2009
Poésie Provisoire
Je parle, je
marche, j’automatise, j’exécute, je le fais sans y penser, je le
pense sans le faire. J’écris et j’outille l'ouverture au monde,
un peu comme j’ouvre la boîte, la boîte du sens, le sens en
travail, une fermentation, un décorticage, écrire fait
penser la langue, discours pour soi.
Écrire
est un acte de création répétition d’une
réappropriation, d’une existence-naissance restituée.
Écrire déconstruit et reconstruit sa
réalité, une réalité, la
réalité. La dynamique en effet porte en contre-coup cette
réalité, apporte une acuité, aiguise les sens, les
sentiments, rapproche, éloigne, fait de l'ordre, du
désordre propose indispose, remet en cause, bouleverse,
in-transige, retourne, détourne. Écrire c'est fonder une
pensée, c'est penser, organiser, trier, mettre ensemble,
découvrir des attaches, en créer. Notre regard, le sien,
unique, mis en valeur devient critique par le choix et l'ouverture
à la complexité : la simplicité n'existe pas. Le
travail est inévitable, travail comme une levure en
fermentation, décomposition même du mélange,
réchauffement, transformation, augmentation (expérience,
langue, mots, modes, pensées...) troque, et se modifie
insensiblement ou brusquement, saut, à cloche-pied, en courant,
prise-emprise, l’écriture est un levier pour exercer, activer
nos immobilités, une envie qui se dépasse et qui se
trouve/cherche un équilibre, une marche en avant sans chemin.
Écrire est la juxtaposition inventive, nous composons notre
langue du tous les jours, le quotidien et les besognes
répétitives endorment : toute écriture
réveille. À chaque fois le mot n’est que la partie
immergée de ce que l'on voudrait dire, petite portion mais il
faut faire le pari sur ce qui est caché et livrer au
masqué l'envie, la possibilité, la tranquillité de
pouvoir se dévoiler.
Ce que nous écrivons n'est pas ce que nous sommes, une fraction,
juste une apparence d'instant. L’écriture est une rencontre
fixée de trajectoires aléatoires, le difficile est de
sortir des règles imposées, la cohabitation, l’autre, les
structures où nous respirons, l'imprégnation, la rumeur
du temps, l’urgent, le chant du monde. Écrivons, usons de tous
les subterfuges pour cela, pour se quitter, pour se perdre, pour semer,
distancer et prendre la liberté et s’installer dans son
quotidien une pose, l’écriture ritualisée, en appuyant
cette écriture sur les résonances journalières. Ce
n'est pas la somme des mots connus qui fait écrire, le
déclenchement est autre, l’origine serait l’envie, l’en-vie
urgente, urgence pour se dire, dire, bafouiller, faire soi les mots,
décrire, s’écrire, pour se lire, se relire, se distinguer
miroir fixe sans reflet, crayonné du soi en contrechamp pour
acceptation, pour survivre autre, autrement. Dans le vide, les premiers
mots s'organisent, les mots mêmes sont guides, après se
joue la journée, le quotidien nourrit, donne mots, impression,
contresens, feu et braise, essence et foyer, harmoniques du temps
passé, de mémoire bilboquet où les mots sont
ficelles, et travaillent le nouveau à l’identique, en une
différence proche, décalage du besoin, fissure pour
respirer.
L'ensemble donne une traduction en forme d'échos de ce que je
vis, un décalage structurant hors d’un descriptif et passant par
lui, organisation neuve sans cesse semblable et différente,
dissemblable et similaire, étrange. C'est un journal de bord en
dérive qui vient, il existe sans visée singulière,
chaque écrit fait signe, témoignage d’une
possibilité, d'une existence, d'un pari, d'une alternative, d'un
moment nécessaire comme boire et respirer un jour, une fois. On
peut parler ou écrire sans y penser, il n'est pas question
d'être doué ou pas, en tant qu'outil du langage, il
demande un usage, une ouverture interrogative sans
préjugé toute tentative est une construction personnelle,
un rapport domestiqué aux mots, à sa langue, à
l’écriture, à la vie, à son temps. Nous avons tous
une voix différente, il en est de même pour
l’écriture. En ce lieu, personne ne peut nous aider, nous
soutenir, nous éduquer, l’écriture est une voie intime,
solitaire, personnelle. Un accès au monde où nous nous
accouchons de la main, du crayon, chaque jour, au mot à mot de
nos lignes, au fil des pages tournées nous transformons, aux
insistances nous déployons, aux nœuds nous délions.
