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66 zone franche - Le forum de Francopolis » Textes » A R C H I V E S » Les textes du 11.01.2005 au 31.03.2005 » Dans un attaché-case « précédent Suivant »

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jml
Envoyé vendredi 18 février 2005 - 08h28:   

Dans un attaché-case


Nous sommes calibrés,
Millimétrés, préfabriqués.
Tout s’achète et se vend,
Les rivières, les consciences,
Les ordures et les gènes.
On croit tenir le monde
Au bout du bras
On traîne un cimetière
Dans un attaché-case.
On croit parler aux dieux
On pend la parole sans fil.

Au lieu de prendre le sentier
Nous choisissons la chaise,
L’écran au lieu du ciel,
La table au lieu du pain,
Le plein d’essence
Au lieu d’une pinte d’amour.
Quand un enfant a soif
Nous reprenons du vin
Pour oublier sa voix.

L’Espagne nous ouvre ses guitares
Et nous fermons la porte.
Les Haïtiens débarquent,
Nous les voulons de neige.
Nous armons nos fusils
Au retour des oies blanches.
Nous rejetons l’espoir
Dans la poussière du cœur.
Il n’y a plus de terre promise
Mais des corps à louer.
Les pleins d’essence
Mettent la terre en panne.
Nous vivons à portée de fusil,
De désespoir, de bombes,
De solutions finales.
On ne protège pas le cœur
Dans les abris fiscaux.

Rasés, tatoués, percés,
Même les révoltés
Se laissent tondre.
Au suivant disait Brel.
Nous sommes fichés, numérotés,
Prêts pour les mines
Et les champs de mines.
Tout le contraire du chant.
On troque le sacré
Pour les machines à sous,
Les voitures à dix places
Et les danses à dix piasses.

Quelques pouces d’écran
Nous séparent du vent
Et du fumier de la vie.
Nous parlons derrière des barreaux
Par peur des contagions.
Nous partageons le même pimp,
La même langue sonnante,
La langue des affaires,
La langue du mensonge
Et du papier-monnaie,
Celle qui calcule, qui soupèse,
Celle qui fait main basse
Pour faire monter les prix,
Celle qui sniffe l’espérance
Avec la poudre aux yeux.

Pourtant la neige tombe
Sans souci des banquiers
Ou des huards qui flottent.
Toutes les lignes se croisent
Dans la main du métro.
Une goutte d’encre dans l’eau
Dessine mon pays
Et le chant des oiseaux
Me donne sa parole.

Les buses avec leur tête d’oiseau
Pensent plus loin que nous.
Il faut remplacer le stress
Par la tristesse de Ferré,
La prose par la poésie,
Cette vieille échevelée,
La frime à 400 pages
Par des rimes toutes simples,
Sortir du dictionnaire
Et faire tomber la veste.
J’écris du fond des bois
Comme dans une cathédrale.
Aux banquiers qui festoient
Je préfère les rats
Qui grignotent le temps.

Les fleuves, les oiseaux,
Les femmes traquées,
Les hommes détraqués
Ne veulent pas mourir.
Il faut ouvrir les stores
Qui cachent la lumière,
Rallumer les idées,
Les rires insaisissables,
Les sables insondables,
L’arôme du matin,
S’éloigner de la mort
En bateau de fortune,
Réveiller les ruisseaux
Et croire aux miracles.

Je ne suis pas né en chien de fusil
Du trafic des armes
Ni d’une espèce sonnante.
Je ne suis pas né non plus
Des graines d’ordinateur
Ni d’un orgasme médiatique.
Je suis né d’une femme,
Du cœur d’un violoncelle,
D’une rue, d’une ville.
Je suis né de l’argile,
Du silex et du feu,
De la neige et de l’herbe,
Ce rien d’éternité
Qui détraque les rails.

17 février 2005
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H. à JML
Envoyé vendredi 18 février 2005 - 09h29:   

tous nés comme toi nous devrions psalmodier ton poème ensemble jusqu'à faire craquer l'attaché-case

bravo Jean Marc

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