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jml
| Envoyé lundi 03 janvier 2005 - 06h22: | |
Il y a du brouhaha dans le silence des mots. On sent bien qu’ils s’apprêtent à sortir. Il y a des voyelles qui se boutonnent, des consonnes qui se cherchent des gants. Il y a déjà des phrases mettant le cœur à nu, des points sur les i et d’autres sur les hanches, des parenthèses qui s’habillent et choisissent la même robe. Des virgules se maquillent de la couleur de l’encre. Des paragraphes entiers cherchent leurs papiers, leurs clefs ou leurs tickets. Il y a toujours une dernière voyelle dont on doit changer la couche, une vieille mémé phrase qui ne veut pas sortir sans emporter son canari, des mots d’adolescents qu’on n’ose pas sortir, le grand-père image qui vient de casser sa pipe et l’oxymore qui casse du sucre sur le dos des idées. Il arrive aussi que le crayon refuse de démarrer, que le clavier fasse la grève, que le portier d’émessène refuse d’ouvrir la page. Je dois alors marcher un caillou dans les mots, une phrase dans les souliers, un foulard sur la page que tricotent les fées, des bas dépareillés au pied de chaque vers, des mitaines pas de pouce pour caresser le vent, une tuque de neige sur la tête du i, un chapeau circonflexe, un paletot circonspect, un nez de clown à la place du o et un bonhomme de neige qui enrobe les a. Je monte mot à mot l’escalier du langage. Je m’accroche en aveugle à la rampe des images. 3 janvier 2005 |
   
Cécile
| Envoyé lundi 03 janvier 2005 - 21h41: | |
Cher Jml, tu es le roi de l'image et de la prose !!! Chaque jour que je te lis, chaque jour je manque de boutonner mes voyelles, les deux i sur les hanches et je me dis : il monte l'escalier du langage notre Jml... Juste petite chose, je ne sais pas pourquoi je trouve que la dernière phrase enlève de la valeur à l'avant dernière... |
   
jml
| Envoyé lundi 03 janvier 2005 - 23h05: | |
Merci Cécile. Tu as raison pour la dernière phrase. Je l'ai d'ailleurs ajouté à la dernière minute. Elle n'est pas du même souffle. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je ne corrige jamais, je fais pire. |
   
Jordy
| Envoyé mardi 04 janvier 2005 - 18h05: | |
C'est splendide, JML! au point que j'ai envie,si tu le veux bien, et si le metteur en scène Robert Moulon accepte,de proposer qu'on le rajoute à notre montage poétique "cris écrits" (le titre est de moi, et j'en suis très fier! :-)) C'est un montage chanson et poésie sur les livres,les mots, l'écrit, le verbe. Alors? je peux y aller? |
   
Jordy
| Envoyé mardi 04 janvier 2005 - 18h14: | |
Tiens, voici la chanson introductive au spectacle (que j’ai écrite sur mesure, évidemment) Les mots Les mots sont des phalènes Des lueurs dans la nuit Les mots sont cantilènes Et soleils de minuit Les mots sont des alcools Qui flambent dans la gorge Feux crachés vers l’envol Crépitements de forge Il est des mots pour l’ombre Des mots cherche-Midi Qui naissent des décombres Et s’ouvrent sur le cri Et les mots sont drapeaux Quand hurle la colère Hardes et oripeaux Où chatoie la misère Il est des mots mort-nés Et des mots bâillonnés Et brûlés en fagots Par l’Ordre et les bigots Soudain les mots s’enivrent Et débordent des livres Et les mots nous délivrent Et célèbrent le vivre Il est des mots délire Où explose la lyre Il est des mots à lire Il est des mots à dire Des mots à écouter Des mots à inventer Et des mots enchantés Et des mots à chanter Et à la fin du spectacle, avec la même mélodie : Et puis les mots s’apaisent Sur un chuchotement Les mots se font caresse S’endorment doucement Au rougeoiement des braises S’est assoupie la transe Et puis les mots se taisent Et s’ouvre…le silence
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jml
| Envoyé mardi 04 janvier 2005 - 21h32: | |
Avec un grand plaisir Jordy et salue Bertin de la part des Québécois mais dis-lui qu'il amène ses musiciens la prochaine fois. |
   
Jordy
| Envoyé mercredi 05 janvier 2005 - 10h18: | |
Bertin est gonflé de se présenter en public juste avec sa guitare.Il en joue de manière basique, en plus, et on l'entend assez peu.C'est vraiment austère! Mais c'est une question de budget, pas un choix personnel.(en plus,dans certains pays, comme les USA, par exemple, on n'a pas le droit d'amener ses propres musiciens,il faut prendre des musiciens locaux, et c'est impossible pour un chanteur style Bertin! il faut qu'il y ait eu des dizaines de répétitions avec le même pianiste,et une connivence née lors des tournées. C'était toi qui avait raconté l'anecdote sur le Bleu? Parait que lors de cette tournée au Québec,un soir il y avait 20 personnes dans la salle.Après le spectacle, Bertin est allé serrer la main des vingt spectateurs pour les remercier d'être venus! :-)) |
   
jml
| Envoyé mercredi 05 janvier 2005 - 17h32: | |
C'était à Victoriaville, dans ma région. Bertin n'est pas très connu au Québec, sauf dans la ville de Québec. Pour l'encourager je lui avais d'ailleurs raconté une autre anecdote à propos du grand Raymond Lévesque. Ce dernier est lui-même allé reconduire chacun des spectateurs. Il y avait 4 spectatrices en fait. En sortant, elles étaient encore dans le hall à cause d'un orage et elles n'avaient pas d'auto. Il est allé les reconduire chez elles. Au Québec aussi on doit payer un musicien de la guilde pour chaque musicien étranger même s'il ne joue pas. Quand Bertin est venu avec ses musiciens quelques années auparavant il risquait l'amende. Léo Ferré pour contourner le problème et garder le prix des billets très bas a déjà fait une tournée au Québec avec seulement Popaul et une bande préenregistrée. Il a été le premier a utilisé cette technique. Je crois même qu'on a réglementé cette pratique au Canada à cause de Ferré. Ce n'était quand même pas l'idéal. Quand il avait des pertes de mémoire Popaul lui soufflait les paroles (en les changeant parfois) et il y avait un léger décalage entre la musique et les paroles. Les engueulades entre Popaul et Léo étaient quand même amusantes. |
   
Jordy
| Envoyé mercredi 05 janvier 2005 - 19h06: | |
Oui, à une époque,Ferré faisait tout son tour de chant rien qu'avec les bandes (même pas Popaul Castanier!)et quelques chansons qu'il accompagnait lui-même au piano.C'est ainsi que je l'ai vu à Nice,au début des années 80.C'était super, bien sûr,mais ça manquait de naturel, vu que la bande-orchestre interdit toute improvisation, et que le trou est fatal! (et Leo se trompait de temps en temps)Les moments les plus authentiques, c'était quand il s'accompagnait au piano. Mais vraiment, j'ai beau être un inconditionnel de Bertin,(une de mes idoles, même)à la gratte,c'est infiniment moins bien.A Nice et à Barjac, il avait son pianiste,jouant aussi du synthé, c'était magnifique.Mais à un moment,il prend la guitare et fait six, sept chansons comme ça. J'ai ressenti ça comme un "tunnel"!je me suis presque fait chier!Heureusement, il reste toujours cette voix sublime,cette interprétation formidable...et la splendeur des textes! |
   
lafourmi
| Envoyé mercredi 05 janvier 2005 - 19h17: | |
merci c'est très intéresant ces anecdotes. |
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