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El Kor
Envoyé mardi 02 mars 2004 - 14h26:   

coupe alpha

Aujourd'hui quelques opinions se sont arrêtées sur le bord de ma fenêtre à petits pas craintifs, on a discuté quelque peu parce qu'ils avaient mon âge sauf un. On a lamenté nos petites bulles sales avec de la neige qui représentaient des avenirs moulus, ca secouait drôlement et c'était plutôt rigolo. Ca m'a fait comme un souvenir sympa dans la gorge. Une moyenne, comme on dit.

C'est pas comme quand arthur a voulu tirer les couettes de la maîtresse y a eu comme un grand déchirement et puis rien elle avait meme pas de couettes alors tout est parti, dans tous les sens, on a vu les maisons sauter pour éviter les ambitions qui se déroulaient en rase-mottes, et franchement ça n'était pas joli joli de voir toutes ces fondations relevées, comme des jupes d'acier d'où s'échapperaient les secrets des familles alentour.

Le ciel était tout plein de grumeaux gris qui retombaient mollement en se dissolavant.
Ca nous a donné envie de découper.
On reniflait comme un ensemble de tranchées mises à nu, ça ne changeait (apparemment) rien au va-et-vient des automatochtones, qui rentraient vers leurs soupes. Vers leurs cerfs au dessus des portes. Vers leurs petits jouets de grandes occasions. Manquait plus que Saint Istvàn, pour tout découper vraiment. Mais il n'avait pas l'air d'être là. Ni dans le foyer d'hématome.

Et de mémoire de bile, on n'a jamais compris comment réiterer les geysers colorés - Il reste juste un point dans le ciel de tout à l'heure - alors qu'il me semble que c'est le même ciel. Ou alors c'est moi qui me trompe, oh mais, de quelques fissures d'atome. A peine.

Alors on a joué avec les cartes qu'il nous avait donné, mais c'était les mêmes depuis trop longtemps maintenant et ça nous ennuyait un peu. Le truc était toujours en l'air, on a vite arrêté de s'en préoccuper. Au début on a tout découpé mais après on savait plus quoi dire d'intéressant. Et puis Arthur et Clémentine ont arrêté de bouger depuis un bon moment maintenant alors je ne sais vraiment plus quoi découper.


Je crois que c'est la perruque de la maîtresse qui retombe, en fait.








coupe beta

Les liquides du caniveau se sont remués sans complexe, et puis les bouts des plans de montage de Clémarthurine se sont rassemblés un peu n'importe comment et il me semble à ce sujet que le chien de Philistin Landeau est parti avec une esquisse de roue dentée dans la gueule, dentée aussi mais en faïence, et c'est même pour ça qu'il en manquait sur le résultat final on s'est dit ça vaut la peine quand même

Et puis des types bizarres sont venus avec des étiquettes et j'ai vu la soeur de la maîtresse elle descendait d'un grand cutter en ex machina bridée, c'était comme un réchaud d'artifice pétaradant, au dessus des villes de toile et de lin.

Elle nous a dit de plus jouer avec les ciseaux alors on lui a donné les petits à bouts ronds, ceux qu'on trouve dans les pneus des maternelles. Ils nous avaient même pas servi, ceux-là, mais elle a eu l'air contente et elle a dit oui.

Enfin il y a une autre dame elle m'a demandé si c'était la conclusion vu que la phrase commençait par enfin alors on lui a dit qu'on savait pas trop parce qu'on avait toujours pas de nouvelles de la perruque.







coupe gamma

A force d'échanger les opinions j'ai fini par en avoir pas mal, même les rares, les plus dures à trouver. Il y en avait une avec les bouts cornés, et puis certaines que j'avais en double mais de moins en moins, du coup.

La soeur de la maîtresse est repassée, elle m'a dit qu'elle serait bien plus à l'aise comme ça, et moi je pense qu'elle aurait pas dû faire le défroissage vertical, ça lui allait mieux avant. Mais je n'ose pas lui donner des devoirs parce que c'est pas vraiment la maîtresse non plus. Et j'ai peur que si je la débranche elle tombe.

C'est quand même Noël et je n'ose pas trop penser. Je me demande si l'an mille va nous apporter plus de flammes. Ils en parlent beaucoup à la télévision. De bouts de snipers magyars trahissent ça et là. Ce n'est pas vraiment représentatif, mais comme je ne suis qu'un enfant je ne m'en rends pas vraiment compte.

Depuis, j'ai d'ailleurs fini par m'organiser un peu et mettre en place un système de rondes, la nuit, pour surveiller ce qui reste des chantiers du bourg. Je n'aime pas vraiment l'eau et j'espère bien qu'on aura pas à traverser le Danube. Le phare me regarde bizarrement.

Des hommes imaginent des barricades. Je crois qu'ils voudraient que je fasse pareil. Mais je suis le seul à avoir encore des ciseaux. Je me demande si après la guerre je pourrai découper la soeur de la maîtresse aussi.

En attendant, si des barbares traversent mon jardin, je leur dirai que j'attends la perruque, qui pendouille depuis des siècles, à présent, dépassée. Ou alors j'irai voir les vampires, de mes deux-tiers de rage, claudiquant, je les engagerai. Nous renflerons les côtés de mes frères en quête d'hérédité. Et une armée d'artistes huns marchera sur Belgrade endormie. Peut-être qu'on trouvera de quoi compromettre.







coupe delta

Ca n'a pas tellement changé depuis hier, que même le square est vide. On dirait qu'il fait un peu moins froid pourtant et après j'ai trouvé des balles sur un monsieur. Il avait l'air pas très bien, mais j'ai pas retrouvé les plans, du coup j'ai attendu qu'ils reviennent tous seuls mais ça n'a pas marché. J'en ai mis plein mes ciseaux pour que ça rutile. Ils étaient tous dégoulinants de munitions, c'était quelque chose d'épatant vous auriez dû voir.

