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aglaé
Envoyé jeudi 30 juin 2005 - 17h57:   

Apéritif en famille

- Dis maman, on est tous là…je peux servir l’apéritif ?
- D’accord Charles…Mais pas le bordel comme la dernière fois.réfléchis qu’on est douze ou treize en comptant les bébés et prévois des verres incassables pour la piétaille… Ils m’ont encore bouzillé deux flutes à champagne dimanche dernier…dis leur bien que j’achète des gobelets en plastique à la Foirfouille à partir de maintenant !
- T’inquiète.J’assure pour tout le monde.
- C’est toi le meilleur…Mais face à cette horde de vandales, que peut mon vaillant fils ?…Vas-y quand même !
- On voirra cha. Toi papa, pendant que je te tiens, tu veux quelque chose ?
- Merci. Ne t’occupe pas de moi. Je me sers moi-même…
- « …Mais je ne permets pas qu’un autre me les serve » Toi maman ? un truc sans alcool comme d’habitude ? et n’importe quoi de préférence ?
- Exact. Tu me connais bien.

Au salon, la pagaille s’organisait : quelques fauteuils à leur place légitime, les chaises du déjeuner retournées vers la table basse du salon beaucoup trop petite pour le nombre de verres de toutes tailles et les coupelles de grès emplies de cacahuètes et de pistaches tenues à distance des enfants dans la mesure du possible.

- mes biens chers frères, papa cache un Lagavulin assez sympa dans le cellier pour les invités de marque…donc pour nous… Qui sont les amateurs sérieux ?
- Moi, moi, moi, ça me fait quatre…avec perrier ou sans ?… vous êtes vraiment dégueulasse…un whisky pareil avec de l’eau…je vous dénoncerai en haut lieu…
- Où sont les parents ?
- Ils préparent une morue à la crème qui a l’air assez mangeable et ils arrivent ; Edgar, descends du fauteuil. C’est le fauteuil de Deudeu depuis toujours.
- Toujours ?
- Avant ta naissance, ce fauteuil était déjà à Deudeu. Sauf quand Pruche en profitait pour se vautrer sur le coussin.
- Pruche, le boxer ? Qui volait les biscuits à apéritif ?
- Il volait de tout le salaud ! Même le pain qui le faisait péter pendant des heures !
- Il est mort ?
- Oui. On te l’a dit cent fois ;
- Il était très malade ?

On allait s’engager une fois de plus dans des détails morbides dont cet enfant raffolait. Une protestation sans aménité s’éleva du chœur des adultes :

