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Gaston
Envoyé dimanche 13 juin 2004 - 17h45:   

IDYLLE DES JEUNESSES BIEN SAGES


L'chef-lieu d'canton a trois mille am's, et guère avec.
On peut pas y péter sans qu'tout l'monde en tressaute ;
La moitié du pays moucharde aux chauss's de l'aut'e,
Et les vilains coups d'yeux pond'nt les mauvais coups d'becs.

Pourtant, sur les vieux murs noirs comm' l'esprit du bourg,
La bell' saison fait balancer des giroflées ;
Pourtant, dans l'bourg de sournois'rie et d'mauvais'té,
Y a -des gâs et des fill's qui sont dans l'âg' d'amour !

V'là coumme ils s'aim'nt : les galants r'vienn'nt, après l'ouvrage,
Par les rues oùsqu'leus bell's cous'nt su'l'devant d'la f'nét'e :
Un pauvr' sourir' qu'a peur, un grand bonjour bébéte,
Deux gross's pivoin's de hont' qu'éclat'nt sur les visages,

Et c'est tout. Ils font point marcher l'divertissoir,
Rouet qu'on tourne à deux pour filer du bonheur
Et qui reste entre eux comme un rouet sur l'armoir
Parsque... Eh ! bien, et l'mond', quoi qu'il dirait, Seigneur !

Vous l'avez jamais vu, l'mond', dépecer un coup'e
Qu'les écouteux ont pris en méfait un beau jour ?
Et sur la place, au sortir d'mess', par petits groupes,
Vous l'avez jamais vu, l'mond', baver sur l'amour ?

Alors, les fill's renfonc'nt les envi's qui les rongent,
Souffrant tout bas l' désir qui piqu' dans leur peau blanche
Comm' leur-z-aiguill' d'acier dans la blancheur du linge,
Et les gâs fil'nt, sans bruit, par le train du dimanche ;

Car la Ville est pas loin ousqu'y a la garnison,
L'Martroué, la Préfectur', l'Evêché, l'Tribunal,
La Ville, enfin, la Ville oùsqu'on trouv' des maisons...
- Vous savez, des maisons derriér' la cathédrale?

Donc, les gâs but'nt au nid des tendress's à bon compte ;
Un' gross' chouette est juchée au bas du numéro :
"Mes p'tits agneaux, on pai' tout d'suite ; après on monte ! "
Les gru's accour'nt. "Fait's-nous d'abord nos p'tits cadeaux ! ; "

Et les gâs pai'nt bien chère, étant allés bien loin,
C' que les fill's de chez eux voudraient donner pour rien !
Puis les gothons s'déb'hill'nt, et, quand leur ch'mise est chute,
D'vant leur corps usagé par le frott'ment des ruts,

D'vant leurs tétons, molass's comm' des blancs fromag's mous
Les gâs song'nt ; et ils doiv'nt se dir' dans leur song'rie :
" Y a des beaux fruits qui s' perd'nt - dans les enclos d'chez nous,
Et faut que j'm'dégueulass' avec des pomm's pourries ! "

Enfin, les pauv's femel's rentr'nt dans les bras des mâles
Comme entr'nt les limons quelqu' pauv' jument fourbue,
Et puis les v'là qu'as pouss'nt, qu'as tir'nt et qu'as s'emballent
Pour charroyer les aut's vers la joie qu'el'n'trouv'nt plus !

Mais Ell's ! quand on y pens', comme a's ruer d'bien aise,
Les Mari'-Clair' du bourg, les Toinons, les Thérèses,
Si el's s'trouvaient tertout's ett'là pour le quart d'heure,
A la plac' des gothons d'la Vill', leurs tristes soeurs,

Victim's comme ell's du Mond' qui t'naille et crucifie
Les vierg's et les putains au nom d'la mêm' Morale !
Mais quoi ! "Leur-z-affair' fait' ", le soir, les gâs r'dévalent
Vers le pays oùsqu' les attend'nt leur bonn's amies.

Ils r'déval'ront souvent ! El's attendront longtemps !
D'aucuns r'viendront avec du poison dans les veines,
D'aucun's dépériront, comm' les giroflé's viennent
A mourir sur les murs de la séch'ress' du temps.

Puis, tout d'un coup, avant d'leur'céder l'fonds d'boutique,
Les vieux disant : " Ma fill', te faudrait un bon gâs ! -
- Mon gâs, t'faudrait un' femm' pour servir la pratique ! "
Ils s'uniront avec tout l'légal tralala...

L'blé s'ra d'puis longtemps mûr quand ils noueront leur gerbe.
Après beaucoup d'éguermillage ils f'ront l'amour,
Ayant r'mis au lend'main "c'qu'ils pouvaient fair le jour","
A caus' du mond' qui ment jusque dans ses proverbes.

Et ils d'viendront eux mêm's ce Monde au coeur infect
Qui fait des enfants pour pouvoir les fair' souffri
Quand arriv' la saison des giroflé's fleuries
Dans l'méchant bourg de trois mille âm's, et guère avec.


(Chanson de Montmartre)
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Gaston
Envoyé dimanche 13 juin 2004 - 17h50:   

LA CHANSON DES FUSILS
(parue dans Le Piou-Piou de l'Yonne, 1910)


Nous étions fiers d'avoir vingt ans
Pour offrir aux glèbes augustes
La foi de nos coeurs éclatants
Et l'ardeur de nos bras robustes ;
Mais voilà qu'on nous fait quitter
Notre clair sillon de bonté
Pour nous mettre en ces enclos ternes
Que l'on appelle des "casernes" :

En nos mains de semeurs de blé
Dont on voyait hier voler
Les gestes d'amour sur la plaine,
En nos mains de semeurs de blé
On a mis des outils de haine...
O fusils qu'on nous mit en mains,
Fusils, qui tuerez-vous demain ?

Notre front qui ne s'est baissé
Encor que par devant l'terre
Bouge, en sentant, sur lui peser
La discipline militaire ;
Mais s'il bouge trop, notre front !
Combien d'entre nous tomberont
Par un matin de fusillade
Sous les balles des camarades ?

Nos yeux regardent sans courroux
Les gâs dont les tendresses neuves
S'essèment en gais rendez-vous
Là-bas, sur l'autre bord du fleuve ;
Mais un jour de soleil sanglant
Ah ! combien de pauvres galants
Ayant un coeur pareil au nôtre
Coucherons-nous dans les épeautres ?...

Nous trinquons dans les vieux faubourgs
Avec nos frères des usines :
Mais si la grève éclate un jour
Il faudra qu'on les assassine !
Hélas ! combien les travailleurs
Auront-ils à compter des leurs
Sur les pavés rougis des villes
Après nos charges imbéciles ?...

Mais, en nos âmes de vingt ans,
Gronde une révolte unanime :
Nous ne voulons pas plus longtemps
Etre des tâcherons du crime !
Pourtant, s'il faut encore avant
De jeter nos armes au vent
Lâcher leur décharge terrible,

Nous avons fait choix de nos cibles :
En nos mains de semeurs de blé
Dont on voyait hier voler
Les gestes d'amour sur la plaine,
En nos mains de semeurs de blé
Puisqu'on vous tient, fusil de haine !...
Tuez ! s'il faut tuer demain,
CEUX qui vous ont mis en nos mains !...


(Chanson de la Guerre sociale)
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Ln
Envoyé lundi 14 juin 2004 - 15h08:   

le premier m'a beaucoup fait rire;
c'est drôle cet accent écrit .

qui est l'auteur? 1910 ça ne peut pas être toi.



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