Les gens ont commencé à mettre des digues partout dans les rues avec des bureaux et puis des madriers trop lourds c'était fatigant mais ça faisait joli quand même, sous le ciel qui se couvrait encore de poils. Je les ai aidés un peu sinon ils menaçaient de me dactylographier et j'aurais peut-être eu honte.

Depuis ce matin, je croyais qu'on était mardi et puis non. J'ai encore changé d'opinion du coup, parce que celle-là elle avait une tete qui me revenait pas. Ca m'a tordu la nuque en arrière et en levant le nez, J'ai vu passer les mêmes escadrilles postiches de quand j'étais drôle et morveux, juste les mêmes. Alors le ciel recommençait à ressembler à une espèce de toison goulue qui s'empiffrait d'atmosphère. Ca m'a rappelé des souvenirs et puis j'ai continué la patrouille parce que bon.

Finalement c'était ma montre qui était mal réglée sauf le chiffre de l'échéance et on a discuté longtemps pour savoir si on était mardi ou mercredi. Ce qui reste d'Arthur dit que c'est pas pareil. Pour moi ça fait pas vraiment de différence, et ça fait longtemps que l'école est de toute façon la ronde c'est toutes les nuits pareil sauf les maisons.

Oui ; c'est parce qu'elles bougent tout le temps, enfin elles rétrécissent plutôt, même celle de la maîtresse. C'est le chef qui m'a fait remarquer ça, des "troubles dynastiques" il a dit et il a plutôt bien fait, sinon je n'aurais peut-être pas remarqué qu'il était là. Je me suis senti moins important tout à coup, ça faisait du bien, comme quand on boit des petites gorgées baveuses pour ne pas trop avoir à se justifier. Enfin, c'était agréable jusqu'à ce que je prenne ce palet dans l'oeil et le vacarme avec et c'est pas très très drôle, vraiment. Mais je crois pas que ce soit l'officier parce que quand même des fois il raille vertement mais avec des cailloux c'est plus rare. Je me demande s'il a une formation d'institutrice, lui aussi.

Après, je lui en ai reparlé et il m'a dit bizarre qu'il avait pas remarqué. Mais je me suis trompé avant et c'était pas le même chef, il avait une tête de goinfre. J'aurais dû le voir tout de suite mais le bonhomme du début me faisait une farce et j'ai cru qu'il bougeait encore mais c'était la marée. Ca m'a détourné mon attention. Clémentine elle a dit c'est pas grave et d'ailleurs c'est des phénomènes de perspective elle a dit aussi. Moi je sais toujours pas trop, mais j'ai confiance alors ça va.

L'horizon se donnait des airs de plus en plus cycliques, et des structures bicéphales. Comme prévu, des centaines de gars se dissimulaient à la façon des macchabées, sous le bitume. Comme un petit air de fête suppliciée. De toute façon, le centre de la capitale était même pas dans la même année que le reste du pays alors ça servait à rien, mais ça maintenant, j'ai l'habitude.

J'ai même fini par les aider, un moment, mais à la fin ils étaient tous Secrétaire Général, juste pour tanner, comme ça (sauf le capitaine). J'ai arrêté et puis j'ai dit bon et j'ai regardé sous les rideaux.

Belgrade dort toujours, à l'heure qu'il est (mais pour la date je suis pas sûr)









coupe epsilon


Les toits hémisphériques se recouvraient lentement de lichen, tandis que le jour commençait son travail de ferrement de l'oeil. Quelques mouettes s'encastraient dans les petits emplacements que le ciel semblait avoir prévu à cet effet.

C'est marrant parce que Timót est mort à peu près le même jour que son camion -mais pas la même année, non plus, quand même- et je me demandais ce que ça lui a fait en mâchouillant tout ça contre un vieux chewing-gum que si on m'avait demandé j'aurais dit qu'il était pas à moi, parce que bon, nonchalant, j'arpentais la muraille, qui, elle, se cantonnait à son rôle de muraille, inerte, apathique.

En y réfléchissant encore plus, je me demande pourquoi on s'est souvenu de la date de la mort de son camion, alors qu'on se souvient rarement de mon anniversaire, par exemple. Sans doute que c'est justement quand Timót il est mort que ça a fait ça. C'est bien, ça, je trouve. Enfin, du point du vue du camion, bien sûr ; sauf qu'il est mort, aussi. Et là je montais la garde. Et ca a pas vraiment de rapport mais c'était quand même bien ennuyeux, des fois.

Quelques petits conflits éclataient ça et là dans les vapeurs du paysage, et en même temps ça faisait de l'attraction, surtout pour les mouches. Est-ce que je vous ai déjà parlé de Clémentine oui ? ah et d'Arthur aussi ? enfin il s'appelle Artúr mais on l'appelle Arthur pour l'embêter parce que sa mère est française / mais, je me contrefais, Maître - je suis désolé, mais c'est la lente conchylisation qui se répand d'un livre à l'autre, la vermine. Vous le constatez comme moi, le siège n'en n'a plus pour longtemps sans ses accoudoirs blêmes, renforcés. L'assaut final ! On finira par mettre tout ça dans des musées, fermer la lourde porte à triple tour, deux magies, puis s'en va. Mais l'Eglise des Composés de Synthèse envoie régulièrement ses prêtres pour nous réconforter.