- ;Vous nous foutez la paix une fois pour toutes avec l’accompagnement aux mourants de cette pauvre bête ! Tu veux un coca, Edgar ?
- Ouai… N’empêche que Doudou m’a expliqué que Pruche avait des crises d’épilepsie…Qu’il devenait tout raide…et qu’il tombait d’un seul coup par terre comme une masse…
- Isabelle, chère belle sœur, peux tu demander à ton gosse de nous lâcher la grappe une fois pour toutes avec cette histoire ?…Hola, machin, rapporte des glaçons pendant que tu y es…Papa a vraiment le génie pour raconter des trucs à la con aux enfants et on n’ose même pas lui en parler… Drame du sur-moi…comme d’habitude !!!
-
- Tradition de famille : les pommes de terre cuites à l’eau, rangées dans un grand plat, trouvaient place malgré l’encombrement au milieu de la petite table, et chacun, se brûlant et râlant, entamait l’épluchage des petites rates bien calibrées qui couronneraient le plat de poisson du déjeuner.
-
- On vous entends pas les amoureux ! C’est quoi ce bouquin, Cyrille ?
- Je le rapporte après lecture…très chouette… J’étais pas emballé quand Doudou me l’a mis presque de force entre les mains…je connaissais juste le film : »Un singe en hiver » que je me farcis régulièrement…mais « Monsieur Jadis », c’est un bijou…ciselé… Doudou et deudeu le considère comme un des livres qui les ont marqués au fer rouge, malgré la légèreté apparente….profond et léger….on aimerait bien en faire autant…
- Tu arrives au monde mon petit Cyrille. Les parents nous ont lavé le cœur mille fois avec le style du bel Antoine…pas de regrets… des parents qui enseignent l’amour de Blondin à leurs rejetons ne peuvent pas être tout à fait mauvais…Justement les voilà, les meilleurs cuisiniers de France et de Navarre… Vous en sortez ? Je mets une pile d’assiettes au chaud ?
- C’est fait. Où est mon verre ?…Merci…Mon fauteuil Edgar, s’il te plait !…va chercher un casse noix pour les pistaches, Jules, au lieu de te massacrer les dents…
- Deudeu ! Maman veut pas que je parle de Pruche !
- Tais-toi Edgar ou je ne sais pas c’ que je te fais !… Charles, dis quelque chose, ton gosse me tape sur les nerfs !
- Débrouille-toi, ma chérie, avec ce fils qui te ressemble ! Comme deux petits pois dans leur cosse.
- N’importe quoi ! Qu’est-ce que ça vient faire là cette réflexion inepte ?
- Trois fois rien. Disons que pour vous faire taire quand vous êtes décidé à parler…c’est midi sonné…La mère aussi bien que le fils…On arrête là si tu veux ?
- D’accord. Mais t’es vraiment pas gentil. Qu’est-ce que vous buvez Doudou ?
- Un petit punch allongé de jus d’orange….Vous en voulez un Isabelle ?…Pourquoi vous avez mis votre voiture devant le garage ? C’est pour m’empêcher de sortir ?
- T’es parano papa ! je lave la mienne après déjeuner, et si tu veux, je m’occupe de la tienne dans la foulée ?
- Chouette ! ça me casse les pieds de plus en plus ces corvées là…tu peux tondre la pelouse ?.. non, c’est pour rire…Il en reste des petits trucs au fromage ?
- Les gosses les ont fini…C’est leurs préférés.
- Encore une manœuvre de la jeunesse agressive contre la maturité bienveillante !
- Nous fais pas rigoler….Pas tous des anges les pépés mémés…
- Mais eux, ils bouffent pas tous les biscuits au fromage !
- L’âge leur a donné un égoIsme plus raffiné, des tactiques sophistiquées, des bonnes manières…je plaisante, faites pas cette gueule-là.
- On t’entend pas la Marie…Tu fais du boudin ?…T’es dans tes mauvais jours ?
- Guillaume !!!
- Ben quoi, j’ai le droit de savoir…Je retire pour ne pas choquer ma mère…blague dans le coin, marie, ton stage à l’hôpital ?
- Terminé depuis hier. Un peu dur. Nous, élèves assistantes sociales, plongées dans un climat strictement médical, on souffre ! la maladie, la pauvreté, le chômage…on connaît… mais là, c’est la souffrance, les odeurs, les pansements…intéressant….mais je suis soulagée d’avoir fini.

Jusque là, on n’avait rien cassé. En deux secondes, les garçons ont renversé la carafe, noyé le tapis, tapis d’orient de chez Auchan…mais quand même !, et inondé le futal de leur cousine. Deux ou trois claques rapides mais sans force ont volé aussitôt. Les biscuits secs tombés à terre se sont gorgés de liquide tout en gonflant de volume. Une grosse éponge a sauvé la vie du tapis et marie a tirebouchonné autour d’elle un pantalon trop grand trouvé dans une chambre…Quelques brouhahas plus tard, constatant qu’il était une heure et demie, l’un de nous dit que si on faisait manger les enfants à des heures convenables, ils feraient moins de conneries….

- Deudeu, qu’est ce qu’on mange ?
- On l’a dit cent fois : de la morue à la crème avec des patates…et on aura le droit d’écraser les pommes de terre dans la crème avec sa fouchette.
- Chouette ! Chouette ! Chouette ! J’adore !
- Et toi Jules ?
- Beurck !!!

- Aglaé
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khalid
Envoyé vendredi 01 juillet 2005 - 17h35:   

puisque on en est aux souvenirs en voila un tres récent que je viens d'éditer sur mon blog...

