Résidences : 23eme pièce - Log Out | Thèmes | Recherche
Modérateurs | Fiche Personnelle

66 zone franche - Le forum de Francopolis » Textes » A R C H I V E S » Les textes du 01.05.2004 au 31.08.2004 » Résidences : 23eme pièce - « précédent Suivant »

Auteur Message
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

s*
Envoyé dimanche 22 août 2004 - 16h43:   

"Deuxièmement, poursuivis-je, il n'y aura pas beaucoup de lumière. Il faut donc rester proche l'un de l'autre et prendre chacun une lampe"
- Roger Zelazny

Résidences

Vingt-troisième pièce

L'entrée des reflets d'yeux



Ici, on remplit par les yeux les corps des hommes vides.
Ici, on entre en composant des chiffres au hasard. Quatre, trois, deux, un seul, on s'appuie sur le nombre des yeux que l'on croit avoir.
On fixe un pied sous une autre tête, un bras sur un autre torse, jusqu'à ressembler soi-même à une clé aux bords irréguliers.

pour que le vent souffle
aille plus vite
rebondisse
sur les montagnes et les vallées de clé
c'est lui seul qui ouvre la porte

On médit du dehors, ce ciment de paysage aux couleurs artificielles, aux horizons mal fixés dont on aperçoit distinctement les fils. Une main lesenlève une seule seconde trop tard. Le temps suffisant pour être recouvert de rayons de rétine, d'écailles de clarté, de vitraux de cernes.

ainsi ton corps annonce sa présence
et fait un bruit de verre et de soleil
quand il se déplace

Je rebondis dans l'entrée des reflets d'yeux. Mes protections d'ombres et de paupières recouvrent à peine la matière étranglée versée en moi par mes yeux ouverts.
Des sacs sombres s'agitent dans les angles. J'espère que ce sont les morceaux des autres et pas les miens.

il vaut mieux que tu regardes l'escalier
la météo prévoit une éclaircie
vers le haut des marches

Je replie l'entrée, l'empile en feuilles , la déguise en reflets du
dehors. Ceux qui rentreront ici sans s'être vidés n'y verront qu'une flaque un peu trop brillante, un miroir un peu trop expressif.
Puis je fais tourner la combinaison et je raconte une histoire aux
chiffres pour qu'ils s'endorment sur leur lit pivotant.

j'espère que la clé
ne fait pas trop mal
et que l'entrée n'a pas trop mordu
les autres pièces

À part une éraflure de conscience, je suis entier.

22-08-2004

(à suivre)
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

so-so
Envoyé dimanche 22 août 2004 - 19h44:   

ah, y'a pas à dire (mais on va le dire quand même), y'a kêke chose qui (se) passe...

mais je ne peux pas m'empêcher d'exprimer quelques remarques sur la forme

"on s'appuie sur le nombre des yeux que l'on croit avoir"
le verbe "appuyer" me déplaît perso-so.
compte tenu de la suite, j'aurais écrit "on s'inspire du nombre...", par exemple

"jusqu'à ressembler soi-même à une clé aux bords irréguliers"
c'est bête, j'aurais dit
jusqu'à ressembler soi-même aux bords irréguliers d'une clé"
(puisque c'est le vent seul qui ouvre la porte et parce que ça me paraîr mieux couler)

"une seule seconde trop tard"
me semble un peu lourd

"de rayons de rétine, d'écailles de clarté, de vitraux de cernes."
j'aurais ajouté un "et" final à cette suite magnifique

"versée en moi par mes yeux ouverts"
j'aurais préféré "que versent en moi mes yeux ouverts"

"Je replie l'entrée, l'empile en feuilles"
j'ai pourtant l'impression que c'est l'acte de plier qui crée l'illusion d'empilement... difficile de faire les 2 simultanément

"À part une éraflure de conscience, je suis entier"
une entaille n'est pas une "mutilation", elle ne met pas en danger l'intégrité, pas de quoi s'inquiéter...


quoi qu'il en soit, on devine un vrai rapport (de force) avec les mots dans chaque vers, une espèce de lutte cordiale, mais naturellement féroce, qui me réjouit plutôt.
pas d'esthétisme frisant la banalité, mais une main qui écrit en faisant un un bras de fer avec les silences assoudissants qui polluent beaucoup de textes (dont les miens, assurément)...
;-)

mais bon, j'vais arrêter de faire ma Leezie et attendre la suite comme le fauve attend sa proie aux abords du troupeau des mots...



Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

s*
Envoyé dimanche 22 août 2004 - 20h24:   

Salut ami so-so dit "l'âme à choir", c'est mon jour de chance, je t'attendais plus féroce sur celui-là, j'avais déjà commencé à tracer des petits numéros sur moi, comme dans le dessin animé de Tex Avery, pour me reconstituer après ton passage.

