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66 zone franche - Le forum de Francopolis » Textes » A R C H I V E S » Les textes du 01.01.2004 au 10.02.2004 » PARIS III « précédent Suivant »

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Pierre
Envoyé dimanche 08 février 2004 - 22h43:   

Les hommes,
Christ, j’ai vu les hommes

Leurs mains tendues, béantes comme Vos stigmates
Creusées de crasse et de scories
Les cordes des guitares sur lesquelles ils jouent
Sont aussi vieilles que Vous
Les accordéons des Tziganes et le violon des Slaves
Abrités de la pluie sous le auvent des Halles

Christ,
J’ai vu les hommes

Endormis sur l’asphalte ou sur de vieux journaux
Ne regardant plus rien avec leurs yeux mi-clos
La langueur assassine des arpèges au piano
Un orchestre de jazz

Et tant de belles étrangères qui comptaient les stations au ramdam du tunnel

Les enfants tenaient de vieux verres en carton qu’ils venaient agiter juste sous mon regard
Et les pièces en dedans sonnaient comme les rares crécelles des lépreux de Paris

Christ, Vos apôtres sont partis
Nul ne sait où ils sont et où Vous contacter

Vous n’existez pas sur Internet
Et Vous n’êtes pas dans l’annuaire électronique
Ni eux non plus
Ils marchent comme Vous, leurs pieds sont nus
Il en est qui meurent en pensant à Vous
Mais il y a un marchand de souvenirs sur le Golgotha
On y vend aussi des boissons fraîches aux gogos égarés des grandes compagnies internationales.


Paris.
février 1995


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LN
Envoyé dimanche 08 février 2004 - 23h03:   

je sais bien que certains n'aimeront pas qu'on cite Jésus mais ce poème dit tant de vérités et il est très bien construit.
à te relire.
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Mary
Envoyé lundi 09 février 2004 - 09h35:   

Je partage l'opinion de LN.

Et voici un poème d'Edward Stachura :

"Communion

Si c'est une chose spontanée
Si c'est une chose évidente
Si c'est une chose naturelle

Prends

Ce qu'on donne ici
Au nom du soleil
Et de son coursier :
Le rossignol sifflotant, amen"
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flo
Envoyé lundi 09 février 2004 - 10h40:   

J'aime vraiment beaucoup! très d'acutalité, toujours hélas, d'actualité, puisqu'il s'agit d'humanité, bravo!


et Bienvenue!

florence
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Pierre
Envoyé lundi 09 février 2004 - 10h44:   

Merci à tous pour vos commentaires. Je posterai les autres poèmes de la série Paris dans le courant de la semaine. Mais je ne pourrai participer longtemps à ce forum poétique : j'ai abandonné l'écriture poétique voilà 8 ans !
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fourmi
Envoyé lundi 09 février 2004 - 11h02:   

Une belle occasion de vous y remettre Pierre. Quelqu'un qui poste souvent ici m'avait dit la même chose et le goût semble le reprendre nous le rencontrons souvent.
à bientôt .
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florence
Envoyé lundi 09 février 2004 - 11h46:   

Et puis si tu écris des proses, tu es les bienvenu aussi dans notre rubrique "roman/nouvelle" :-))

on est pas sectaire, on aime tout lire!

flo
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Leezie
Envoyé lundi 09 février 2004 - 12h06:   

"Une belle occasion de vous y remettre Pierre."

hé, nonnonnonnon, il a promis une suite au journal d'un ange, alors si tu le perturbes, hein, il va plus avoir le temps

je voudrais bien lire la suite, moi :-))
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Ln
Envoyé lundi 09 février 2004 - 13h53:   

des petits bonbons poèmes juste pour relancer le chant des anges (;-))) de temps en temps sous les étoiles.
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aar
Envoyé lundi 09 février 2004 - 15h36:   

s'adresser à Christ a quelque chose d'intéressant et de parfaitement archaïque.
Pourquoi à lui en fait ? pourquoi Christ et pas Jesus ? ou un autre ?
pourquoi un athée s'adresse au Christ quand les choses vont mal ?
La poésie serait-elle la prière à l'athée ? son catéchisme secret ?