Jeudi dernier,15h30 dans la salle de réunion de notre direction. Un buffet est élégamment dressé. Toute une variété de plateaux de gâteaux et de différents jus, le tout coiffé d'une petite touche conviviale qui vient briser harmonieusement l'austérité habituelle de la salle par la présence pertinente de petits vases habilement fleuris, placés ça et là sur les tables.
les invités commencent à arriver par petits groupes, tous des collègues il va de soi, pour assister à ce petit pot d'adieu offert par une partie de ces mêmes collègues à quatre de nos vétérans au visage marqué par l'émotion et par les assauts du temps, complexe combinaison qui donne toute sa gravité et sa solennité à ce cérémonial maison.
L'ambiance très virile glissait petit à petit, à coups de claques sur le dos et de poignées "pinces à pression", vers les blagues potaches en attendant l'auguste présence du directoire.
Le taux de testostérone monte d'un cran par l'entrée en scène du secrétariat du directoire, tout en seins, poussant à craquer d'une démarche féline une robe moulante à vous démanger furieusement les mains d'une envie subite de pelotage.
D'un feulement étudié la tigresse annonce la présence imminente du lion...enfin c'est l'image que le directoire s'évertuait à entretenir dans l'imaginaire collectif de l'entreprise.
Pas énorme en fin de compte la bête pensante de l'entreprise, minuscule même comparé à son salaire empilé en liasses de billets de cent.
Quelques hyènes départementales en chef, aux dents plus pointues que leur profil, prennent la parole par la gorge, la bouche en cul de poule au blanc bec, pour assouvir un arrivisme démesuré et nous pomper un air déjà assez étriqué par le décolleté de la fauve, patronne des seins, par des formules usées, empestant la salle d'une odeur douce-amère de botte mal léchée.
La voix de son maître prend enfin une parole concupiscente, empruntant plus au sifflement qu'au rugissement, pour nous prouver à tous – les quatre mousquetaires déposant leur épée n'étant qu'un prétexte - son savoir faire discoureur. Pendant que la chefferie nous vantait dans une phraséologie à la hauteur de sa sincérité, ce qui veut dire au ras des pâquerettes naines, les innombrables vertus des futurs abonnés à la retraite mutualiste, la sous chefferie quant à elle nous jouait, de manière magistrale, la "béate attitude" à coups de mimiques digne de Marceau. Toutes les manifestations expressives de l'admiration servile défilaient sur leur visages devenus écran réflecteur de la 8ème merveille du monde. Dans le miroir de leur prunelles, le tribun devenait géant.
Finalement, à cours d'apostrophes, la rhétorique dirigeante s'englua rapidement dans le balbutiement et le euuuh de circonstance.
Ayant été désigné par les collègues pour prononcer l'allocution officielle témoignant le respect à nos futurs ex-collègues, je repris en mon sein, non sans avoir maté furieusement celui de la féline, la parole agonisante sur les lèvres du directoire. Apres l'avoir décrassée et revigoré d'un raclement de gorge je pris sur moi de redorer le blason, gravement terni, de la déesse parole.
C'est là que je me suis rendu compte que durant toute une carrière nous n'avons que très rarement l'occasion de parler devant un auditoire attentif à vos propos. C'est très impressionnant...tellement impressionnant que mes jambes en vinrent à trembler et que mon souffle en perdition ne trouva son salut que sur le promontoire aux pitons agressifs qui donnaient tout son titre de noblesse au poitrail de l'assistanat à la direction. Il était fichtrement bien assisté le chef...normal qu'il ne soit jamais en panne d'inspiration aussi branlante fut-elle.
Soutenu par ces flotteurs inespérés j'évitai donc de sombrer dans les eaux troubles du ridicule et ma foi, ne m'en sortis pas trop mal dans ma rhétorique improvisée. J'ai peut être l'air de bloguer comme ça(normal nous sommes dans un blog), mais je vous assure que l'émotion était vraiment là. Les gars qui partaient méritaient vraiment le respect. Ils avaient tous plus de 40 années de "boîte", consacrées à l'exécution minutieuse des missions leurs ayant été confiés. Ils partaient sans doute avec pas beaucoup d'argent en poche mais certainement avec un respect et une reconnaissance, inestimables, de la part de tous leurs collègues. Un respect arraché par les milliers d'heures de travail consacrées à l'édification du savoir faire de notre compagnie. Un respect et une estime qui sont en quelque sorte la "médaille" qui récompense ces années d'abnégation. Mais toute médaille à un revers et ces heures consacrées à leur tâche professionnelles, bien au delà du réglementaire, ont aussi été "volées" à leurs vies privées...et à ceux et celles qui les partagent avec eux...épouses et enfants. De ce fait ils ont contracté envers eux une dette éternelle. Une dette dont ils pourront, maintenant, s'acquitter largement, leur emploi du temps leur ayant été restitué. qu'ils en fassent bon usage.
Je tenais, à travers ce post, s'ils le lisent peut-être un jour, à leur réitérer encore une fois tout mon humble respect et le témoignage de mon amitié.
Abdel.... mohamed...houssine ..omar...que les vents de la liberté vous soient favorables pour mener à bon port tous vos voeux de bonheur...

Votre ami

khalid tout en bises au glaé
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aglaé
Envoyé vendredi 01 juillet 2005 - 17h41:   

KHalid

Combien de glaé dans ton whisky? je ne me souviens jamais!
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khalid
Envoyé vendredi 01 juillet 2005 - 17h55:   

autant que peut en prendre le verre :-) :-) :-)

kb...vert

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aglaé
Envoyé vendredi 01 juillet 2005 - 18h09:   

J'aime dans ton texte cette gentillesse attentive pour tes quatre collègues....caractère récurrent, comme disent les cuistres, dans d'autres pages, sur pleutil par exemple...la marque Khalid...Affectueusement.

Aglaé

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