On nous dit, dans les coins les plus penchés des ruelles, que l'ennemi ne viendra jamais, que c'est bon pour les autres histoires, celles qui se passent vraiment... je me demande ce que ça peut faire comme différence.

Une balle siffla un air qui me rappelait quelque chose

Je commençai à rêver

- mal m'en prit parce que le capitaine m'a passé un sacré savon quand j'ai récupéré mes cubes. Adél est passé en courant dans le miroir, et j'ai essayé de l'appeler parce c'était sa fête. Mais de toute façon c'est tous les jours, ces temps-ci, alors je lui souhaiterai demain. Trois rafales de Heckler and Koch G3 SG/1 m'ont rappelé -de façon assez impolie- qu'à part les fêtes et tout ça, on était en guerre contre l'Ennemÿ.

Le pancréas de Miklós a décrit une harmonieuse strophoïde pour s'abattre avec colère contre la joue du premier Secrétaire Général qui passait. Moi j'aimais bien Miklós et c'est quand même dommage d'un côté mais avec un peu de sopalin on a plus rien vu et Miklós non plus d'ailleurs. C'est la première et la dernière fois que Miklós a semblé témoigner d'un soupçon d'intérêt pour les cubiques circulaires rationnelles, et avec du 7.62 mm c'est pas si évident quand même.

Le mur laissait voir des tas de miettes de paysage comme pour se moquer de nous. De fines baguettes de lumière venaient frapper n'importe comment (et surtout pas en rythme) contre les peaux de notre escadron qui séchait à l'air presque libre.

Ce fond d'emploi de sentinelle commençait à sentir sérieusement le renfermé, et je commençais à me rappeler les filles que j'avais vu passer devant le soleil, pour m'en faire un petit diaporama, mais Arthur s'était pris les pieds dans la boîte de cosmétiques vide qu'on utilisait pour faire le son THX et elle marchait plus. C'était quand même beaucoup moins drôle. Il a dit qu'il avait des édulcorants intenses.

Je me rappelle qu'à ce moment je me suis dit que c'était idiot parce quand j'étais couché j'avais toujours les idées plus claires, et que je devrais en profiter pour conquérir la Terre mais j'y pense jamais. Arthur commençait sa litanie sur le livre sacré à plus de 5%, en chevrotant comme s'il s'était enrayé - J'ai repris un peu de saccharine, pour faire l'office avec lui, et fumé quelques cendres parce qu'il restait vraiment plus grand chose à dire, là encore.





coupe zeta

Je me suis à peine rendormi que déjà ça pilonnait sévère. J'abordai cette nouvelle moitié de vie avec résignation ; même pas le temps d'avaler l'escalope matinale ; en plus, c'était déjà l'heure de goûter quand on s'est fait réveiller parce que l'Ennemÿ avait plus de piles. Jónes est mort quand même. On a vite fait une cérémonie pour pas que ça nous retombe dessus et puis on s'est débobinés de tout notre long.

On a même failli arriver en retard à la dissidence. Heureusement la guerre était loin d'être finie et on avait tout le temps de retourner nos vestes, doublées pour ça de terreur molle et c'est fichtrement bien cousu.

On se les fait envoyer depuis le Bánát de Temesvár par la mère de de Miklós, à qui on continue d'envoyer des lettres de son fils pour qu'elle nous réponde qu'elle pense à nous et qu'elle nous aime. János dit que c'est pas très catholique mais je pense qu'il se fout de ma gueule parce que l'autre jour je l'ai vu en train d'écrire une lettre aussi. Ou alors c'était juste une dénonciation.

Ca pas duré très longtemps, parce que les gens aiment pas quand le ciel pleure tout le temps. Ca finit par lasser, même les plus metalliques d'entre nous. Quelqu'un a avancé que si l'Ennemÿ voulait a tout prix la Ville, en même temps, on n'était pas sûr non plus que ce soit la nôtre, et qu'on était nés là par inadvertance. Et c'était vrai qu'on était nés là, du coup certains ont applaudi, mais pas moi parce que j'avais mal à la tête. Et puis bon, le capitaine a commencé à les abattre, un peu comme quand un arbre a poussé trop tordu pour qu'on puisse mettre une attelle vraiment efficace à long terme, et même en lui faisant très très mal.

Il faut que je vous raconte aussi qu'avec un groupe de bidasses qui partageaient mes bacchantes et mes bretelles, on avait fondé un club, histoire de pas trop être embêtés par les nouveaux. On parle avec des images et des petits cris plaintifs, ça énerve les prêtres parce qu'après, à l'église, on fait pareil, par réflexe, et ils comprennent pas. Et c'est vrai que c'est fait pour. Et puis c'est pas comme les premiers types avec leurs barricades.

Ou comme ceux qui étaient par terre, déjà couverts d'étiquettes. Les types avaient fait rudement vite, mais on a pas revu la soeur de la maîtresse. Elle se déplaçait pas à chaque fois non plus. Et même, en général, elle répétait ses phrases à l'avance dans une sorte de gigantesque étoile, encore mieux qu'avec les fers à repasser qu'on utilise nous pour faire semblant, et elle les faisait diffuser partout.

