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jml
Envoyé samedi 25 décembre 2004 - 23h39:   

LES BALLES DE NEIGE



Il faut rentrer ses larmes pour tenir un fusil, montrer les crocs du cœur et brûler tous les livres. Quand le ciel s’étoile, qu’est-ce qui est cassé ? La fenêtre ou les yeux ? Le monde entier peut-être que les balles perdues ont fini par atteindre. Je traîne parmi les pots cassés quelques mots de guingois, le ressort des pendules qui retardent encore, des lambeaux d’espérance tachés du sang des hommes. L’eau de mer est malade. L’horizon la soulève sur la pointe des pieds pour ne pas qu’on l’écrase. L’hiver a les mains noires malgré ses gants de neige. Ses doigts ont oublié la douceur des caresses. L’homme a fait tant de clefs, il ne sait plus quelle porte mérite d’être ouverte.

L’amour est une boite oubliée dans une gare. On doit prendre tous les trains pour retrouver laquelle. On doit sauter en marche si le train continue. Nos pas deviennent des rails, nos bras des sémaphores. Les caresses oubliées deviennent lourdes à porter. Le ciel regarde nos visages et se met à pleuvoir. Il neigera demain de vraies balles traçantes. J’aurai l’air d’un pingouin avec mes balles de neige et mes ailes trop petites.

J’ai l’appétit des loups et leurs yeux d’enfant triste. Je cogne sur le pain pour qu’il ouvre la bouche. Je voulais dire quelque chose de doux mais les mots ont durcis avec le vent du froid. Les ombres ont des glaçons jusqu’au bout des orteils. Il fait si froid ce soir le feu crie sans chaleur. Les fleurs sur le mur ont pris l’odeur du givre. La lune grince dehors comme une vieille poulie. Ce qui sort de ma bouche est d’abord la buée. Je me sers de mes mains pour réchauffer les mots.

Lorsque j’aurai tout dit je mourrai de silence mais je commence à peine à connaître les mots. Lorsque le train s’arrête, il faut être les roues et détacher les rails. La ligne d’horizon commence par un point dans un oeil. La tête en arc-en-ciel au milieu des idées, je dessine à l’envers comme une chauve-souris. Je recueille les mots qui tombent des nuages. Il suffit d’un caillou pour croire à la montagne, d’un trombone pour inventer l’orchestre, d’une marche qui manque pour se bâtir un toit.

Sur cette mer des sarcasmes agitée par la tête, le cœur est une bouée qui rescape les mots. Dans les épaves des idées quelques poèmes survivent accrochés à la coque comme des étoiles de mer. Je ne veux pas de fleurs plus belles que les fleurs. Je ne veux que la boue où elles prennent racines, une note en folie dans l’air du déjà vu, une simple goutte de pluie où nage l’horizon.

Un arbre passe à ma fenêtre avec toutes ses pommes. Ses racines semblent des ailes. Des bateaux en bouteille remplacent les flocons et les balles de neige ont des fleurs à la main. Je n’ai pourtant rien bu. J’ai lu des mots d’Aar, de Méliade et d’Heurté. J'ai écouté chanter les Cuffi sans les voir. J’ai mis un monocle sur le visage des tropes, une trompe à la nuit, une trompette bouchée aux lèvres du silence, une cravate à pois sur le cou du sérieux. Ça commence par un rien puis les cailloux s’en mêlent. Ils ont la voix profonde des ravins de montagne. Ça commence par un mot et ça ne finit plus. Ça commence par un pied et l’escalier grandit. Ça commence par un chat et les gouttières s’emmêlent. Un brin d’herbe suffit pour justifier le monde.

25 décembre 2004
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jml
Envoyé samedi 25 décembre 2004 - 23h43:   

si vous êtes tannés dites-moi le. je sais où commencer mais je ne sais pas finir.
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...
Envoyé dimanche 26 décembre 2004 - 00h45:   

non non non, surtout continue...
petites, tes ailes? allons donc
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fouroulou
Envoyé dimanche 26 décembre 2004 - 01h08:   

"Un brin d’herbe suffit pour justifier le monde."c'est confirmé !les soufis le disent!! les savants aussi
"Je me sers de mes mains pour réchauffer les mots". c'est permis chez tout les cas !!ça arrive!!
" L’homme a fait tant de clefs, il ne sait plus quelle porte mérite d’être ouverte. " quelle belle sagesse!! ..sauf l'amour n'hiberne pas!!..

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lisa
Envoyé dimanche 26 décembre 2004 - 12h05:   

"Des lambeaux d'espérance tachés du sang des hommes" : belle image, jml. C'estsuper, tout ça !

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