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66 zone franche - Le forum de Francopolis » Textes » A R C H I V E S » Les textes du 01.09.2005 au 28.02.2006 » Pour te rejoindre « précédent Suivant »

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jml
Envoyé samedi 10 décembre 2005 - 06h11:   

POUR TE REJOINDRE


J’ai repoussé les murs pour te rejoindre mon amour, les barrières de ronces, les frontières de la peur, les confins du silence. J’ai lavé l’espérance de toutes les scories. De ma nuit à ta nuit, il y a tout l’infini. Il y a longtemps que je marche vers toi. Mon cœur est un appel attendant ton écoute, ton feu sur la blessure du givre. Mon ombre sans soleil absorbe ta lumière pour refléter la vie. Tout un monde s’ébruite aux branches des caresses, aux blanches pluies du jour. Marcheur immatériel, je prend la forme de nos pas. Je viens vers toi soulevé par le pain. Sur le jardin du jour, les grilles sont ouvertes. J’y respire tes fleurs.

Mes mains ont gardé la mémoire de tes hanches, la moindre de tes courbes, la forme de tes seins. Mes lèvres ont dessiné la ligne de ta bouche sur le grain des baisers. Le fleuve a écarté ses rives sous le battement des vagues. Mon corps prend sa source où tu rejoins la mer. Malgré les nuits d’hiver, on brûle sans s’éteindre. Je me tais pour ce soir. La beauté laconique de l’île a besoin de silence. Je chanterai demain l’infini qu’elle couve.

Il suffit d’une île sur un fleuve pour entrevoir la mer. Nous sommes seuls avec le pain. Tout le reste est en nous. Nous écrivons d’un doigt léger sur le sable, sans commencement ni fin. La spirale des pas fait sa prière aux vagues. Les feuilles comme des nuages verts éclosent des bourgeons. Les bras des arbres interrogent le vent. Nous inventons l’amour. L’amour nous invente. Nos voix se tiennent par la main comme des grains de sable. C’est pieds nus qu’on parle du bonheur, avec des mots qui brillent comme des pierres au soleil. Il n’y a plus de temps mais le retour des saisons.

Le monde va trop vite. Nous y allons sans hâte. Nos pas sont verticaux et servent à monter. Même à des kilomètres, je t’aime dans le proche. Je te parle sans bruit. Il suffit d’embrasser pour savourer chaque mot. Nous vivons dans la même lumière, d’un ultime brin d’herbe, dans la présence exacte. Nous aimons. Nous aimons pas à pas. Les montagnes volent sous ta plume. Les pierres jacassent. La mer se fait douce sous ta barque fendue où j’écope le temps. Deux chats sur un tandem ronronnent en pédalant. Nous nous aimons. Allongés dans l’herbe, écrire est une affaire de gestes. Aucune main n’est pareille. Chaque paume possède ses lignes, son destin, ses caresses. Aucune main n’est plus belle que la tienne, sinon ton autre main.

Quand nous marchons ensemble, les feuilles se changent en louanges sur les branches des arbres. Ton rire met du baume dans le divorce des oiseaux. Il ne suffit pas d’être ensemble pour être ensemble. Il faut s’aimer. Nos chemins séparés portent les mêmes pas. On ne met pas en laisse les animaux en boule ni les mots qui chatouillent. Chaque matin, au sortir du cocon, nous partageons l’ivresse et la lumière. J’écris avec ta voix en surplomb de la page, avec ta présence tatouée dans mes yeux. J’ai gardé longtemps la tête vide pour t’y faire une place. J’avance en pointillé comme la pluie sur un jardin, j’avance en vrac comme la mer, pour te rejoindre mon amour.

9 décembre 2005
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Cécile
Envoyé samedi 10 décembre 2005 - 09h58:   

Un beau texte... dans le souvenir de l'être aimé. Ca me fait penser un peu, dans un autre style, aux écrits d'Hélène Cadou suite à la perte de René Guy en 1951.

Cécile

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