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stél
Envoyé vendredi 04 avril 2003 - 15h27:   

- Les 12 travaux de Björk Gudmunsdottir-


1. Hémisphères de pas.

J'entends le son de la moitié d'un pas
ouaté
protégé
lesté par les parois de l'incision
pratiquée dans l'air
par des inconnus

Elle traverse mon propre corps
pour venir
cueillir le fruit de l'arbre
derrière mes yeux

Elle grandit
comme une signature
à l'échelle du monde

Je crois que j'enlève
un tissu qui me gêne
je m'agite
au centre de lignes brillantes
qui viennent converger
quelque part en moi
dans un bruit de toucher bref
qui me prévient
comme si la porte
entre moi et les autres
allait prononcer une parole importante

La légende dira qu'un être
a décidé de ne pas se dissoudre
plus tard on étudiera sa composition
assemblage de fermoirs amusés
et d'ouvertures sur des espaces
si grands
qu'ils sont inconcevables

En attendant
je le noue autour de mes chevilles
il me dira
si le soleil approche
par dessous

Je ne sais pas si cela m'appartient
ou m'habille
mais après avoir défait tout ce qui m'entoure
je deviens une peinture murale
couverte de mousse
le soleil m'atteint
à travers ce temps qui se dépose
au creux de mon cou
comme une médaille vivante
ou un grain de beauté
en voyage

Et je me mets à courir
si vite
que je rejoins l'autre moitié du pas

04-04-2003
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stél
Envoyé vendredi 04 avril 2003 - 17h05:   

- Les 12 travaux de Björk Gudmunsdottir-


2. Douloureux mais flexible


Je me mets à courir si vite
que je rejoins l'autre moitié du pas

Muni d'un foulard
qui modifie les syllabes
je vous fais croire
que je prononce un nom à la hâte
alors qu'au contraire
je le détaille

Alternativement
trop grand ou trop petit
selon que j'inspire ou j'expire
mon visage s'arrête
et moi je continue
puis stoppe à mon tour
un peu plus loin

De la chaleur coule
de mon épaule jusqu'au bout de ma main
à l'intérieur des gouttes
des petits êtres sautent
jusqu'à terre

Le foulard me recouvre
tourné vers l'intérieur
et rit
en faisant des allusions au sujet de mon souffle
d'abord exprès un peu méchamment
pour que je n'oublie pas de me relever
puis il allonge doucement des mêches de mes cheveux
pour en effleurer ma joue
et bien me montrer
qu'il me rafraîchit
et que je ne dois pas l'enlever

Dans le champ
de nouvelles fleurs
aux bords assez larges pour s'y accrocher
naissent de notre discussion

04-04-2003
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stél
Envoyé vendredi 04 avril 2003 - 17h43:   

-- Les 12 travaux de Björk Gudmunsdottir --


3. Les ailes des entraves.


Des nouvelles fleurs
aux bords assez larges pour s'y accrocher
naissent de notre discussion

Certaines retiennent l'eau
d'autres en libèrent une grande quantité
les plus audacieuses
essayent à la fois de lier mes jambes
et de tirer sur mes bras
pour déplier mes ailes

Comme moi
elles ont l'air de savoir ce qu'elles veulent
elles donnent du charme à la chaleur
et du mouvement à mes mains
qui viennent d'avoir une idée

La plupart se contentent de me regarder
curieuses des figures que je dessine
l'air de rien avec mon foulard
pour leur dessiner le visage et le corps
que je veux à côté des miens

Je vais les appeler
et à mon signal
elles le rempliront et le soulèveront
de toutes leurs forces

Lorsqu'il aura pris forme
nous pourrons courir ensemble
et peut-être même voler

04-04-2003
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stél*
Envoyé mercredi 23 avril 2003 - 04h01:   

Les 12 travaux de Björk Gudmunsdottir : 4,5,6,7,8,9,10
*********
-- Les 12 travaux de Björk Gudmunsdottir --
(10 en fait, on baisse les prix)


4. Pavane aux tissus découpés.

nous pourrons courir ensemble
et peut-être même voler

ailes au milieu de la file
la longue traîne d'étoiles anorexiques
attendez les
si vous pouvez
regardez les
si vous pouvez
une devant
une derrière

ce qui vole et rampe et pousse et participe à notre vie

ailes
âmes écornées sur un tapis roulant
pages vides
large ciel de touches noires et blanches

elles vont pointer s'identifier passer des sas
briller réclamer s'appuyer sur la vitre
peuple d'abattoir aux bras blancs qui pendent
veulent attraper quelque chose qui se trouve en bas
une fleur qui pousse qui fonce à leur rencontre
s'élève d'un centimètre par millénaire
le temps pour ceux de la file de progresser d'un seul pas

de temps en temps le cliquetis d'un hachoir en cueille un ou une
pénêtre pendant quelques siècles dans la peau dans la chair
jusque dans la pensée qu'il coupe soigneusement en deux



