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Message |
    
jml
| | Envoyé jeudi 23 décembre 2004 - 01h21: | |
LES TROUS NOIRS
Le sage n'est pas moins fou, il est seulement plus sage. Ca lui permet d'être plus fou. La liberté ne nous relaxe pas du néant mais nous pousse vers tout. Il y a de l'infini dans un vol d'éphémères, des nuages d'absolu dans un ciel trop étroit. Est-ce l'homme qui est dans le monde ou bien le monde qui est dans l'homme ? Les morts laissent toujours en nous leurs promesses à tenir. C'est plein de vie dans les trous noirs. Il y a des choses à l'envers des choses. Du temps qui n'a pas d'heures. Du temps décomposé. De l'espace en puzzle. Un seuil en mille miettes. Le vin des astres fous où boivent les poètes, les enfants et les loups. En l'absence de rames, on se laisse dériver.
Il y a des marteaux qui n'ont pas besoin de manche pour penser et des manches de marteau qui pensent comme des clous. Il y a des manches de manteau qui gèlent, des costumes de bain qui ne supportent pas le soleil, des bateaux qui n'aiment pas l'eau, des costumes de nain trop grands pour des géants, des nez qui sentent avec les pieds, des pieds qui marchent à l'odorat, des oreilles de silence pour les fausses notes. L'odeur de l'homme n'est pas celle des morts, plutôt celle du sexe, l'odeur du temps qui reste, celle qui reste des paroles sur les lèvres du jour, l'odeur de l'espérance dans les germes qui lèvent et les bourgeons qui s'ouvrent.
Pour éviter la ligne droite et les costumes deux-pièces, j'ai ramassé toutes les questions en solde, celles qui se refusent aux réponses. Je m'en suis fait un cuir qui laisse voir le cœur et la peau du silence. Je n'ai pas dit adieu aux billes de verre, à la marelle, aux cerfs-volants, à la boue des glissades. Je n'ai pas renoncé à faire le pitre, le cancre et l'idiot du village. Je suis en retenue sur le bord du grand monde. Je m'y cache dans les trous noirs, les trous de mémoire, les trous du pain. C'est un peu moi les miettes qui traînent sur la page.
Qu'est-ce qu'on fait d'un poème qui ne veut pas de lui-même, d'un rêve qui devient possible, d'un désir comblé, d'un blanc de mémoire qui se couvre d'images, d'un banc de parc en plein désert ? Qu'est-ce qu'on fait d'un enfant qui veut devenir adulte, d'un aveugle qui voit avec les yeux d'un maître ? Ce ne sont pas les papillons qui représentent l'espoir mais les chenilles. Enfant déjà, j'avais la tête pleine de racines. Je m'amusais à lever l'ancre des arbres. Je sonnais avec mes yeux d'écorce à tous les étages du ciel. Aujourd'hui je fais l'amour comme on bêche la terre. On a semé des clous sous les pas des enfants mais le rêve s'en fout, il met des ailes partout. Je traîne dans mon ombre une arche de Noé rafistolée de rien, une banquise enceinte d'une plage au soleil, un mur dont les pierres s'effritent au moindre son.
Quand on retourne les galets, ils voient le ciel à cause de nous. Ils nous racontent ensuite l'histoire des vagues. Un oiseau quand il chante ne se retourne pas sur les applaudissements. Un arbre quand il pleure ne retient pas ses feuilles. Un homme quand il meurt se raccroche à la vie.
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s*
| | Envoyé jeudi 23 décembre 2004 - 03h27: | |
>une banquise enceinte d'une plage au soleil,
Il y a comme ça des petites phrases vertigineuses grâce auxquelles on se sent au bord de connaître un grand secret. |
cat
| | Envoyé dimanche 26 décembre 2004 - 18h36: | |
...moi, ce bout de vers me fait tout drole... ))))
merci JML pour tes *illuminations*
... mais apprendre a laisser mourir ce qui doit mourir, et apprendre a laisser naitre/vivre ce qui doit vivre )))
..avec des etincelles,
c.g. |
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