La nuit dernière, il y avait des étoiles partout. Il a même neigé des bouts de perruque deux jours avant, comme un vortex pénible ou le Jour de l'An se serait engouffré, pour ne laisser émerger que des voeux militaires, bien au chaud.


Elle est forte, quand même, la maîtresse.






coupe eta

A faire toujours le même rêve on aurait pû croire que ça finirait par les lasser mais non, les pères des cathédrales gélifiées continuaient à nous promettre de l'herbe mouchetée, pour quand on aurait trop faim pour continuer à se battre. En attendant ca devenait énervant parce qu'ils nous mettaient des cravates. Je commençais presque à regretter les odeurs de macadam brûlé et les dettes de mon enfance.

Alors pour voir si la nuit promettait tant que ça j'ai tiré des grands traits au hasard dans le ciel - on venait de recevoir les nouveaux mortiers C3 - et j'ai prié très fort mais à l'envers, pour que la maîtresse et sa soeur viennent me voir, et non ces hordes protestantes. C'est allé très vite à partir de là.

Le projecteur d'anachronismes inondant les synapses collectives créait de petits astres qui vadrouillaient, se recomposant et, sous l'effet des obus de 81mm, la voix des liturgies Illyriennes m'a répété le cantique capillacé qui simplifie tout, sans objet. C'était calme. Et tendre.

Le frère de Jónes nous est tombé dessus comme une menace à ce moment là, et les gens qui savent que vous jeter des oeufs en forme de grenade comme argument c'est un peu léger quand même (300 g). On a pas tout de suite compris qu'il faisait pas partie de la dissidence, et en même temps, ça on peut dire qu'ils se ressemblent tous, au final, une fois dégoupillée, même quand les idées dedans elles sont aux antipodes. Les unes des autres je veux dire parce que sinon ca vaut pas le coup d'aller les chercher si loin, en général. Et c'est pour ça qu'on s'est demandé. Voire aux Maldives. Mais je me disperse.

Et puis bon, sur les 60 grammes de tolite que contenait l'oeuf, il y en a quand même une bonne partie qui a fini mêlée aux espoirs les plus fous et aux vices inavoués d'Oszkár -et les trois-quarts de son bulbe rachidien. Il avait l'air très dispersé, lui aussi.

On a même pas essayé de démêler le tout, et on a commencé à lui courir vers la chapelle ou étaient entreposées nos armes de service, mais le père Kristóf a estimé que ça commençait à bien faire. Les copeaux d'ongles d'Oszkár n'étaient même pas encore tous retombés. Dehors, la rue s'emplissait des sirènes de détartrage. J'ai repensé à l'opium et à Oszkár. Je me souvenais comme il aimait nous raconter ces histoires lancinantes ou un scorpion se dressait, majestueux, son ombre étalée sur l'ambre d'Esztergom jusqu'à Tatabánya... l'androctone prit une torgnole et alla nourrir les terres de nos ancêtres (et puis de quelques autres gars).

Les logos publicitaires qui se succédaient dans le ciel presque rouge avaient maintenant pris un rythme de croisière. C'était assez excitant. L'autre jour je me suis même transpercé la cuisse avec la paire de ciseaux.

Je les avais complètement oubliés, ceux-là





(...à suivre...)
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Leezie
Envoyé mardi 02 mars 2004 - 17h59:   

El Kor, quelle joie de te lire ici!

sois le très bienvenu
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El Kor
Envoyé mardi 02 mars 2004 - 22h28:   

-salut & merci à toi leezie-

coupe theta

J'observais lentement les petites gouttes de mercure bleu s'échappant de la trachée d'Oszkár. Mais à baver niaisement par mimétisme, j'ai gagné qu'un coup de crosse. Quand je me suis retourné, le Secrétaire Général qui tenait la crosse avait une tête qui me disait quelque chose. Enfin qui hurlait des tas de trucs, surtout. C'est d'ailleurs comme ça que j'ai reconnu le chef de tout à l'heure avec son palet dans l'oeil. Et je me disais bien aussi que pour avoir juste une crosse, comme ça, toute seule, sans le fusil qui va ordinairement avec, il fallait au moins être chef. Ou avoir un palet dans l'oeil. Et ça tombait plutôt bien.

Tout dissidents qu'on était, faut reconnaître que parfois on devait bien retourner à nos postes d'immobilité statique (c'est le capitaine qui a trouvé l'appellation, en fait ça ressemble un peu a de grands urinoirs qui feraient balancier quand on y met les pieds), comme tout le monde. J'ai mis ma jambe inutile dans le sac à dos et on s'est tous mis à boire pour rapiécer le ciel stroboscopique.

La migraine nous guettait tous, mais c'était quand même envers moi qu'elle avait le plus d'attentions. Peut-être à cause du souvenir de Miklós qui brouillait tout. Ou alors c'était les opinions qui comprimaient ma jambe, vu que je les avais fourrées dans le sac. Avec de la crème et parfois c'est lourd.

On commençait à peine à entrer dans les Domaines Techniques, ou de gras gardes se pressaient le long de la porte avinée. Tout le gratin était là. On a retrouvé les types d'en face, d'autres combattants aussi mais contre nous, eux, et puis aussi tout un monceau de bonshommes qui avaient des vilaines trognes aussi, avec des uniformes bariolés, dont je n'aurais jamais soupçonné l'existence sans ça. Ils ont organisé une sorte de défilé entre deux grandes falaises. J'ai préféré pas regarder parce que c'était trop écoeurant -On m'a dit plus tard que c'était comme ça que les Magyars s'habillaient juste avant la colonisation de la Voïvodine par nos responsables-

C'était l'endroit rêvé pour une embuscade à la mode de chez nous. Mais Saint Istvàn a vitrifié les bras qu'on avait, et personne avait pensé à en emporter d'autres. Et puis après tout je comprends qu'on puisse vouloir se rendre ridicule. Moi ça m'arrive souvent, à ce qu'on me dit. Seulement cette idée d'embuscade avait tout d'illégal, mais ça m'avait mis en appétit de carnages. De dentelle.

