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  jml
  | | Envoyé lundi 22 novembre 2004 - 21h44:    |  |  
  DEREK WALCOTT  (Sainte-Lucie)      Sabbaths, W. I.    Those villages stricken with the melancholia of Sunday,  In all of whose ocher streets one dog is sleeping.      Those volcanoes like ashen roses, or the incurable sore  Of poverty, around whose puckered mouth thin boys are  Selling yellow sulphur stone    The burnt banana leaves that used to dance  The river whose bed is made of broken bottles  The cocoa grove where a bird whose cry sounds green and  Orange flame has forgotten its flute    Gommiers peeling from sunburn still wrestling to escape the sea    The dead lizard turning blue as stone    Those rivers, threads of spittle, that forgot the old music    That dry, brief esplanade under the drier sea alomonds  Where the dry old men sat    Watching a white schooner stuck in the branches  And playing draughts with the moving frigate birds    Those hillsides like broken pots  Those ferns that stamped their skeletons on the skin    And those roads that begin reciting their names at vespers    Mention them and they will stop  Those crabs that were willing to let an epoch pass  Those herons like spinsters that doubted their reflections  Inquiring, inquiring    Those nettles that waited  Those Sundays, those Sundays    Those Sundays when lights at the road’s end were an occasion    Those Sundays when my mother lay on her back  Those Sundays when the sisters gathered like white moths  Round their street lantern    And cities passed us by on the horizon        Jour du Seigneur, Antilles    Ces villages frappés de mélancolie dominicale,  Dans chaque rue ocre il y a un chien qui somnole    Ces volcans comme roses de cendre ou l’incurable ulcère  De la pauvreté, autour de leur bouche plissée  De maigres garçons vendent du soufre    Les feuilles brûlées des bananiers qui ne dansent plus  La rivière et son lit de tessons de bouteilles  Le bois des cacaoyers où un oiseau dont le cri sonne vert  Et jaune et dans les lueurs sous le feuillage crêté de  Flamme orange a oublié sa flûte    Les gommiers pelés par le soleil luttant toujours pour échapper à la mer    Le lézard mort virant au violacé de la pierre    Ces rivières, filets de salive, qui ont oublié l’ancienne musique    Cette sèche, brève terrasse sous les amandiers plus secs  Où les vieillards secs se tenaient    Contemplant un schooner blanc coincé dans les branches  Et jouant aux dames avec les frégates en vol    Ces flancs de morne pareils à des pots brisés  Ces fougères qui imprimaient sur la peau leur squelette    Et ces routes qui se mettent à réciter leurs noms à vêpres    Prononcez-les et elles s’arrêteront  Ces crabes disposés à laisser passe une époque  Ces hérons comme des vieilles filles doutant de leurs reflets  Fouillant, fouillant    Ces orties patientes  Ces dimanches, ces dimanches    Ces dimanches où les lumières au bout de la route étaient un événement  Ces dimanches où ma mère gisait sur le dos  Où les sœurs s’agglutinaient comme de blancs papillons  Autour de leur lanterne      Et les villes passaient loin de nous à l’horizon    Traduit par Claire Malroux  Le Royaume du fruit-étoile  Circé  ISBN 2-908024-37-3   
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  jml
  | | Envoyé lundi 22 novembre 2004 - 21h46:    |  |  
  Derek Walcott est né en 1930 à Sainte-Lucie, une île des Petits Antilles. Il fait des études à l’université des Antilles de la Jamaique, se fait connaître très jeune par la publication de 25 poèmes (1948). En 1953 il s’installe à Trinidad où il fonde l’Atelier de théâtre qu’il dirige jusqu’à la fin des années 1980. Parallèlement à son oeuvre de dramaturge, il poursuit son œuvre de poète : In a green Night (1962), The Castaway and Other Poemes (1965), The Gulf (1970), Another Life (1973), Sea Grapes (1976). Il enseigne ensuite aux États-Unis. 1979 : The Star Apple Kingdom; 1982 : The Fortunate Traveller; 1984 : Midsummer. Ses poèmes sont réunis en 1986 sous le titre Collected Poems. Deux recueils ultérieurs ont vu le jour de puis : The Arkansas Testament (1987) et Omeros (1990) Il est lauréat du prix Nobel 1992. En France il a publié uniquement deux recueils :  Le Royaume du Fruit-Étoile  Circé et  Heureux le Voyageur Circé   
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  jml
  | | Envoyé lundi 22 novembre 2004 - 21h50:    |  |  
  Comme des poux, comme des poux, les affamés de cette terre  affluent vers l'arbre de vie. Si ceux qui meurent de faim, telles ces mouches perdant leurs élytres lustrés dans la lumière,  sur des omoplates pointues dépliaient leurs frêles ailes  pour s'envoler vers cet arbre, comme il grouillerait -  ah, Justice ! Mais les incendies  les noient comme vermine, les lois  les refoulent, et ils restent  un aliment de compassion pour livre de voyage,  ses paragraphes pareils aux vitres d'un train,  car partout où la terre montre ses côtes  et la lune regarde avec les yeux ronds des enfants,  nous nous détournons pour lire. Rimbaud apprit cela...    Derek Walcott |  
      
  Cécile
  | | Envoyé lundi 22 novembre 2004 - 22h57:    |  |  
  LE ROYAUME DE LA SAPOTILLE ETOILEE    Il dormait sans rêver, noyé dans le sommeil  d’après l’amour, dans l’oubli minéral des nuits  dont la chair sent le cacao ; et leur dents blanches  sont du lait de coco ; et gingembre est leur souffle ;  leurs nattes ont le goût de la patate douce…    Qu’était la Caraïbe ? une verte mare moussue  avec des grenouilles blotties sur des feuilles de nénuphar  semblables à des îles, et qui s’accouplaient  aussi tristement que tortues pour engendre d’autres îlots…    Il suivait l’errance hasardeuse des tortues  qui abandonnaient l’Amérique pour le large de l’Atlantique,  il sentait sa propre chair qui s’alourdissait,  pareille à ces plages enceintes de leurs œufs couvés par la lune.  Et leurs désirs, c’était l’Afrique,  c’était les lemmings aimantés par leur mémoire magnétique  vers une mort bien plus ancienne, vers des plages beaucoup plus vastes…    Derek Walcott, poésie 1, Vagabondages, dossier Poètes du monde, éditions le cherche midi, page 69 
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