Souvenirs, souvenirs... Log Out | Thèmes | Recherche
Modérateurs | Fiche Personnelle

66 zone franche - Le forum de Francopolis » Textes » A R C H I V E S » Les textes du 01.04.2005 au 31.08.2005 » Souvenirs, souvenirs... « précédent Suivant »

Auteur Message
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Rob
Envoyé vendredi 05 août 2005 - 02h10:   


C'était survivre cet amour que je roulais dans l'air, c'était quand je chantais et ton rire à mon rire enroulé comme lierre abrité comme on peut dans la jeunesse et la culture, une maison de tolérance qui ne tolérait avec la raison juste qu'une idée de fraternité, faut pas laisser rentrer les cons.

Nous portions, comme on dit, des idées flamboyantes et de l'humour aussi, le notre, le seul qui vaille en ces temps de charangos.
Quand ils avaient des ponchos nous avions des guitares et des exotismes de merguez sur le gril, nous défendions les différences.
De ces barbaques calcinées aux provenances improbables, je ne me souviens, faut dire, que de la suée des moutardes étalées comme de la confiture, depuis le temps c'est figé comme la graisse et l'idée de la brûlure sur la langue.

Les tumbas du parisien, on s'en souvient encore, ils nous faisaient rêver comme des brésiliens, ceux qui savaient, parlaient de bourrée auvergnate pourtant nos deux accords sonnaient comme le sertao un matin de révolution avant le coup de grâce.

On rentre pas comme ça, on décline son Vasca ou alors son Léo mais c'est un peu facile.
Fanon, gueule bourrée, Francesca et ses couilles comme disait Jordy peu avare de compliments, nous entraînaient dans les messes à l'humain quand les hommes grignotent leurs "biscottes de vie" arrosées de vins râpeux comme disait le même, le célèbre Jordy toujours chatoyant de postillons d'amour.
Henri Gougaud au dessert, bouffe une crème caramel, je raconterai ça à mes enfants, ils en resteront sur le cul.
L'Austin mauve des retours pisse de l'huile sur tous les pare-brises et mes jambes sont trop longues sous cette immense boite à gants, déjà le ménisque qui grogne.

Allez, jouer l'artiste, égratigner le temps qui nous baise au final, j'allais comme un seul homme, porter l'esprit du gratte poils jusque chez les communistes, mes frères, ou mes cousins plutôt, enfin c'est comme on veut.

On choisit sa musique selon les vents, les pluies, les ripailles accueillantes.

Il nous l'a fait le coup, le Jordy, il a chanté tout déployé sur les planches à paillettes du théâtre de Nice au milieu des Fanon, des Caillat, au milieu de tous ceux qui chez nous scintillaient, j'en garde je le jure, une panique vivace, une tension qui monte et le teint pale des terreurs comme cette guitare qui n'est jamais vraiment très juste.

L'écriture est un foutoir, un moment de retour et puis on passe à autre chose, les coronaires du Vasca, Bertin beau sur sa chaise, Léo coulé, Marseille sous la pluie, l'horreur qui vrille dans ma peau, cinq ans déjà, maman qui meurt, vingt ans déjà, les os, la peau ridée de rires et nous toujours debout et toujours aussi cons, et jamais silencieux dans l'autant que possible.






Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

pour Rob
Envoyé vendredi 05 août 2005 - 02h49:   

Que de souvenirs, Rob ! Un poème de vie riche que tu confies à la nuit, à ses oreilles dispersées aux quatre vents du rêve ou des insomnies ... j'aurais aimé vous connaître à cette époque, mais il reste vous , "toujours debout et toujours aussi cons, et jamais silencieux dans l'autant que possible."
Parle encore de vous, veux-tu ? ... ( Lilas )

Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

aglaé
Envoyé vendredi 05 août 2005 - 09h39:   

"""Allez, jouer l'artiste, égratigner le temps qui nous baise au final, j'allais comme un seul homme, porter l'esprit du gratte poils jusque chez les communistes, mes frères, ou mes cousins plutôt, enfin c'est comme on veut."""