J'en avais marre de découper et je ne savais ni coudre ni filer. Alors je me suis dépêché de rentrer à l'hôtel, et je suis resté là, planté. Coulant.
Saint Istvàn a fait fondre nos souvenirs communs et il en a fait un petit cordon vif écarlate. Il appelait ça de la Musique et je suis pas sûr qu'il ait vraiment prononcé la majuscule mais moi je préfère la mettre parce que vous allez confondre avec la musique et c'est vrai qu'à l'époque j'ignorais également ce que c'était, mais ce qu'on m'a présenté depuis sous la même appellation n'avait rien à voir alors j'aime mieux préciser.

Ca ressemblait presque plus aux nuages, ceux qu'on a déjà beaucoup malmenés jusqu'ici. J'ai éteint mes clichés, et enclenché la procédure dissidente.

Dans le hall, la fille à l'accueil a dit que ça devait faire un moment que j'étais debout à la fenêtre parce qu'on voyait encore mon ombre sur le mur du bâtiment d'en face, projetée par les rares pans détachés du miroir, et desquels ondulait la lune. J'ai compté jusqu'à l'autodestruction de l'hôtel et j'ai plongé.




coupe iota

J'ai essayé de me retenir mais je me suis retrouvé à peu près au même diapason que les décombres qui voletaient gaiement sur mon passage. Encore "passage" n'est-il pas le mot le plus approprié, compte tenu de l'empressement du souffle à se faire connaître alentour.

Un buste d'amiral sans flotte, intrus parmi les portions de mur, planait avec nous. A vrai dire, je me sentais moi même une portion, un gros tiers malhabile.

Les têtes se succédaient, pendues à la voûte, essayant la perruque à la manière de la pantoufle de tungstène de Clémentine (qui n'aimait pas les bals, mais y perdait régulièrement ses pieds)

Un petit moustachu de Transleithanie a suggéré qu'on pousse à l'exode, alors on l'a exclu de notre club, en l'humiliant convenablement. On a essayé d'appeler la maîtresse pour qu'elle mette un peu de l'ordre dans tout ça et je commence à en avoir sérieusement marre. Et depuis la débâcle, quelques problèmes d'ordre alimentaire.

Avec précaution, la somme des instincts de survie de notre petit groupe nous a individuellement incités à escalader la facade de la chapelle, pour rentrer à la base. Et bien qu'on dorme dans la crypte millénaire, on n'est jamais, oh, non, jamais trop prudent. La sécurité c'est quand même cimentant. D'ailleurs il faudra que je pense à enlever ces ciseaux

- J'aime autant mieux sortir faire un tour qu'être vassal de Rome ! s'exclamèrent quelques rappeurs, qui n'avaient de toute façon pas vu la première partie.

J'ai regardé le calendrier et on était déjà le 4. J'ai pas su quoi répondre parce que ça correspondait pas à grand chose. Avec les camarades, on s'est concertés, et puis on en a conclu que c'était relativement une bonne chose, si on voulait pouvoir se souvenir de la date, qu'elle soit pas déjà prise. Et puis on pourrait inaugurer les moteurs diesel.

Alors on a organisé des purges, finalement. C'était bien plus rigolo que l'insurrection, ou la résilience, enfin je ne sais plus, comment ça s'appelait déjà ?...

Bref, plusieurs fois 46-tonnes-et-600 chevaux, même surabaissé comme peuvent l'être les JSU-152, ça évoquait un peu -et avec un admirable sens de l'à-propos- les chars de Rome, mais en plus mordorés.

Sauf à la fin ou là ils étaient carrément cramoisis. C'est pas tellement la honte, d'ailleurs. Mais bon on dira ce qu'on voudra, les viscères ça tache : on aurait dit des téléphériques blindés de retour de free party.

Le bar à lait risquait de fermer ; on s'est dépêchés de rentrer avant que le frère de Jónes et la mère de Miklós ne retrouvent notre odeur. Parce qu'on dit des ennemis qu'ils peuvent nous sentir, de loin. (Et d'après Belgrade-Match, ils sont ensemble depuis peu.)

Je vais arrêter d'écrire un peu, ma gorge me fait mal.
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pl
Envoyé mercredi 03 mars 2004 - 17h29:   

Philistin : espérons qu'ils ne soient pas 6
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El Kor
Envoyé mercredi 03 mars 2004 - 22h00:   

coupe kappa

Le matin du 11 on s'est arrêtés, parce que les chenilles des chars avaient commencé leurs cocons, et que dans ces périodes là il faut pas les déranger. Il ne restait de toute façon plus rien à dégarnir, et beaucoup de compromissions avaient déjà été conclues.

Quelques-uns, des fils de soldats les plus jeunes, se paraient de regards sombres, dormant sur les bancs privés, sous des piles de journaux, de fausses factures et de rapports de la C.I.A.. Les vigiles ne les laissaient pas faire longtemps, car ils ne mettaient pas de pièces dans les bancs. De toute façon personne ne met jamais vraiment de pièce, mais les vigiles sont comme ça, ils aiment bien taquiner les jeunes qui s'habillent de textes.

