Répondre simplement aux yeux qui s'ap... Log Out | Thèmes | Recherche
Modérateurs | Fiche Personnelle

66 zone franche - Le forum de Francopolis » Textes » A R C H I V E S » Les textes du 01.05.2004 au 31.08.2004 » Répondre simplement aux yeux qui s'approchent « précédent Suivant »

Auteur Message
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

s*
Envoyé samedi 08 mai 2004 - 22h06:   

-- Répondre simplement aux yeux qui s'approchent --


de mes nombreux dormeurs debout
je guéris
par le simple contact de tes chevilles

vers le bout du chemin
je me rends compte que je possède
la nomenclature complète
de tout ce dont on peut mourir
mais parce que vos cercles manquent aux miens
je vis
plus encore que les plus vivants

je défile au dernier rang de moi
je vis d'un seul baiser de buissons rares
et d'une bouche qui s'ouvre dans l'eau
tous les cent ans
je tombe avec tout ce qui tombe en tournant
- j'ai tout vu et j'ai peur
du trop bleu de la mer qui nous tire
vers elle et ses enfants plus bleus encore-

nous montons
si haut que la neige se remet à fondre
nous montons poussés par notre peuple
et son orchestre d'ancètres
nous montons à contresens
à l'envers du grondement désoeuvré des pleurs
venus de la cale des bateaux
litres de soi que l'on vide
en plein dans les yeux des vagues
-j'ai tout vu et j'ai peur
de ce qui pourrait vivre-

j'imagine alors
que tout ce soleil
vient de nos cheveux versés
tresses enroulées lacis de fêtes
inégalement réparties le long des hommes
et j'ai raison
- j'ai tout vu et je dis que ce moment est femme-
la mer tout en bas se cambre
longue reine disposée comme elle peut
coeur de petite différence
entre ceux qui parlent et ceux qui nagent

et des siècles après
je tremblerai encore de ce début de vie en pleine mer
et de la grotte grande ouverte
à même ma forme d'eau
ta silhouette secrète lovée loin dans la mienne

je tremblerai pendant des siècles
de cette montagne dans la nuit
et son massif de rayons
- j'ai tout vu et j'en brille encore-
je tremblerai longtemps du poupon noir tant serré contre moi
dans ce lieu des vagues au creux du continent
que j'appelais nulle part dès le matin

et maintenant
arrivé en haut de mes bras qui bercent les cailloux
ventre longtemps frotté contre le grand mur blanc
ciel dur qui garde les hommes de tout connaître vraiment
je garde ce que tu m'as dit de garder
je garde la porte des cheveux qui poussent
je garde le seuil aimé
-j'ai tout vu et je suis encore là moi aussi-

et du village vert tout en bas
s'exhalent parfois quelques voix qui nous aiment
et savent lire notre présent
c'est bon d'être montés jusque là
nos paumes sentent la myrte
-l'épuisement est aussi un parfum
tunique d'ombre
et roses jusque dans les cheveux-

il y a dans cet instant
le simple bonheur d'entamer le monde
comme un grand fromage rond
qu'on se passerait de main en main

et pourquoi la tristesse n'est pas suffisante
pour tout arrêter ?
et pourquoi notre île ne maigrit jamais ?
me demandes-tu en nageant
je ne sais pas quoi te répondre
- j'ai tout vu et j'ai encore faim-
je suis comme toi je plonge
je suis comme toi j'arpente les remous sans bruit
je suis comme toi je me recouvre
de cette mousse animale immense sombre
je ne sais pas
je regarde le monde grossir
et la mer déborder

tu sais
depuis toujours
je ne fais rien d'autre
que répondre simplement aux yeux qui s'approchent

08-05-2004

Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

elle qui sait presque
Envoyé dimanche 09 mai 2004 - 00h46:   

Simple humanité
tu l’aimes elle te ressemble ou te transcende
elle te suffit
quelque temps

Tu ne peux pas mourir le premier
justement puisque tu sais
les erreurs
les égarements
toutes ces choses enseignées
qui ne sont pas toi
et qui pourraient t’enchaîner
Tu es libre et
cette bouche dis-tu si rare
te donne le lait qui serait nécessaire
à qui sait trop qu’il est mortel
qui ne sait pas que la mort est un retour

Pourquoi avoir peur de celle qui a enfanté l’humanité toute entière ?
aurais – tu le vertige ?
la mer a tout créé .
elle est notre origine.