Epatant tout le texte....Aglaé
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

jml
Envoyé vendredi 05 août 2005 - 16h08:   

superbe. ça sent la vie, la mer, la musique, la tendresse et l'autant que possible.
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Kel
Envoyé vendredi 05 août 2005 - 16h25:   

Ah oui c'est beau, c'est doux, ça ravive plein de chose même quand on a pas connu.
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Jordy
Envoyé vendredi 05 août 2005 - 17h03:   

Extraordinairement émouvant pour moi.
ce coup- ci, le frangin, il met pas de masques,il ne chantourne aucune fioriture. Il m'en a fait défiler des choses, dans la tronche, ce texte!
Nostalgie. Une boule dans la gorge.
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

isa
Envoyé vendredi 05 août 2005 - 19h01:   

C'est sûrement un cadeau personnel, mais je trouve ce texte plutôt moins bon que pas mal d'autres que j'ai beaucoup aimés. Mais il n'était pas pour tout le monde, aussi.
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Kel
Envoyé vendredi 05 août 2005 - 19h15:   

Oui, les souvenirs sont personnels, mais l'écriture ne l'est pas, on s'y sent invité comme si on faisait partie de ces gens (je parle de mon ressenti du texte)
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Jordy
Envoyé samedi 06 août 2005 - 00h49:   

merci pour Rob, Kel!
je pense évidemment comme toi!

Isa, c'est vrai qu'il est plus précis et plus clairement événementiel que d'habitude, mais comme dit joliment Kel, "tout le monde est invité"!
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Kel
Envoyé samedi 06 août 2005 - 02h21:   

..et tout le monde est invité à écouter rob chanter, et jordy, et tout ce beau monde pacifié. je vous lis et, ce faisant, je n'y vois aucun mal, rien qu'une source d'enrichissement au delà des différences.
amitié
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Rob
Envoyé samedi 06 août 2005 - 05h23:   

je rentre d'une soirée un peu arrosée, parler de poésie, de cuba, de Ferré bien sur, de stratégie de politique municipale, d'amour et de mort, de la copine qui va mourir, du rien qui reste et du peu qui s'en va et de ces 24 h de punition avec une merde d'adsl, un truc sournois moitié connecté, moitié coupé, une horreur.
mais là à 5 h du mat, miracle, ça marche.

Je sais que ce truc est un peu ciblé, mais bon, c'est le problème ( peu important quand même) Avec tout ce temps qui passe tout le temps, j'ai l'impression de devenir de plus en plus une vieille bête à peine fréquentable, c'est affreux, on ne finit jamais de ressasser ses vieilles guerres.
Le prochain golpe, je vais raconter mon service militaire au fond des neiges sales, ça va chier pour vos matricules. pour plus tard, dans le désordre de ma tronche, j'envisage la cours de récréation, mon premier "émoi" , ma première bagnole (une 4l perforée) et peut-être le pick up à aiguilles en bambou du grand-père. C'est con de vieillir, on radote, et on expose ses radotages, bordel de merde, allez, au lit, vieille carne ! Faut s'économiser.
Et puis y a pas de différences, Kel, juste des sons, une histoire de fréquence, un choix de petite importance.
Amitiés en vrac.

Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

isa
Envoyé samedi 06 août 2005 - 10h29:   

C'est pas question de matériaux, les souvenirs en sont d'excellents. C'est question de forme, et de ne pas la mépriser en cèdant à la coquetterie de prendre sa propre maîtrise technique pour de la frime, mon faux vieux. Qui fait le vieux fait la bête, c'est pas comme ça qu'on dit ?

Enfin, c'que j'en dis, c'est amical et parce que je t'ai lu.
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Rob
Envoyé samedi 06 août 2005 - 23h29:   



En effet, c'est tout à fait amical et en plus ce n'est pas faux.Les mots sont souvent le résultat d'une organisation interne. par contre le faux vieux, hélas, il fait le vrai comme il peut. tout s'arrange pour faire joli, parfois ça marche, parfois ça foire. on va selon l'humeur dormir sur un lit aux draps froissés, histoire de retrouver la pliure comme on l'avait laissé au matin. On se rassure comme on peut, avec des frises de temps en temps.



Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Kel
Envoyé samedi 06 août 2005 - 23h44:   

Moi, je ne suis pas vraiment d'accord. C'est justement car j'y lis une invitation, et l'espace offert - à moi lecteur - pour y lire les souvenirs, et c'est peut-être justement à cause de cette à priori "non assurance" que je plonge dans le texte.
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

feuilledo
Envoyé samedi 06 août 2005 - 23h45:   

Putain ! j'étais là moi aussi

dans la griffure
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Rob
Envoyé samedi 06 août 2005 - 23h47:   

Je vais pas ouvrir un fred pour si peu, le service militaire à Tubingen la blanche, enlevé c'est pesé, avec le un et puis le deux, homme de base tête de noeud.

Je découvris des mers à boire
Des chansons pour me faire voir
Des éboulis à débouler
Et la guitare à raccrocher
Je découvris des vies perdues
Les neiges longues étendues
Les nuits de leurs rires de foires
Ma solitude provisoire

Je découvris semelle à battre
Dans des guérites de théâtres
Le froid aiguillé sur les doigts
A l'aventure du sous-bois
Je découvris que j'étais lourd
Au cul du monde avec ces sourds
Au fond de mon journal indigne
De mes versants plantés de vignes

Je découvris les avalanches
Des Gallimards en robes blanches
Les mots pour trembler des histoires
A faire monter la mémoire
Je découvris que j'étais fier
Dans mon silence en mâchefer
Fatras de feuilles en corvées
Le vent jouait à s'aggraver

Je découvris l'effacement
L'attente au bout des sapins blancs
Le feu qui couve sous la neige
Les mots les piéges qui protégent
Je découvris cette distance
Entre la mer et moi qui lance
Un monde saoul qui tangue au soir
Vers cette plage aux vagues noires

Je découvris des mers à boire
Des chansons pour me faire voir
Des éboulis à débouler
Et la guitare à décrocher


-----------------------

La parenthèse

Avec la pluie à la va-vite
La note triste de l'histoire
Une mémoire illicite
A l'aube grise du dortoir

Avec ma vie en bas de carte
Sur le point sud de ma frontière
Comme une enfance qu'on écarte
Mousse noyé du fond des bières

Avec un temps battu en neige
Une violence inavouée
Dans le silence qu'on protège
La vitre aux larmes dénouées

Avec mon cahier d'écolier
Dans la guérite de mes draps
Des forêts noires déployées
Au ras des nuits en contrepoids

Avec la garde au champs de blanc
La route mouvante des phares
Un casque vieux comme le temps
Et les cent pas de ma mémoire

Avec des godasses miroirs
Pour déraper sur mes verglas
En défilant de l'aube au soir
Mes vieux combats en branle-bas

Avec la lettre en pointillé
Sur la cour grasse des appels
Un cheval noir à épingler
Au coté cœur de mon scalpel

Avec un poème au carré
Et le désir que tout se taise
Au bout des soleils désertés
Vint la première parenthèse

-------------------------------


Tubingen (12/70)



Il neigeait fort sur Tubingen
Elle avait les yeux plein d'hiver
Elle vivait à Tubingen
Et le Neckar coulait gris-vert


Et le Neckar indiffèrent
Charriait du givre à fleur de chair
Elle regardait passer l'hiver
Et Tubingen pleurait tout blanc


Et Tubingen pleurait tout blanc
Sur le Neckar plissé de vent
J'aurai voulu dans le silence
Lui offrir le cygne en sa danse


L'envol du cygne comme un ange
L'a fait pleurer douceur étrange
Comme parfois pleure un enfant
Et Tubingen pleurait tout blanc

Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Kel
Envoyé samedi 06 août 2005 - 23h55:   

C'est superbe. le dernier est un petit bijoux.
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Rob
Envoyé dimanche 07 août 2005 - 00h01:   

Merci Kel, j'avais pondu ça sur place en 70, et Jordy l'avait foutu en musique et enregistré sur un disque souple pendant ma galère. J'ai retrouve le truc sur un vieux carnet à spirales, putain ça va vite on ne garde que les larmes, et le bonheur aussi.
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Kel
Envoyé dimanche 07 août 2005 - 00h08:   

70 ? hé bé. Ca fait un baille que t'écris alors.
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Rob
Envoyé dimanche 07 août 2005 - 00h11:   

En général ( et oui) à cet instant devrait se déclarer un objecteur de conscience qui se demmerde toujours pour être du coté de la lumière, quand toi tu sais que tu es toujours du coté de baisé. Souvent l'objecteur, en fait, a été réformé pour petite taille mais c'est moins glorieux quoique...
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Rob
Envoyé dimanche 07 août 2005 - 00h20:   

J'en ai griffouillé des tonnes, des paperasses innommables bouffées par les poissons d'argent (ces petits insectes étranges qu'on peut retrouver collés comme dans un herbier) ça fait des trous partout, ça grignote les mots, ça donne l'avant goût. :o))

Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Jordy
Envoyé dimanche 07 août 2005 - 00h25:   

Putain, je me souviens!
Il y avait des cabines, près de la place Masséna, on mettait dix balles dans la fente et vite vite, on pouvait chanter et graver un disque souple, en effet! j'avais trimballé la guitare jusqu'à la cabine en solex.
Il est devenu quoi, ce disque au fait?
(je me souviens très bien de la mélodie!)

le texte d'avant aussi, je l'avais mis en chanson, et je te l'avais même chanté à la maison
(mais je ne m'en souviens plus, là, de la mélodie, ça devait pas casser des briques!)
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Rob
Envoyé dimanche 07 août 2005 - 00h31:   

On en trimbale des vieilles barques nous deux, on pourrait faire armateur, une flotille de petits pointus à rustines, le chiant c'est qu'il faut toujours écoper quand ça arrive à l'encolure...
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Rob
Envoyé dimanche 07 août 2005 - 00h36:   

Le disque souple il doit être dans une cave, coincé entre un 78 tours de grand-père et un bouquin de cul, une destination normale. les disques souples finissent toujours ainsi, c'est bien connu.
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Hélène
Envoyé dimanche 07 août 2005 - 08h34:   

pas encore eu le temps mais je vais venir lire tout ça .
d'autant que j'ai au moins vu la maison à Nice . c'était celle de Rob?
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

isa
Envoyé dimanche 07 août 2005 - 08h51:   

Très belle parenthèse en noir et blanc et gris. A ne pas oublier à la cave.
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Jordy
Envoyé dimanche 07 août 2005 - 12h12:   

Et en fait, Robertou, ça me revient...C'était pas un disque souple, c'était un disque RIGIDE!
et il doit être chez moi (mais où? mystère, sans doute à la cave, dans un coin d'ostréiculture)
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Joelle
Envoyé lundi 08 août 2005 - 12h43:   

il est troublant ce Rob, il touche au coeur, j'aime.
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

Pour Rob
Envoyé vendredi 12 août 2005 - 02h24:   

Merci pour cette richesse de souvenirs et de leurs mots. Je les aime tous. (Lilas)
Top of pagePrevious messageNext messageBottom of page Link to this message

suite
Envoyé vendredi 12 août 2005 - 02h26:   

Ce qui est bon aussi c'est la chaleureuse commlicité de deux frères ... ce n'est pas si fréquent ! ( Lilas)

Le postage de nouveaux messages est actuellement désactivé dans cette catégorie. Contactez votre modérateur pour plus d'informations.

Thèmes | Depuis hier | La semaine dernière | Vue d'ensemble | Recherche | Aide - Guide | Crédits programme Administration