Cela me fait penser à Cendrars qui, lui aussi, a envoyé quelques poèmes au même destinataire , ou à son père.

Dans "Les Paques à New-York" il s'adresse au papa :
"Je connais tous les Christs qui pendent dans les musées;
Mais Vous marchez, Seigneur, ce soir à mes côtés"

Dans un autre poème, il s'adresse à Christ

"Christ
Voici plus d'un an que je n'ai plus pensé à Vous ..."

Puis vient l'inévitable moment de l'identification, de l'incarnation, de l'ostie canibalisée...
"mes peintures m'ouvrent des vues sur moi-même
qui me font penser à Vous..."

Pierre n'adresse pas la même prière que Cendrars, mais c'est le même ton,
la même source, le même vouvoiement, la même majuscule.
On dit Vous au Christ... et pas vous.

Poésie, tu es un véritable réservoir à merveilles !!!
permets-moi que je te tutoies, au moins.

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Pierre
Envoyé lundi 09 février 2004 - 22h16:   

aar, je suis scié....
Mais alors vraiment...
Comparer mon tout petit texte aux Pâques de Cendrars, celui-là même à cause de / par la grâce duquel j'en suis venu à l'écriture me laisse pantois...
Pour la peine, voici la "suite" des poèmes de cette série :



PARIS VI



Nous sommes au premier jour.

Je partais pour Pékin via Paris et Moscou
En dansant sur un pied

J'ai toujours dans la poche ce petit in folio
Blaise Cendrars, Poésie complète, Paris, 1967

J'ai passé ma vie dans les lavomatics du Xème arrondissement
Et ceux du IVème où les homos nettoient leurs plumes en tortillant des fesses
Aussi ceux du VIème truffés sans que je sache de mannequins suédois

La rue Henri Barbusse où j'allais autrefois

J'attendais le métro ou bien je ne sais plus
Mais les sièges étaient durs et d'un mauvais plastique me faisaient mal au cul

J'épiais les tambours et l'avancée des cycles
Les essoreuses géantes font des taches de couleur

La palette du peintre
Tirant au vermillon
Et toute l'histoire du monde se sont nichés ici

Au creux d'aluminium, bouffés de fils de crasse où tout se
putréfie
pétrifie
purifie

Un clochard extatique ressemblait à Jésus
A genoux crucifié au milieu de la rue
Sur un bout de carton posé contre ses cuisses
Était écrit j'ai faim
Il regardait au ciel tout baigné de lumière

Trois vieilles Séfarades parlaient en rigolant d'aller faire le tapin dans la rue Saint-Denis
Elles riaient en fumant de fines cigarettes

Et toutes les annonces punaisées sur le mur étaient en vietnamien
J'ai moi-même accroché au dessus du bureau tout un foutoir de choses
Il y a des partitions, des croquis des images
Quelques cartes postales et le pont de Sydney
Et autre chose encore comme le mal du pays

Je repense soudain à ces dents de vampire que j'achetais enfant
Aussi la boulangère si petite et si pauvre
Et il n'y avait rien sur son étal de pauvre
Hormis ces bonbons roses dont je raffolais tant

Mais celle-ci est riche à côté du lavoir où les bateaux s'échouent
Des portes automatiques coulissant en silence
Son mari souriant vient parler en voisin

Cela ne coûte guère et lui rapporte gros



Et moi, derrière la vitre, bercé par le roulis
Étouffé de chaleur dans la salle des machines
Je suais sang et eau en regardant dehors

Les machines à laver bien souvent me rappellent
Ces bateaux au long cours que je n'ai pas connu.


