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jml
Envoyé jeudi 18 novembre 2004 - 19h48:   

Poème d'un auteur roumain que je trouve étonnant, Mircéa Cartarescu. J'en ai mis un autre dans Poésie du monde sous le fil des poètes roumains.

Clémentine je t’ai donné tout mon amour


Clémentine, je t’ai donné tout mon amour.
Rappelle-toi, nous mangions une scaloppina au restochic et tes dents se sont enragées,
La chicotine et l’ampicilline te plaignaient du fond des verres,
Clémentine
Je t’ai donné tout mon amour.

Clémentine, je t’ai donné tout mon amour
Et je t’ai donné tout ce que je possédais sauf les sous, car les sous ne peuvent pas aimer
Et tu es venue dans ma chambre et après tu t’es blottie sous le pianola
Et tu disais « je suis une bouillie et une défrouillie,
Je suis un mabeur et un collabeur » - dans quelle langue féline ?
Ah clémetine, ouf clémentine
Je t’ai donné tout mon amour.

À quatre heures du matin la ville semblait ciselée dans du nougat
Et les rails ferrés imprimés dans de la marmelade
Et très lentement, ah très, ah très lentement
Ma main se promenait sur ton burnous
À quatre heures du matin tu avançais mignonne et fringuée
Dans l’air plein d’étoiles et d’adjudants
Sans aujourd’hui, sans hier.
Et après des vadrouilles rue de l’automne et rue taras-chevtchenko près du lycée cantemir ta bouche demandait :
- qui d’autre as-tu aimé ? ah, quel sale temps…
quel temps pourri
et le soleil se montrait comme la horde mongole de gengis khan
soufflant sur la verrière et sur le terrain vague
envoyant valdinguer un fragile wagon, écorchant la lamborghini
garée sous ton sein gauche, ahimè clémentine
je t’ai donné tout mon amour.

Clémentine, te rappelles-tu que nous tirions les draperies ?
Peut-être pas, mais quant à moi pendant des semaines m’ont poursuivi
Tes zones érogènes
Une caresse de nos mains
Un tremblement de tes cils, bref toute la panoplie…
Je savais très exactement quand tu ne pensais pas à moi : tu chantais alors
Comme une dingue toujours la même chanson du far-west :
« do not bury me far in the lone prairie
where the coyotes howl most scornfully” je me serais flingué
quand je t’entendais, et je te faisais des scènes pénibles
alors s’éveillait en toi l’envie sadique de me parler de tes anciens
amants, en me regardant de tes petits yeux jaunes si innocents
que je doutais de tout et affichais une indifférence artistiquement
badigeonnée : je tendais le bras et sortais de ta bibliothèque
n’importe lequel de ces bouquins que, snobinarde, tu amassais
comme un écureuil sans penser les lire, sauf peut-être plus
tard, et je me mettais à tourner les pages, mais tu me le prenais
et tu m’embrassais, consolatrice : « qu’est-ce que tu as, tu files un
mauvais coco ? » et puis encore ces zones dingues
et tes gauloises et mon black & gold
et puis les petits fours et l’amandine
et puis on se faisait une toile ou un resto cinq étoiles
oui, clémentine
je t’ai donné tout mon amour.

Comme dirait ginsberg : je t’ai tout donné et du coup je ne suis plus rien.
Je t’ai tout donné ce que je possédais sauf les sous, car les sous ne peuvent pas aimer
Et maintenant nous vivons dans la même ville
Mais nous ne mordons plus à la foire dans la même barbe à papa
Car maintenant tu es lointaine
Madame vous êtes maintenant une étrangère
Ah clémentine,
Ah clémentine,
Ah clémentine je t’ai donné
Tout mon amour.

Traduit par Alain Paruit

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aar
Envoyé jeudi 18 novembre 2004 - 21h47:   

un vrai calisson ce poème
tendre, humain, dérisoire
qui colle à la vie comme le nougat aux dents

et sans un mot plus haut que les autres...

(va te rhabiller Rimbaud, vieille courge... )

me voila réconcilié avec la poésie.
merci à toi jml
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Christiane
Envoyé vendredi 19 novembre 2004 - 03h03:   

Moi aussi, j'ai aimé. Mais les calissons, les nougats, c'est pas dans la tradition au Québec. je dégustais une clémentine en lisant. Je vous jure que c'est vrai.

Ça m'a fait penser à "Dans les rues de la ville il y a mon amour, il n'est plus mon amour. Tout le monde peut lui parler......"

Merci, oh oui!

Et oui pour Rimbaud, il peut y aller se...
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Cécile
Envoyé vendredi 19 novembre 2004 - 08h22:   

Superbe !!! Ca donne vraiment envie de se plonger au coeur de la roumanie ! Déjà l'autre poème que tu avais mis dans les poésies du monde m'avait impressionnée !

Merci pour ce chouette partage Jml !

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