Comme nos chefs trouvaient qu'on voyait mal les frontières avec la Transleithanie, ils ont fait ériger une longue plaque d'aluminium, qui en épouse les contours. Ca brille ; les autres ont pas l'air de s'en plaindre. En même temps, beaucoup d'entre eux sont morts, déjà. Et puis j'ai pas tellement envie d'y aller.

On voit parfois quelques ours, dans les rues.

Je suis allé prendre mes ordres au palais, ce matin, ça avait encore changé. C'est János qui est le chef. Le chef, je sais pas où il est passé. Moi, tant qu'on me donne des munitions et des ciseaux... Il y a juste que János avait vraiment une drôle de tête, un peu rentrée, couverte de plis, blême et bilieuse. J'ai entamé mon rapport, mais sa robinetterie otique n'avait pas l'air de laisser couler mon verbiage formaté.

D'une voix bizarre, il m'a demandé d'aller ramasser tous les ciseaux, et de les faire fondre en un grand bloc. Ses lèvres étaient serrées. Je lui ai demandé s'il fallait les prendre aussi à ceux qui étaient en train de se couper les ongles ou attendre qu'ils aient fini, il m'a répondu deux ou trois mots que je n'ai pas vraiment compris et puis il m'a dit que je ferai sûrement très bien selon mon jugement et ça m'a fait rire.

J'ai demandé s'il fallait tous les ciseaux à n'importe quel prix pour être sûr d'avoir compris, il a dit que oui, pour l'honneur de la perruque collective, et de l'étincelle symbolique. A la fin, sa tête a basculé sur le côté en signe d'assentiment et il a fait quelques bulles par l'oreille. Je me suis dit que j'avais peut-être une chance d'être promu et je suis parti - en escaladant la façade, par habitude.

L'avénement du Domaine Technique faisait émerger des mécanismes encore jamais vus, cotoyant maintenant des gardes ours en armes et le pays ressemblait à une vraie quincaillerie. Je me suis rappelé le regard vitreux et condescendant de János, ça m'a redonné de l'espoir. Je crois qu'il m'aime bien.

Après avoir réparti mes pions sur un petit échiquier magnétique, j'ai pris une série d'épingles à tungstène, que j'ai fichées derrière mes genoux, pour me souvenir des pieds de Clémentine.

Les effluves de goulash qui gagnaient les maisons en bordure du fleuve enivraient pas mal de nos hommes et on en vit qui vendaient leurs ciseaux dorés pour se payer un peu de bon temps, assis sur les perrons, à humer, sous l'oeil faussement paternel des automatochtones - ils se faisaient rémunérer pour ça.

Les ours ne ressemblent vraiment plus à grand chose, avec tous ces appareils qui s'agglutinent au fil des jours sur leurs fourrures, mais tant qu'ils sont armés, on n'ose pas se moquer d'eux. Hier soir ils ont patrouillé avec nous. Presque personne n'est mort.


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El Kor
Envoyé jeudi 29 avril 2004 - 18h11:   

juste pour effacer la terre... et revenir à
...
conchita.
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El Kor aussi
Envoyé samedi 01 mai 2004 - 16h41:   

mm ?
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En Kor
Envoyé lundi 19 juillet 2004 - 12h15:   

coupe lambda

On a ramené pas mal de ciseaux, la plupart en mauvais état parce que leurs propriétaires n'étaient visiblement pas très motivés par l'idée de perruque symbolique.

On s'est dit que ça aurait été plus simple si János était venu leur expliquer lui-même mais bon il devait avoir ses raisons, alors on labourait de plus belle les ventres opiniâtres, sans dégueuler de parénèses superflues.

Dans la violence généralisée qui comblait le plus fort de nos journées, difficile de vraiment se faire des copains. En tout cas des qui soient entiers. Quelques exceptions quand même, surnageaient à la surface de cet océan d'inextricable mélasse. On avait dû leur donner des gilets de sauvetage ou quelque chose

J'étais avec deux d'entre eux, qui m'étaient particulièrement chers, et dont les prénoms m'échappent maintenant, lorsque János nous a fait mander. János c'etait quand même pas tout à fait n'importe qui, surtout à ce moment-là de l'histoire et de l'Histoire (je vous ai déjà expliqué le truc avec les majuscules, là c'est pareil mais sans musique).

Le vieux palais Préside-au-ciel s'enorgueillissait d'une forme d'opéra, rayonnant d'une fourrure étrange ; ça faisait qu'il se confondait avec les poils du firmament - qu'on avait placé juste derrière, avec sacrément de bon goût. On y distinguait l'effigie (peinte à la bouche) d'un Dieu parsemé de punaises. Ca faisait comme autant d'abcès du créateur. Quatre ours patrouillaient, statiques, pieds coulés dans des blocs de liège aggloméré. Aucun ne semblait avoir de ciseaux.

Le silence de la rue pesait sur nous comme une chape de flocons d'avoines et on n'entendait presque rien de la rumeur acide des prototypes de nymphes phanérocéphales industrielles recouvrant les hauteurs de l'édifice. On a laissé le fronton du palais tranquille pour une fois, les mécanicules vrombissant saturaient vraiment trop l'atmosphère pour qu'on se laisse tenter. Et puis tout ça faisait vraiment compliqué à prononcer en langage des signes (qu'utilisent les alpinistes pour parler, car ils ne peuvent pas utiliser les pieds), et encore plus en langage des signes Hongrois.