5. L'évasion d'un rapport d'autopsie.

dans la peau dans la chair
jusque dans la pensée qu'il coupe soigneusement
en deux

quelqu'un ou quelque chose singe les ailes
font des gestes qui les imitent
et une lame
coupe puis réunit un cri qui s'ignorait

des monnaies qui s'échangent de main en main
des gens pliés dedans à l'intérieur des liasses
et quelque chose d'heureux malgré soi
dans l'échancrure du temps qui regarde de loin

salamandre qui court rejoindre la prochaine peau
celle de la nuit celle qu'on ne retire pas
ses membres arrachés
des ailes à la place

des ailes et des longues franges de tissus
comme des mêches de cheveux qui protègent de la brûlure
froide des bottes qui brillent en cage

lumière d'un objet qui pleure sans le savoir
l'éventail posé sur les marches d'un temple
à côté d'un livre dont les pages se remplissent
au fur et à mesure que l'on monte ses marches
et rafraîchissent la peau
par capillarité
source d'un temple dont les moines courent
pour prier



6. La gazette de la galaxie.

source d'un temple dont les moines courent
pour prier

je suis l'ombre d'un grand animal tombé du toit
et en même temps la chaussure d'un homme
qui marche à pied depuis sa naissance pour le rejoindre et le ramasser
et recompter ses poils dans ses bras en corbeille

et les deux moitiés d'êtres qui tombent devant vous sur le sol
se relèvent aussitôt et se cherchent toute leur vie
montent et descendent la longue file qui marche lentement

et je trace son image avec mes doigts dans l'air
j'attrape la chaleur et les gouttes
je trace une femme qui ressemble à ça et marche à sa façon
regardez la est unique et ne ressemble à nulle autre
elle rit quand les hachoirs approchent de ses cheveux
elle rit de s'imaginer séparée en fines couches
de couleur légèrement différente à chaque profondeur
comme un dégradé qui continue à marcher

des lettres d'imprimerie qui tombent
comme des maisons sous la tempête

nous allons dire notre nom passer d'autres sas
acquérir des compétences passer des examens
entendre des fausses nouvelles
tracer des constellations
à travers une vitre sale

je suis l'ombre d'une grande coupure qui entaille un arbre
et en même temps l'empreinte de la lumière
le long du cou du marcheur
qui reste habillé sous le soleil
de peur de manquer de vie



7. Différents avis au sujet du printemps.


marcheur qui reste habillé sous le soleil
de peur de manquer de vie

derrière le soleil on donne une fête
et la voir c'est mourir
proclament les voix greffées dans les oreilles
on chante les slogans on introduit son sang dans la machine
des chiffres mesurent notre aptitude
à l'extinction

je continue à courir
à fendre l'air décoller du sol retomber sur moi-même
enjamber avec élégance
les fossiles de la lumière laissés sur le sol
par le premier rayon venu balayer les hommes
au temps où vivre était encore un jeu avec toutes les issues possibles
nous sommes les portes et les fenêtres
d'une maison qui s'est mise en marche

j'invite à déjeuner
en fraude par surprise en agitant les mains
ce qui est léger ce qui regarde entre les volets
cette sorte d'enfant qui rit toujours
que le soleil s'en aille ou revienne
et rêve de courir à travers tout ce qui vit
filer d'une course acceuillante
s'imprégnant d'odeurs de dièses et de bémols
offrant ses cheveux à la musique

s'ouvre alors un piano d'une espèce évoluée
qui compose aime réagit
et court avec nous
je n'aime pas les chaises dis-tu il n'y en a pas sur le tapis roulant
on ne peut pas non plus s'asseoir sur les gens
ils sont fixés leurs yeux bougent à peine
comptent quelques étoiles
et les têtes retombent suivent les instructions de la machine

puis un autre temps passe et les fleurs ont poussé
elles arrivent maintenant à la hauteur du ventre des plus rêveurs
des plus fatigués des plus près de s'allonger pour toujours
derrière le soleil se donne une fête
la voir c'est mourir
les pancartes disent que nous avons été fabriqués là
nés sur place tirés d'une rainure
jetés d'un flacon
flaque à la forme exacte d'un coeur

nous ne venons pas du discours des hommes
nous ne venons pas de leur soif qui rétrécit la gorge
je sais des colonnes des ponts et des arches
et des phares qui dansent en récitant la mer