Paris, Place de la Sorbonne
Novembre 1995

Ps : la mise en page a sauté avec le passage sur le forum, mais elle a son importance, aussi...
En espérant que ce texte vous plaira, lui aussi
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Pierre CORBUCCI
Envoyé lundi 09 février 2004 - 23h08:   

Au risque de faire redondance avec la fin des commentaires sur le précédent, voici la suite de la série Paris. Les premiers, moins aboutis à mon sens, restent dans les tiroirs pour l'instant.

PARIS VI



Nous sommes au premier jour.

Je partais pour Pékin via Paris et Moscou
En dansant sur un pied

J'ai toujours dans la poche ce petit in folio
Blaise Cendrars, Poésie complète, Paris, 1967

J'ai passé ma vie dans les lavomatics du Xème arrondissement
Et ceux du IVème où les homos nettoient leurs plumes en tortillant des fesses
Aussi ceux du VIème truffés sans que je sache de mannequins suédois

La rue Henri Barbusse où j'allais autrefois

J'attendais le métro ou bien je ne sais plus
Mais les sièges étaient durs et d'un mauvais plastique me faisaient mal au cul

J'épiais les tambours et l'avancée des cycles
Les essoreuses géantes font des taches de couleur

La palette du peintre
Tirant au vermillon
Et toute l'histoire du monde se sont nichés ici

Au creux d'aluminium, bouffés de fils de crasse où tout se
putréfie
pétrifie
purifie

Un clochard extatique ressemblait à Jésus
A genoux crucifié au milieu de la rue
Sur un bout de carton posé contre ses cuisses
Était écrit j'ai faim
Il regardait au ciel tout baigné de lumière

Trois vieilles Séfarades parlaient en rigolant d'aller faire le tapin dans la rue Saint-Denis
Elles riaient en fumant de fines cigarettes

Et toutes les annonces punaisées sur le mur étaient en vietnamien
J'ai moi-même accroché au dessus du bureau tout un foutoir de choses
Il y a des partitions, des croquis des images
Quelques cartes postales et le pont de Sydney
Et autre chose encore comme le mal du pays

Je repense soudain à ces dents de vampire que j'achetais enfant
Aussi la boulangère si petite et si pauvre
Et il n'y avait rien sur son étal de pauvre
Hormis ces bonbons roses dont je raffolais tant

Mais celle-ci est riche à côté du lavoir où les bateaux s'échouent
Des portes automatiques coulissant en silence
Son mari souriant vient parler en voisin

Cela ne coûte guère et lui rapporte gros



Et moi, derrière la vitre, bercé par le roulis
Étouffé de chaleur dans la salle des machines
Je suais sang et eau en regardant dehors

Les machines à laver bien souvent me rappellent
Ces bateaux au long cours que je n'ai pas connu.


Paris, Place de la Sorbonne
Novembre 1995

Ps : la mise en page a sauté avec le passage sur le forum, mais elle a son importance, aussi...
En espérant que ce texte vous plaira, lui aussi
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Leezie
Envoyé mardi 10 février 2004 - 09h12:   

ah, mais j'aime encore plus le numéro VI, je crois, je le trouve encore plus personnel et"coupant", direct, un coup de poing, un peu

Magnifique ta série, Pierre, merci !
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flo
Envoyé mardi 10 février 2004 - 09h35:   

Oui, maîtrisée, évocatrice d'ambiances minimes et intenses, ca me rappelle cette phrase de Sylvie Germain :

" Les villes comme les corps ont une odeur. Ont une peau. "

C'est cosmopolite, les frontières se fondent et se confondent, il y a cette dureté des murs sales qui se projettent dans les propos, et ce non politiquement correcte qui colle avec la réalité des choses, du moins celles vécues ou celles rêvées.

j'aime les deux de la suite, sans préférence, deux visions qui se croisent, comme deux passants venant de deux directions différentes échangent un instant un regard.