Ca et là, des harangueurs à remontoir postillonaient sur la foule en laisse/déchaînée, volant des expressions à droite et surtout à gauche, à cause d'une ancienne hémiplégie mal soignée. Ces murmures tapageurs montés de série sur des caisses faisaient passer leurs savons à toute l'assistance, qui les effritait de main en main

Tous les bancs avaient disparu des trottoirs délavés. La larve de la rébellion développait ses ébauches alaires, en pleine mue, rageuse et méta-thorax frétillant. On a pensé tirer dans le tas de dictyoptères mais, comme, de leur côté, les gardes ours ne faisaient pas mine d'y prendre, garde aussi, on a baissé la tête et décidé de se glisser sous la porte du monument.

Ca nous a quand même pris quelques heures. Entre temps, l'un de mes comparses, celui qui avait le matériel d'escalade inutilisé, s'est fait grignoter les pieds et les mollets par les cafardeux insurgés. J'ai jeté un regard par le trou de la serrure : ses crampons étaient restés accrochés aux chaînes de la porte. Il a pas mal hurlé, avec un laisser-aller dont je dois dire qu'il était assez crispant , de la part d'un Secrétaire Général attitré.

On s'est servi des copeaux de jambe comme d'un caniche-à-boucher-les-courants-d'air-sous-les-batt ants-de-trappe, et galopé vers la salle de gros mandement.

Avant que les projections de caillots ne bouchent la serrure, j'ai remarqué que les plantons plantigrades n'ont même pas bougé, à part l'un d'entre eux qui a recraché une blatte avec dédain, de l'oeil droit. Je me demande bien à quoi ils peuvent servir.






coupe mu

Mandés comme on l'était, difficile de faire marche arrière. En nous voyant, un ours, qui semblait pourtant débranché, leva la paupière et le rideau nous séparant de Son Eminence (et pas uniquement la sienne, d'ailleurs. Il me revient à ce propos une histoire de crimes échangés que je vous raconterai quand j'aurai retrouvé mes notes, parce que bon.).

La salle suintait de riches tentures ; on sentait presque la toute-puissance égaliser nos têtes, plissées d'humilité. Partout flottaient les chevelures du pouvoir. János fit son apparition, nettement transformé si on repense à la dernière fois mais en même temps c'est vrai que ça commence à dater, allongea le bras vers nos fronts, fit quelques signes cabalistiques et toussota.

Dehors, la bataille faisait rage. Dans toutes les rues, noires de gronde, on entendait hurler des attentats contre les princes et les empereurs. Des abdomens et des antennes volaient, ça et là. Des tours s'effondraient. Le CAC 40 chutait. Toutes nos murailles tremblaient, qu'on aurait vraiment dit des poètes transis - enfin, des qui soient faits de cailloux. En plusieurs mots, l'heure était grave.

János fit retentir son timbre - grave, aussi, mais oblitéré - parmi les grandeurs marbrées de la pièce :

"Je vous connais bien, ma jeune garde molle, fibreuse, fraîche comme l'herbe des monts. Vos lames pures, plus fines qu'un sinus, ont l'accent démoniaque des moqueurs troubles, de ces verres d'alcool qui moirent nos murs friables... On ne doute de rien, peut-être ! On a sans doute toujours vaguement tort, à part, éteint, dès qu'on s'éloigne des vierges d'acier - d'amiante, peut-être ? et (se pourrait-il ?) attirantes ? répondez !

- je...

- Bien sûr ! on n'attrape jamais les suspects deux par deux ! Pousser la faute jusqu'au coeur, au filament quand tout-à-coup, miracle ! Danube ! Le violon de bohême s'élève ! A nouveau ! Majestueux comme Jamais, voyez, son évolution donne, à tous, la chair de faverolles. ...

(Il allait, virevoletait,... vous auriez dû voir avec quelle facilité ce qui ne semblait, au premier abord, qu'un sac de pus grossièrement cousu, pouvait évoluer dans un tel entrelacs de fils, de crins et de nylon, c'etait rudement chouette...)

... C'est un peu la pantoufle de plastique : on traîne une histoire déjà jaune, on s'acharne sur nos formes d'enfants (jamais nettes), on fait tournoyer les marteaux pour adapter des airs connus. Rien ! Rien, jamais, n'est assuré contre l'audace interchangeable. Et les noms alignés dans le vide autour du coeur des branches se recyclent !

- Oh...

- Je ne le sais que trop, canaille ! Evidemment ! evidemment, grouillants et sentant l'homélie, l'huile du phare, et la glauque rédemption cimentée comme essentiellement sudoripare. Et vos forceps ont l'allure tapie, blême, ondoyante - en un mot, cendrillée - des citrouilles qu'on vénère, à défaut d'autre souche !"

Un badaud mou gloussa :

"lol.."

Il n'eut pas le temps de commettre un sourire horizontal, vacilla, s'effondra, gorge opportunément transpercée par un espadon dont le manche arborait les armes trop connues du Grand Jagellon de Lithuanie. L'assassin ducal terminait ainsi sa période de probation au sein de la nouvelle administration. Quant au message de János, il était clair et pour preuve : c'est à peu près tout ce que je pourrais en dire.

Un Chambellan nous remit des ordres de mission vierges, afin que nous les teintions du sang grotesque qui s'obstine à irriguer les déviants.Les ventres ouverts s'amoncellaient contre les murs, chitineux, obscurcissant jusqu'aux vitraux du palais global.

