise
Michel À travers la vie et la mort, Maspero 1982
Deux recueils sont parfois attribués à tort à
Louise Michel, Au gré du vent et Fleurs et ronces
Pour en savoir plus
Une page sur les femmes de la Commune, avec leurs photos ; et la
dernière strophe du Temps des cerises , strophe dédiée
à Louise Michel par Jean-Baptiste Clément
http://lacomune.club.fr/pages/parent.html
Des photos de Louise
http://enjolras.free.fr/index.html
Léah
pour Francopolis
décembre 2006
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