- "s'appuie", tu as raison, c'est assez moyen inf comme choix, ça devait être mon creux de vague. D'un autre côté, ça fait un verbe corporel, qui va bien avec le reste, seulement dire ça ne serait qu'une pirouette pour retomber sur ses pattes après coup, c'est pas génial et puis c'est tout.
"s'inspire", par contre, je n'aurais pas été pêcher celui-là, ce verbe prend vite une connotation soit métaphysique/spiritualiste, dont je me méfie un peu des excès, soit cérébrale-intellectuelle et ça ne va pas avec le texte.

- "jusqu'à ressembler etc...". Ton choix est plus musical pour le son, c'est vrai. Mais pour le sens de ressembler à un tout ^lutôt qu'à une partie, je préfère ma version, même plus hachée et moins logique par rapport à ta remarque.

- "une seule seconde trop tard", c'est pas tout à fait le même sens qu'"une seconde trop tard", ça charge plus, c'est vrai, mais justement.

- "et de vitraux de cernes", sans doute pour le son, ça aurait été plus fluide (tu es très attentif au son, j'aime bien ça), mais un petit côté essoufflé ou disons... saisi, me paraît bien aussi, justement. Mais ça ce n'est qu'une perception personnelle, penser autrement est tout aussi valable.

- "versée en moi par mes yeux ouverts", tiens en fait il y a un involontaire double sens que je viens de lever en te lisant. Le premier c'est bien celui que tu as indiqué ("que mes yeux ouverts versent en moi"), le deuxième, c'est "versée en moi à travers mes yeux ouverts", c'est celle à laquelle je pensais en écrivant.

- "Je replie l'entrée, l'empile en feuilles"
j'ai pourtant l'impression que c'est l'acte de plier qui crée l'illusion d'empilement... difficile de faire les 2 simultanément"

dis-tu.

C'est vrai, c'est successif, pas simultané, sauf si on plie en accordéon, mais bon, pas à toi que je vais la faire :-)

- "À part une éraflure de conscience, je suis entier"
une entaille n'est pas une "mutilation", elle ne met pas en danger l'intégrité, pas de quoi s'inquiéter...

Ta remarque est juste. Je pensais plus fort, j'ai voulu faire un euphémisme, une sorte d'understatement. Mais dans ce cas, il eut fallu que je fusse plus clair.

Marrante, ta vision de lutte et de force. Genre nager contre le courant, peut-être. Tiens, la petite phrase d'exergue, c'est dans une nouvelle de SF où il y a une immense créature sous-marine. En allant à sa rencontre, les deux héros vont à la rencontre d'eux mêmes, gna gna, tout ça. Peut-être est-elle faite de silences assourdissants. Ou peut-être pas.
Tu devrais faire vigie. Je soupçonne que tu aurais peut-être été capable de trouver les Indes. Merci pour ta lecture. Perso-so, je m'estime gâté.

Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

s*
Envoyé lundi 23 août 2004 - 14h52:   

"À part une éraflure de conscience, je suis entier"
une entaille n'est pas une "mutilation", elle ne met pas en danger l'intégrité, pas de quoi s'inquiéter..."

(so-so)

En fait, ça allait même plus loin. La formulation n'était pas assez claire, mais je voulais dire non pas "une éraflure dans la conscience", "une éraflure faite de conscience", une éraflure de conscience sur un corps d'ignorance. Oh, sans doute, j'en ai peur, comme tu le dis, elle ne met pas en danger l'intégrité de mon ignorance :-)
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

aar
Envoyé lundi 23 août 2004 - 19h04:   

Steph, je trouve que c’est un grand texte que tu viens d’écrire, au milieu de la nuit, quand la lune vient lire par dessus l’épaule. Tu auras beau dire ceci ou cela, cela ne changera pas.

Tu viens de sauter à pieds joints dans la poésie. en plein. Tu viens de décortiquer l’Homo Sapiens, ce fort à bras, de le désarticuler dans ses convictions élémentaires. Dans sa vanité.

Tu l’a fait tout simplement, avec une salopette de travail et deux clés à molette. Comme Charlie Chaplin dans les Temps Modernes.
Je sais. Tu as écris ce texte dans un reflet de lucidité. Une de ces fulgurances qui vous touche une fois par an ou par siècle. Tu as remis en jeu cette vieille question rétive à l’entendement et au formules scientifiques: à savoir si c'est la lumière qui entre par nos yeux (pour remplir notre vide) ou bien si c'est la lumière qui sort de nos yeux pour remplir le vide extérieur. Question qui ne meurt pas...
Avec tes petits bonhommes intérieurs, pas plus gros que des termites, qui rangent inlassablement les cageots de lumière dans les silences du péritoine....

Je ne sais pas si j’ai raison ou non. Je sais seulement que mille personnes aimeront ce texte chacun à leur façon. Et ça, c’est la seule marque qu’une poésie est bonne ou pas. Les défauts de formulation, c’est pécadille.

Ce Steph est un grand, un millésime, une sorte Vendanges Tardives.

salut à toi (je vais finir par être inspiré par ce texte)

Le postage de nouveaux messages est actuellement désactivé dans cette catégorie. Contactez votre modérateur pour plus d'informations.

Thèmes | Depuis hier | La semaine dernière | Vue d'ensemble | Recherche | Aide - Guide | Crédits programme Administration