Ode à la table (Neruda) Log Out | Thèmes | Recherche
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aar
Envoyé jeudi 18 septembre 2003 - 21h18:   

Ah cette chère table. Ici Neruda nous fait une sorte de dissertation poétique autour de la table.

***
Ode à la table.


Sur les quatre pattes de la table
j’éparpille mes poèmes
étale le pain, le vin, le rôti
(navire noir des rêves)
j’y pose ciseaux, tasses, clous
oeuillets, marteaux.

table fidèle
porte-rêve et porte-vie
géant quadrupède.

C’est la table du riche
imposante et caracolante
telle un paquebot fabuleux
chargé d’abondance.
C’est la table du gourmet
belle et bien mise
avec son décor de langoustes gothiques

C’est la table solitaire
dans la salle à manger chez notre tante
en été
quand s’ouvrent les rideaux
et pénètre un rayon de l’été
fin comme une épée
pour saluer sur la table sombre
la paix tranparente des cerises.

C’est aussi la table lointaine, la table pauvre
où l’on prépare la couronne
pour un travailleur mort,
et de cette table monte l’odeur froide
de la dernière souffrance.

Tout près, il y a la petite table
dans cette alcôve sombre
où brûle l’amour et ses incendies
et sur la table
un gant de femme encore tremblant
comme l’écorce du feu.

Le monde est une table
entourée de miel et de fumée
couverte de pommes et de sang.
La table est dressée
elle attend les banquets ou la mort
et nous savons quand
elle nous appellera:
invités à la guerre ou au repas
il nous faut choisir
il faut savoir comment s’habiller
pour s’asseoir à la grande table
si nous mettrons les pantalons de la haine
ou la chemise d’amour fraîchement lavée.
Mais il faut faire vite
on nous appelle déjà:
les enfants, à table !

***

P Neruda , Navigaciones y regresos 1959
(traduc perso)
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jean guy
Envoyé vendredi 19 septembre 2003 - 15h54:   

Merci Aaron,

Je ne sais pourquoi, mais voilà longtemps que j’avais déserté Neruda. Pourquoi, je ne sais vraiment pas, alors que je l’avais assidûment fréquenté avec un grand bonheur pendant de longues années.

Alors merci de nous (de me) le re-donner, de nous (de me) ré-offrir cette poésie au goût de pain, au goût de terre, de pierre, de ciel, au goût de vie. Poésie de jour et de nuit, de draps séchant sur des fils tendus entre deux arbres. Une poésie d’être humain. Une poésie de conscience aussi qui nous ramène au monde.

Quand on lit sa poésie, comme tu le dis si bien, « On dirait qu'il nous parle, qu'on est avec lui, à côté ».
Encore merci.

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