Des gravures de faïence illuminaient ma nuque. Une phrase resta suspendue des jours au-dessus de
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kor
Envoyé lundi 17 janvier 2005 - 03h40:   

coupe nu

Le palais avait presque achevé son cocon alors le bout de la phrase fut tombé dans le dehors. Le chambellan-médical nous eut asséné quelques piqûres amicales de sécurité et nous y expédiait à sa suite. On en sera brusquement tournecentrés.

La chute de la phrase avait fait quelques morts parmi les Inutiles, dont les gardes déblayaient les restes, au Chasse-poudingue ferrugineux. L'un d'entre eux philosophait :

"C'est étrange, quand même, que le mot 'palindrome' se lise 'emordnilap', à l'envers tu ne trouve pas" ? ca prouve quand même que que le dictionnaire a tort quand il dit qu'un 'palindrome' se lit pareil à l'envers. Un dictionnaire qui se trompe ! Alors ça est-ce que ca remet-y pas toute la planète du monde en question, hein dis l'rémy ?! ", et l'autre d'opiner, machinallemande.

J'y ai réfléchi tout le long du trajet qui m'emmenait dans ma suite. Je crois même que j'en ai chiffonné le reste du mandement de János. J'ai dû le repasser une fois arrivé. J'ai posé mon casque sur le porte-casque, et je m'en suis félicité (parce que je lis Descartes, en ce moment).

Comme l'histoire du garde me théorisait la tête, j'ai essayé de voir ce qu'il voulait dire mais je me suis fait mal à la nuque en essayant de lire à l'envers.

A ce propos, il me semble que le mur fait des efforts aujourd'hui. Pour se tenir droit, bien sûr, notamment - ça n'est pas si facile qu'on veut bien le croire, surtout sur la durée - mais aussi pour se contenir. Il éructait beaucoup, avant.

Tout est, à nouveau, changé ; rechargé. Je le vois bien. Depuis que les lézardes du coin se sont arrêtées de se projeter vers moi, par exemple. Je l'ai longtemps senti méfiant.

Mais pas aujourd'hui. On sent nettement la joie chez mon ami cimenté. Je vais peut-être lui acheter un radiateur. Ca le comblerait, j'en suis sûr.
Il y a la meurtrière, déjà, qui lance des miettes de lumière un peu partout. Là ou elle peut. Là ou ça retombe. Et ça retombe, effectivement ; et puis elles flottent.

J'ai appelé Mirkèv, qui est docteur au noir. Il m'a diagnostiqué des troubles du récit. Je crois que c'est pas grave, il m'a juste dit que c'est mon auteur qui devrait se faire du souci. Là encore, j'ai pas bien vu ce qu'il insinuait, mais ces temps-ci, quand j'essaye de comprendre, j'ai mal à la nuque, j'ai remarqué.

Les dés m'ont à la bonne aujourd'hui, le monde confirme mes attentes : On entend le terrain de jeux. Deux enfants y deviennent les seules -à jamais- les uniques légendes qui soient. Qui durent. Qui durent tant qu'on a pas dit "pouce" et puis même, on dirait qu'on serait pas morts.

Car la Faux les guette. Ca ne se voit pas tout de suite comme ça, mais on le sait. Il y a une épidémie de Faux qui s'est déclarée candidate au rachat du pays et bon je ne sais pas si Coca-Cola était malade ce jour là, mais apparemment, quoi qu'il en soit, c'est la Faux qui a remporté le marché. On a mis le temps parce que les journaux ne voulaient pas en parler.

Alors le chef a dit qu'on va les torturer. Oui, je sais. Moi je vois bien que c'est mal. On m'a bien appris les fragments candides, comme tout le monde, à l'école du savoir libre, en Division-Universitaire Mineure Bolino - "tu ne tueras pas , meme pour un bol de Bolino 'les bons petits plats malins', de Maggi", "tu ne feras pas d'impuretés, et resteras tel une soupe filtrée Bolino, Bolino" et j'ai quand même des scrupules quand il s'agit de tant découper, surtout des journaux que je ne connais pas.
Et bon, le chef a tellement insisté qu'on s'y est mis. A contre-coeur d'abord, et puis très vite il faut bien dire qu'on a pris le goût d'éther brûlé, des carnassiers bardés de pinces, nourris de fines gouttes de peau, on leur arrachait même les pages saumon. J'ai beaucoup ricané. C'était surtout nerveux au départ, mais ça donnait quand même une ambiance de fête. Vous savez, l'âme, l'essence, le chiffon, cela s'enflamme bien promptement, s'evanouit contre le mur, hisse le ton, contamine les tapis/les gens

là,
chez les chiens,
sous l'orme criblé de rameaux
de tombes alignées.

Maintenant, tout est en notre possession. La brique n'a pas de raisons de vibrer. La scie reflète l'ordure, dégouline, mais ça devrait pouvoir passer, tant que je surveille le mur je n'y pense pas.

Des appareils rebelles viennent de se positionner devant la gigantesque affiche avec un soleil couchant qu'a fait installer János à la place de l'horizon. Je crois qu'ils viennent vers nous mais je n'arrive pas à détacher les yeux du mur. Il n'a pas bougé une seule seconde en deux mois. Je me demande bien comment il fait. Moi je n'y arrive pas. Je me suis encore baissé ce matin pour éviter des tirs de Bouillon Kub.

Il se rapprochent, j'ai l'impression. J'entends des hymnes de moteurs insurgés... peut-être qu'il est grand temps de rester assis.

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