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jml
| Envoyé jeudi 18 août 2005 - 07h15: | |
au Québec on n'oublie jamais tout à fait l'hiver. des mots glacés en plein été pour ceux qui ont trop chauds. DÉJÀ L'été ne brille qu'un instant au cou des verges d'or. L'hiver s'insinue par les fêlures de l'air et les dernières fleurs sont pressées d'en finir. Déjà, on calfeutre son âme dans le sous-sol des os. Trop vert pour brûler, le feu de bois ronchonne. Il neige dans la boule où la danseuse tourne en rond. Il va falloir marcher le coeur dans les mitaines et les mots dans les poches, emballer le soleil dans un morceau de nuage. Il va falloir ranger la nappe de dentelle, la robe des fougères qu'irise la rosée. Quand il neige, les heures ne savent plus écrire. Elles disent l'invisible. On doit franchir le pont entre l'obscur et le solaire. La poussière s'ennuie du bourdonnement des mouches, de l'éclat du pollen, de la chaleur des mains. Le givre sur la vitre est comme un mot qui ne vient pas, une couleur absente. Je dois attendre plus longtemps le passage des phrases, le temps de mettre une bûche ou de pelleter l'entrée. Le facteur ressemble à un bonhomme de neige, l'épouvantail aussi. Les gnomes depuis longtemps ont déserté la cour. Ils hibernent comme les ours en emportant parfois le miel de mes mots. On ne parle plus avec les mains sans mettre de mitaines. L'hiver, tout le monde bégaie. On peut lire les mots dans la buée des lèvres. On se réchauffe avec la faim au ventre et des regards de braise. Des pierres poussent dans le jardin. Des mésanges font la guerre aux geais bleus. Sur la page où l'on marche, il n'y a plus de routes balisées d'encre noire, rien que des blancs de mémoire, des bancs de neige où s'asseoir. On aperçoit parfois quelques elfes en manteau, quelques matous perdus en quête d'une chatte, un moineau déplumé. Pas de quoi faire un conte ou un poème d'amour. Peu à peu nous devenons des autruches nordiques, la tête dans la neige en caleçons de laine. 18 août 2005 |
   
Christiane
| Envoyé jeudi 18 août 2005 - 14h10: | |
"L'été ne brille qu'un instant au cou des verges d'or" Ai aimé beaucoup. Comme tout le reste de ce texte nourri de beau. On a pas peur de l'hiver ici. Mais avant,on va vivre le rouge d'octobre. C'est drôle hier, dans l'autobus, j'ai aussi écrit quelques lignes, pas encore arrangées en poème, sur l'hiver. Merci jml |
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