Le Salon de lecture

 

Des textes des membres de l'équipe ou invités surgis aux hasard de nos rencontres...









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 Armand Dupuy

Ne Porte


1.

Ciel crasseux sur la haie. Des mouches déplacent le bras, le migrent sur la table, cousent ou décousent l’avant. Longtemps ma fatigue lutte avec la chaise. La couleur du lilas peine à toucher l’œil. Adhère aux grappes. Touche froid par intermittences. Une aile de tôle bat la grange, décroche le matin, achemine vers autre chose. Est-il besoin de tourner ma pelote en questions ?

2.

Un deux trois, du vent, j’arrive. Quelqu’un passe dans le gravier, s’éloigne, court peut-être, ou je ne sais plus, du gravier d’oreille qu’on brasse ou qu’on laisse frire sous une très vieille semelle. Ici comment va le temps, avec ses coudes, l’air de rien ses chicanes, et ses accélérations brusques, brusques et qui décoiffent au moins l’idée qu’on s’en fait.

5.

Infusion jaune baigne la fin, mûrit les poires, les briques. Lumière meuble et comment, comment peser vraiment sur ce qui me pèse ? La pensée dévisse, fait des lacets. L’œil peureux se déroule et coule en vipère. Les tickets de métro poussent une herbe drue dans les pages. Les oiseaux, les enfants participent au silence. Je dois lutter contre mon propre bruit.

6.

Prunus, loin, quelques millimètres pulsent la voûte, continuent comme un caillot dans la campagne. Matin, retour de blanc, de blouses, de draps, salle d’attente, patience et prénoms qui tournent. Moulins, visages, étiquettes, s’agitent et s’échangent. Au final, tout expulsé – les mots sont froids – vide et ne porte.




3.

Crasse encore. L’après-midi, corbeaux ras les champs. La fraîcheur tend les fils. Je descends. L’air à cheval sur mes épaules, et rien. Il faudrait mettre au rancart les yeux. Ne pas laisser dehors s’avancer, le tenir, se tenir contre, au mieux s’adosser. Mais qu’obsède le blanc, qu’obsède et carie l’œil ce ciel ? Décidément voir nous recule comme coup de crosse double.

4.

Coups de masse lourds, derrière, rythment la tête. Difficile de s’extraire, martèlent, la tiennent. Malhabile au raccord, la main n’enregistre qu’elle-même. Que son échec en bout de page. On pousse le corps, la benne vide, devant, derrière, sans savoir où le moteur ou quoi vrombit dans le vent.


7.

Du soir s’égoutte à l’envers. Pépiements font peau mince au silence, ferment en sac pour tenir. Gratter du bout de l’ongle suffirait. Rester là sans s’étourdir de mots ni quoi savoir, séparé dans la stricte épaisseur de soi. Des pointes d’obscurité ploient les ombelles. Les yeux dans le linge, paysage trop calme, je penche avec.


8.

Ciel teinté de terre ne tient plus sa ligne de partage. Les prés fument. Le haut plisse et gomme le bas. Nivelé dedans, je pousse à bout la fatigue. Peut-être quelque chose avant de tomber quand la main poreuse. Les mouches agacent, répètent un bruit de braguette. Rideau la journée. La table stabilise le tout.

(Bourbon-Lancy, 28 juillet – 4 août 2007)

Armand Dupuy
pour francopolis décembre 2007



Créé le 1 mars 2002

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