L’amour est cet aller-retour qui devait dire
Dire ce qui est et ce que nous sommes
L’autrefois et l’avenir
Puisqu’ils nous habitent
Puisqu’ils sont notre consistance

Femme – vague- eau – placenta- mer – mère
Tu as nagé quelque temps en elle
et soudain ce désir de lumière
t’a attiré vers la liberté
Tu as renoncé à la douceur du tiède
au balancement musical des ondes intérieures
Tu chercheras toujours
Parfois sans le savoir
A retrouver cette conque
Tu ne sais pas toujours si la liberté
Vaut la peine de quitter
Le sel donné

Alors tu cherches la route
De cet océan perdu
Tu tentes un jour le sable
Et tu t’allonges
Ton regard tendu vers le soleil

Le lendemain une vague
Echo d’une tempête en symphonie
T’appelle et tu pars
Tu marches tu te précipites sans raison

Il est difficile de trouver son chemin
Tu ne pourras pas d’un seul regard
Epouser tous les yeux qui se tendent vers toi
La terre a beau être ronde et douce

Il te faudra si, tu veux trouver
cet air où t’allonger avant de repartir
pour créer
- car tu es créateur de rêves et de vérité -
Un jour t’asseoir sous un saule

Savoir que c’est là
là seulement
que tu trouves la nourriture qui te transcende
Ce jour là seulement
tu bâtiras des cathédrales

















Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

?
Envoyé dimanche 09 mai 2004 - 01h54:   

?
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

mary
Envoyé dimanche 09 mai 2004 - 09h48:   

« Echo d’une tempête en symphonie »


***
« tu sais
depuis toujours
je ne fais rien d'autre
que répondre simplement aux yeux qui s'approchent »
s*

***
« Regardons la vérité dans les yeux

Regardons la vérité dans les yeux : absents
courageusement regardons la vérité dans ses yeux gris,
ceux qui ne nous quittent pas,
ceux qui sont partout enfoncés dans le pavé,
sous les pieds collés sur les affiches et ceux coincés dans les nuages ;
même s’ils devraient nous mettre à genoux. »

Baranczak Stanislaw (1946)

***

« et pourquoi la tristesse n'est pas suffisante
pour tout arrêter ?
et pourquoi notre île ne maigrit jamais ?
me demandes-tu en nageant
je ne sais pas quoi te répondre
- j'ai tout vu et j'ai encore faim-
je suis comme toi je plonge
je suis comme toi j'arpente les remous sans bruit
je suis comme toi je me recouvre
de cette mousse animale immense sombre
je ne sais pas
je regarde le monde grossir
et la mer déborder »
s*


« La journée balançait.
La journée comme le bateau balançait hosanna,
un bateau de tôle ou de bois naviguait
la nuit, jusqu'à la rose matinée.
Déjà il y avait les îles
souriantes avec les défenses d’éléphants,
nous nagions toi et moi, poupée, et tous
comme les feuilles collées à l'écorce
que le vent fait fuir.
(…)

K. K. Baczynski (1921-1944)


Mère, comment me protégeras-tu
quand les hommes noirs, enveloppés dans la nuit,
malgré tes mains
dressées comme une tente de prière
projettent des lignes des foudres s’ébrouant
comme un troupeau de chevaux spectraux ? »

K. K. Baczynski (1921-1944)



***

- j'ai tout vu et je dis que ce moment est femme-
la mer tout en bas se cambre
longue reine disposée comme elle peut
coeur de petite différence
entre ceux qui parlent et ceux qui nagent

et des siècles après
je tremblerai encore de ce début de vie en pleine mer
s*


J'attends dans les gares solitaires et vides
en comptant les ampoules des étoiles qui s'éteignent.
Je marche lentement, je m'arrête devant le miroir
étranger, noirci du paysages des villes
de plus en plus loin ; le toit bruine d'écho
et dans le rythme des wagons coule la forêt.
Déjà la tristesse est partie loin
Dans la nuit étoilées et sans étoiles.
Les paysages étrangers sont comme des cartes postales,
des animaux découpés dans les atlas.
J'ai déjà traversé des moments clairs et noirs,
et vu toutes les époques et tous les temps.

K. K. Baczynski (1921-1944)



***


« Alors tu cherches la route
De cet océan perdu
Tu tentes un jour le sable
Et tu t’allonges
Ton regard tendu vers le soleil

Le lendemain une vague
Echo d’une tempête en symphonie
T’appelle et tu pars
Tu marches tu te précipites sans raison

Il est difficile de trouver son chemin »

elle qui sait presque

***

« Oh! Vie! Vie!
Eternelle inquiétude pour l'exactitude de nos pas !
(et non pas pour les noms de nos chemins)
même quand sonne la plénitude d’un chant trompeur
combien d'images
comme la pluie ruisselle sur nous ? »

K. K. Baczynski (1921-1944)


P.S. Steph *, tu ne peux plus nier ta « responsabilité » :-))) !!!


Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Ln
Envoyé dimanche 09 mai 2004 - 12h51:   

Mary tu nous donnes envie de connaître mieux ce poète .
beaucoup d'auteurs traduisent leur incertitude , leurs hésitations sur les chemins à prendre.
Y a-t-il un poème de Baczynski qui laisse supposer qu'il ait trouvé ?
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

k-sper
Envoyé dimanche 09 mai 2004 - 18h39:   

Ce texte, celui de S*, transcende toute notalgie, toute peur, toute amertume des origines en un texte d'une beauté rarement atteinte même dans ses plus beaux textes. On y lit au delà de l'épaisseur de l'homme, dans son noyau, il n'y a que la nue offrande de ce désir de vivre au travers de tout ce qui nous a fait et mis en mouvement.

C'est une vraie émotion, quelque chose d'un grand oeuvre de la petite voie. Dans la tonalité qui dicte le récit, la rconciliation de l'immense et de l'infime qui fait l'humain.

Pas envie de deviner ou de savoir quoi que ce soit d'autre que l'essentiel: ce texte de S* révèle un intime unique et universl à la fois.

K-sper
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

karl
Envoyé lundi 10 mai 2004 - 19h17:   

Je ne sais trop pourquoi Stéphane,
mais tes textes me donnent les frissons.
Nul autre voyage semblable à ceux que je fais au coeur de tes mots, de tes chevauchement de sens, des lumineuses images qui nous balancent.
Tu es fabuleux S*, je reviens plus tard...
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

s*
Envoyé lundi 10 mai 2004 - 20h13:   

Je ne sais jamais quoi répondre à ce genre de message.

À part que si j'étais si "fabuleux" (qui, dans les français ici, se souvient de la pub pour Fabulon ?:-)... je n'écrirais pas de poèmes. Il me semble que quand on a atteint une sorte de niveau de conscience et d'éveil, on a plus "besoin" d'"écrire" des poèmes, parce qu'on sait que tout "est" un poème et on "co-écrit", ce poème en permanence.

Donc, je ne sais pas toi, mais à chaque fois que j'écris, même si je peux transmettre des choses "pleines", je fais également un aveu d'nfirmité.
Parce qu'un texte, même s'il transmet ceci ou cela, ça reste toujours un aveu qu'il manque quelque chose, quelqu'un ou même une part de soi-même.
Maintenant, bien sûr, il existe aussi de doux aveux :-) C'est sans doute précisément ce qui fait le charme des textes qu'on aime, ils ont parfois des jolies failles, comme les petites rides autour des yeux de la personne que tu aimes, ce genre là (enfin, comprenons-nous, je sais que tu es plus jeune, c'est un exemple :-))

D'autre part, Karl, je n'aime pas faire le ping-pong des compliments, parce que ça fait un peu duo de compères, mais tu es l'écriture la plus *exacte* que j'ai lue sur le net, avec une autre, mais "partie" depuis longtemps, tu as une précision hallucinante, une sorte de laser d'âme, et j'aimerais bien avoir ta capacité de savoir dire moi-même, sans que fuient de moi quatre mots de trop pour deux mots exacts. Comment tu fais pour presque jamais dire un truc en trop ?

Voilou.
Bonne soirée à toi et à tous.

Et merci à Marie, pour m'avoir tressé avec Basczynky. La Pologne semble être un nid de poètes avec regard en coin d'oeil comme je les aime.
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

karl
Envoyé lundi 10 mai 2004 - 21h54:   

Je l'ai déjà dit maites fois, je ne comprends pas trop ce que j'écris, j'écris le temps qui parle sans utiliser trop de clichés, ni verbiage. Ça donne des résultats que d'autres, comme toi, nomment "précision".
Et puis les textes que je préfère parmi les miens sont rarissimes et la plupart du temps ceux qui sont le plus appréciés ne sont pas mes favoris, tu vois?

Salut à toi, le ping-pong s'arrête ici.

Amitiés

Le postage de nouveaux messages est actuellement désactivé dans cette catégorie. Contactez votre modérateur pour plus d'informations.

Thèmes | Depuis hier | La semaine dernière | Vue d'ensemble | Recherche | Aide - Guide | Crédits programme Administration