Chaleureusement,

flo
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Leezie
Envoyé mardi 10 février 2004 - 10h06:   

tiens oui c'est vrai, ça, deux regards de deux personnes différentes, deux focalisations...
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Pierre CORBUCCI
Envoyé mardi 10 février 2004 - 23h45:   

merci pour vos commentaires si encourageants. De fait, je n'aurai certainement pas le temps d'écrire d'autres poèmes avant très longtemps, mais j'en posterai d'autres ici, dès que j'aurai compris pourquoi cet [CENSURE] de Safari refuse l'ouverture d'un nouveau fil de discussion.. :-)
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Leezie
Envoyé jeudi 12 février 2004 - 07h15:   

c'est encore moi... Je cherchais un texte de chanson de Claude Aubry, un membre du groupe chants mêlés avec qui je jouais il y a longtemps, parce qu'il me fait vraiment penser, dans l'atmosphère, à ton texte.
Dans la forme, bien sûr il est très différent. Et puis il faut imaginer la musique, un chanté parlé très rock. Et là aussi il y a cette image du Christ :





Néo Christus

"Tu marches dans la ville et la ville s’enfonce
Dans tes replis de peau, te marque de ses ongles
Et toi si tu jouis de cet amour obscur
Tu as payé d’avance trop cher sur la facture

Tu plonges dans la terre comme on s’offre à la femme
Le métro qui t’aspire renouvelle le drame
Et les mots que tu cherches en souvenir des hommes
Arrêtent pour un temps le présent métronome

Tu regardes en riant tous les flics souterrains
Leur visage fermé, le shoot-gun à la main
Et tu marches vers eux avec des mains ouvertes
Comme un christ vaincu et la poitrine offerte

Cache les mots qui brûlent et des mots qui alarment
Quand ils partent de toi ils ressemblent à des armes
Assieds toi sur le quai au milieu de la crasse
A six heures à Barbès, tu sens comme une nasse

Ca monte de ton ventre dans ta gorge serrée
Et tu ris et tu pleures, Dieu m’a abandonné
Dis leur donc tout en vrac : dis l’amour et la mort
Dis leur demain, dis leur demain encore

Rappelle leur la fête, la fête et la vengeance
Sois leur frère de sang enfante les jouvence
Dis leur la fumée blanche qui guérit du futur
Avec la déraison pour seconde nature

Dis leur que tu pardonnes, dis leur que tu comprends
Et fais leur croire encore que tu es là vivant
Pendant que des salauds, à coups de pied, en boule
Te font tomber du quai dans les cris de la foule'

Claude Aubry


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Cl@ude
Envoyé dimanche 15 février 2004 - 10h15:   

Ma cloche à moi, c’était au métro Barbes il avait dessiné une craie, une crucifixion, grandeur nature, puis il s’était mis à la place du Christ… dans le phylactère, au lieu D’INRI il avait écrit : « pour payer la/ma facture ». Il rigolait tout le temps, presque plus de dents une couronne de fausses épines, des roses en fait… puis y a des flics qui sont arrivés pas vraiment agressifs, chiants plutôt, je n’avais pas mon appareil photo, et je n’aurais rien fait de toute façon, je me suis barré
Cl@ude
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Leezie
Envoyé dimanche 15 février 2004 - 10h36:   

bonjour Claude,

heureuse que tu viennes dans le fil de Pierre (ouarf, je viens de poster ta chanson "ça dépend" dans la rubrique chanson, si ce n'est pas de la télépathie ça)

ta chanson me rappelle irrésistiblement l'Ariane, grand théâtre Lino Ventura paumé au milieu des cités, la ville, la fatigue, la suie, la pauvreté...


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Hélène
Envoyé dimanche 15 février 2004 - 10h47:   

Leezie pardonne moi de m'immiscer ici c'est pour te demander où nous pourrions inviter les lecteurs à venir découvrir des anciens posts . Il y a tant de choses intéressantes ! comme celles-ci .
J'ai vu que Noël l'avait fait hier . et ça m'en a donné l'idée
Mais je crois que personne ne reprendra la suite. dommage que dans ces cas là le thread ne se réactualise pas , au moins pour quelques jours .
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Leezie
Envoyé dimanche 15 février 2004 - 11h02:   

oui, OK, je vais chercher Hélène, peut-être dans "move", on va voir

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