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66 zone franche - Le forum de Francopolis » Textes » A R C H I V E S » Les textes du 01.09.2004 au 10.01.2005 » Gorée « précédent Suivant »

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Pascal DUFRENOY
Envoyé vendredi 12 novembre 2004 - 16h33:   

Gorée

Eh toi ! Vieux caillou aux reflets de matin rose
Aux jardins intérieurs de basalte poli
Aux caves humides et sombres qui bâillonnaient les cris
Des fers chauffés au rouge en guise de sursis
Tes chaloupes font des rides au front de l’océan
Tes ruelles sont des pièges aux visiteurs surpris
Des clichés de vacances aux senteurs estivales
Tes chaloupes font des rides au front de l’océan

Wolof, mon frère, jeune planteur d’arachides
Qu’est devenue ta femme ?
As –tu pu la pleurer ? Comme un chant du Cap Vert…
Gorée, mon calvaire, la fin de ma vie.

Lébou, mon cousin, pêcheur de la presqu’île
Qu’est devenu ton fils ?
As-tu pu le revoir ? Comme un soleil de mai …
Gorée, ma misère, la fin de mes années.

Eh toi ! Vieille île bossue aux parfums de souffrance
Tes arcades ont la courbe des femmes immobiles
Des matins d’ambre clair du printemps africain
Du suc capiteux des ombres du Castel
Mon île aux vérandas aux senteurs atlantiques
Aux malheurs étouffés qui remontent aux mémoires
Mon île aux cachots sombres aux soupirs retenus
Mon île de « bois d’ébène », mon île de misère

Peul, mon ami, Foulas, Foulani, Foulbé ou Poulos
Qu’est devenue ta mère ?
As-tu pu l’embrasser ? Comme un rêve oublié…
Gorée, mon histoire, l’entaille de mon destin.

Toucouleur, fier gardien du fleuve Sénégal
Qu’est devenue ta fille ?
As-tu pu l’enterrer ? Comme tes prières d’espoir…
Gorée, mon chagrin, le bout de mon chemin.


Eh toi ! Vieille pierre d’océan aux espoirs renaissants
Aux écoles tranquilles dans la douceur du vent
Au musée de la mer en vitrines de rêves
Aux mouillages paisibles en prélude à l’enfer
A l’abri des murailles de l’océan sévère
A la saveur flétrie d’une époque maudite
Ma pierre au poids terrible aux lourdeurs de chaînes
Aux mouillages paisibles en prélude à l’enfer.

Et j’écris là moi j’écris sans rien penser
Dessinant la misère sur mon papier couché
Et j’oublie mon histoire et j’oublie mon passé
Dessinant le malheur sur un papier glacé.

Sèrère, cultives-tu toujours la terre de tes pères ?
Voyageur Saracolès, fondateur d’empire
Qu’est devenue ta vie ?
As-tu pu oublier ? Comme les chagrins d’enfants…
Gorée, ma référence, l’empreinte de mes pas.

Diola, l’indépendant, forestier de l’esprit
Bassari, montagnards, arpenteurs de pistes
Qu’est devenue ton âme ?
As-tu pu pardonner ? Comme les charitables…
Gorée, ma brûlure, le gel de mes veines.

Eh toi ! Vieille pierre trempée dans l’eau salée
Aux vagues atlantiques, aux marées d’amertume
Thierno Seydon Sall, le poète errant
Coura Sarr, la lingère de la poésie et des crevettes
Massamba Guèye, le conteur éternel
Tous ces témoins modernes de la nouvelle Afrique
Eh toi vieille île rose aux anneaux de métal
Moi, l’homme blanc, le français,
Si tu le peux, un jour,
Puisses-tu me pardonner…
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philet
Envoyé samedi 13 novembre 2004 - 08h19:   

ouvre les yeux

tout se penche inexorablement sur le ciel entre les branches l’idée d’un bruit avenir violent dernier, d’un choc sourd dans le corps, dans les os, sur la chair, l’envie que soit rêve, une naissance farouche mais aussi franchissement, l’ombre du désespoir ne peut nous cacher la réalité, chaque image les unes après les autres se brise, éclisse arrachée à tous les soupçons d’évidence, ma pensée se ramasse en un bloc brutal, rigide se rétracte et fige l’espace, dans l’ardent creuset d’une convenable existence, l’impulsion de ses forces lie toute substance, vitale intérieur sur l’écran de mes yeux, sur les mots de ma bouche mon cri est muet, cotonneuse sensation où je pourrais tenir et vouloir en avenir tenter d’échapper à la chaleur du déplacement, lucidité pour une issue où ne serait pas utilisé le couteau mais sincèrement seulement le feu raviné d’un cri tenu en chair de sang et d’un souvenir prochain de ma viande massacrée, appel consistant d’une pensée refusée
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Cécile
Envoyé samedi 13 novembre 2004 - 18h58:   

Lettres de Gorée

Grain de pluie posé
Comme un baiser au balcon
De la mer
Calme à la crique
Du rocher
L'océan de sa langue
D'écume
Efface tes rides
Et viens mourir sur tes cheveux
De signara comme aux temps
Jadis les conquistadors
Ocre poussière de temps
Falaise de larmes
Gorée oublie les goélettes blanches
Phanèles de mer
Claquent aux ailes de l'alizé
Les senteurs d'épices et d'alcool
Sur les vagues défile
Le bois sacré des forêts
Débris de cœur sous le soleil
Glacé de midi
Masque bambara
Statuette Baoulé
Cuivre du bénin
Maisons peintes aux couleurs
Lavées de mon sang
Gorée s'éloigne
Ensemencer le nouveau monde
Du sel fertile de ma liberté
Le tam-tam n'est que ressac
Que cadence les chaînes
De mon angoisse.


Charles Carrère dans Poètes d’Afrique et des Antilles, anthologie présentée par Hamidou Dia, éditions La Table Ronde 2002, page 278

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