Patience du marin à partir une nouvelle fois en mer,
traîner ses encres au fil d’une plume, ramasser sur un sol lisse
toutes les poussières des mots. User les cals aux ravaudages des
textes, du contexte faire venir l’heure puis vivre, survivre, exister,
chanter, partager, aimer, mots écrits d’une énergie
émue. Pour vivre simplement. Poétiquement ?
Philippe 2009
non les mots n'ont aucune importance
sinon que nous n'avons que les mot pour écrire
le mot est la mort sans avoir l'R
comment je fais sans mot pour penser
peut-on comprendre ça peut-on ne pas le comprendre
nous est-il possible de ne pas l'accepter
et si nous n'acceptons pas
peut-on accepter de vivre.... ou accepter de vivre c'est
également accepter l'innaceptable
inconditionnellemen
t... et comprendre ne peut, accepter de
ne pas comprendre donc
ne pas comprendre l'inacceptable est ce le comprendre
est ce le prendre avec soi pour le vivre pour vivre avec l'inacceptable
quand il est là peut-on faire autrement
peut-on bouger l'évidence et pourtant bien plus de fleuves
coulent là où il pleut très souvent
c'est pas là que ceux qui ont soif vivent, innaceptable,
inavouable
la vie est un fleuve qui nous ennoie
je ne sais pas comment j'ai appris à nager
faut-il savoir comment on a appris pour nager
phil
2008
***
nos regards au voile gris des pensées noires
creusent l'urgence de fermer la porte au courant d'air
j'ai froid également et pointe dans le creux du dos
une chaleur musculaire comme une aiguille dedans brûlante
les mots drainent leur fleuve de passions
la poésie s'accroche à nos paterre dans l'entrée
de notre maison
bien à l'abris du vent
existe-t-elle
d'ailleurs ne serait-elle pas encore une de nos invention pour faire
croire
( comme : dieu la guerre
l'amour la mort le temps..... ect.....) et passant notre temps à
croire nous
ne voyons plus que la vie est
là même dans nos refus ( cancer, maladie, médoc,
suicide, écriture,
caresses.....)
Phil 2008
****
Dans le temps.
L'homme vivait avec la montagne
De ses mains la vie en besogne
« Il travaille le vent
des saisons.
Chaque jour sa peine » disaient-ils
Et les montagnes sans changer
de place respiraient
« Faire ce qu'il faut
faire »
Les questions c'était le soir
L'en-vie s'en pose-t-elle ?
Elle avance simplement
Cette vie là
Elle crie à nos regards des horizons
Nos mains construisent
Caresses d'une peine
Tous les jours se donnent
Ses enfants sont l'annonce
d'un temps qui ne se finit pas
Au jardins de nos amours
La soupe du soir se parfume aux herbes du chemin
Demain aussi

Noël passe
papier froissé ruban
déliés
l'enfant sage soupire son
réveil
noël en rêve devient histoire
se glisser dans la fissure
d'une joie
effacer toute trace d'heure avenir ou passée
troquer ses pensées pour un plaisir d'attente
le jour inquiet ne surgit pas assez vite
bien au chaud regards dans
les flammes
l'imaginaire a cheminé sous les sapins d'une profonde forêt
j'ai rencontré les lutins de mes intuitions ordinaires
le temps se détend
élastique de l'instant
talonne l'illusion
il va passer ce temps
mourir d'impatience
je souris même au monde
vague silence avant le bruit
les yeux plus vite que les mains
délient les cadeaux
papier déchiré ruban entortillé
le printemps ouvre la neige
sans bruit
j'ai répandu des présents proclamant des semences
inédites
je clopine et je mets le pied pour un imaginaire d'origine
j'accompagne le monde prenant en main le présent
pour l'instant
une magie se finit
un songe de recommencer aussitôt
rêve de papier étoilé
24.12.2002
*