8. Nuit d'émeute à Gattaca.


je sais des colonnes des ponts et des arches
et des phares qui dansent en récitant la mer

n'appuyez pas vos mains sur le détecteur
tendez les
une vers la terre
l'autre vers le ciel
les deux vers les autres
surpris
se souvenant de leur bras
retrouvant leur respiration qui halète

qu'on fasse alors entrer les fleurs
elles entrent elles soulèvent tout
forment une jungle de craquelures un jardin de mailles
s'ébattent organisent des jeux
qui restituent l'homme à l'homme

et je me souviens
de toi

toi vue de loin de près de l'intérieur
marmonnée par des rideaux qui s'empilent
toi l'instinct d'une couleur
qui déborde et embellit
ce qui est déjà beau

qu'on fasse entrer les fleurs
elles disent nous sommes déjà là
recousent les gens de la file les uns aux autres
parfois un peu n'importe comment
en s'enroulant dans leur chair en rapprochant leurs pensées
en passant dans leur corps avec leurs tiges habiles

et parfois
elles recousent les bonnes moitiés

viennent pratiquer des ouvertures des opercules des valves

elles ont l'art de tuer le tapis qui roule
en emportant notre sang
carbonique silencieux disposé en files

qu'on fasse alors entrer les fleurs
qu'on les dépose entre chaque touche du piano
qu'on ravive
ce qui est déjà vivant

on entend alors un cri puissant et mélodieux
un homme un vrai se met à courir
une femme une vraie se met à voler



9. Brahma Vishnou Shiva sont dans un bateau.

un homme un vrai se met à courir
une femme une vraie se met à voler

dans cette sorte de maison entraînée par une voile
où l'enfant rit toujours en jouant de la lumière des volets
stores pour exister plus ou moins
écriture des notes basses et hautes de la marée
la route la maison le tapis la partition
tout longe la mer

je clignote j'aspire des poussières les restitue en langage
je revêts la route de tentes qui servent de lumières
pour indiquer au vagues l'espace qu'elles doivent soulever
et quand la vague vient tout balayer
c'est l'eau qui m'attise

on entend alors le bruit des hachoirs qui tombent
leur métal fondu d'amour porté au rouge au blanc au vert
pluie en rivière de mousse au pied des entiers qui s'éveillent

une main une autre
la tienne la mienne je prends appui je me redresse et cours
pour faire le pas de côté qui nous enlève du grondement des gènes
la pluie noire des machines qui dévorent les arbres
des corps qui se traînent et se mangent mutuellement
leurs membres intriqués dont aucun ne correspond à l'autre

nous allons détraquer les saisons
déplacer la météo de quelques degrés
nous allons danser sur les ruines des usines à destin

j'entends déjà un froissement venu de là-haut qui murmure nos noms
je sais déjà l'attraction du baiser de la terre qui m'appelle
juché sur la balançoire du ciel je me lance un deux trois
je chante la musique de la route qui traverse nos corps

je sens déjà les fleurs
faire leur chemin en moi



10. Cette vie est un rosier qui monte à vue d'oeil.

je sens déjà les fleurs
faire leur chemin en moi

et les mousses humides aux couleurs vives qui furent des hachoirs
du temps où on les regardait sans oser respirer
remontent doucement
le long de la cheville qu'elles ont choisies
le long des ailes qui s'ébrouent des restes d'usines
qui leur collent aux plumes
le long de la file d' étoiles maigres dont la plupart marchent encore du
même pas
ou croient marcher
sur le tapis roulant qui les emmène malgré elles jusqu'au grand
déversoir
les mousses jouent à tracer des ombres sur l'arrière de leurs genoux

réveillez-vous disent les fleurs
les machines sont mortes sans donner d'instructions
secouez la forêt comme un drap de noces
cette vie est un rosier qui monte à vue d'oeil
réveillez-vous fracassez les cadrans dépassez les aiguilles

c'est la nuit réveillez vous
je sens déjà les fleurs soulever la maison
j'entends murmurer la terre
des mains se rejoignent
en courant

nous avons fixé des destinations des heures de décollage
des bouts de piste des horaires d'amour
des largesses sans raison
des tours de magie
des gestes que les machines ne savent pas lire

et pour le moment personne n'est encore parvenu assez loin
pour raconter la suite
on sait juste que quelque chose se met à basculer et déborder
c'est presque l'été la balançoire je me lance un deux trois
une femme deux mains trois histoires quatre coins
cinq saisons six arbres sept entrées huit points cardinaux neuf vies
un grand souffle vient de nous ou nous traverse peu importe
on rapporte qu'ensuite le ciel se remplit de rubans
qui brillent et chantent une chanson qui modifie le climat
cette vie est un rosier qui court et nous fait signe

je suis l'ombre d'un grand animal d'amour
j'entends le son de l'autre moitié du pas.

23-04-2003

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