Le Salon de lecture

 

Des textes des membres de l'équipe ou invités surgis aux hasard de nos rencontres...








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Poésie du peintre en poète: 
Aissa Ikken.





L’aigle noir


Un aigle
Gardien mystérieux des lieux nostalgiques
Obscurcit mon espace

Je me dissimule
Entre les plumes de son envol

Les  battements de ses ailes frémissent mon cœur
Dépouillent mes mots  de leur résonance

Il disparaît dans l’obscurité
Puis réapparaît
Interrogateur
Perché sur  la nudité des mots  semés dans les sillons de ma nuit

Je soulève  les pierres suspendues dans le temps
Sur lesquelles tant de passion
Ont ciselé les images
De  l’absence
De  l’infidélité
Des dernières phrases murmurées
A la surface de l’histoire
Par la magie des siècles
Et les écrits invisibles

Dans le chaos ordonné
Des demeures dépeuplées
Je tente de déchiffrer leur solitude
Polie par l’abandon

Je recompose  les contours de mon cœur
Amnésique
Il n’en veut pas à mon regard
Qui cherche la splendeur dans le désert de la mémoire

Ses vibrations  ont creusé sur les parois des  rêves
Des sentes sans rivage
Suspendues aux cils de mes yeux
Egaré

Mon appel martèle les eaux de l’océan
En quête de l’étoile clairsemée dans les lieux de l’oubli

Fatigué de courir les dernières lignes
Je me révolte contre les caresses de l’aigle
Qui picote mes émotions
Sur le chemin des traces de mon exil

Mes rides se creusent dans le silence de l’absence
Ecorchent la virginité des remparts
Tissée dans la tristesse des mots
Et la tragédie des images

L’oiseau crie la rupture
Ecume mon errance
Entre les angles déteints par le temps
Et la sécheresse enracinée dans l’énigme des pas

Du  chant   des légendes
Un cavalier traverse le désert
S’accroche aux crêtes enneigées
Me vole un poème
Ecrits sur les lèvres
Des nuits d’insomnie

Il me propose le  conte
De la  femme brodée dans le  ciel
Surgi du miroir des mille et une nuits
Et du chant nostalgique de la  rivière
Qu’elle a traversée sur une  péniche aux couleurs d’amour

Son sein tatouée de mélodies
Glisse sur les pentes des  récits captivants
Chantés dans  les courbures de l’ornement de la vie

Par touches printanières
Elle déverse ses songes sur mon étoile
Raconte à l’air en attente d’exaltation
Les partances nocturnes vers les saisons
 germées dans  les mirages  du matin





Hommage à Kerboucha


Je ne parle plus aux arbres
Ni à la pluie
Ni aux cœurs
Aux levers du soleil non plus
Ni au vent
Ou aux dunes de ma vie

Je me parle à moi-même
A ma folie

Dans mon obscurité
Je caresse la froideur de la pierre
L’humidité de son histoire
Les cris étouffés des images effacées
Par  l’absence de la lumière
La  pureté de l’air
Le  cri de l’oiseau
L’ondulation des épis de blé
Le chant des vagues de l’océan


Je caresse la froideur de la pierre
La fragilité de ses soupirs
L’appel de sa sensualité
Déposée entre les fentes des murs

Je m’accouple à son calme glacial
Aux variations de ses désirs
Aux plaisirs de ses mortes saisons
A la fluidité de mon sang
Pour retrouver ma liberté


Mais
Je meurs de ma nuit
De l’exode de  mes rêves
De  l’isolement de mon cœur
Du silence de ma voix
Perte de mes souvenirs










Soupir du souvenir
 
 
 
Un jour
Sur les sables de mon cœur
A l’ombre de la pureté du ciel
Tu m’as murmuré le chant du mouvement de ton corps
Une danse aux portes de la vie
 
J’ai rêvé de tes gestes
Du balancement de tes épaules
Du prolongement de ton regard
Au-delà des montagnes de tes ancêtres
 
J’ai rêvé du rythme de tes élans
De l’harmonie de ton sourire
Ciselé sur la fleur d’arganier
 
J’ai rêvé de ton alphabet
Cueilli dans l’espace chorégraphique
De ta chevelure
 
J’ai recomposé ton ballet dans mon regard
Par touches lapidaires
Emporté par le mirage de tes évolutions
Qui assoiffent mon désir de me confondre
Dans les variations de ton soupir
 
J’ai rêvé de la sensualité de tes lèvres
Que j’ai effleuré par gestes furtifs
Ephémères
Répétés à l’infini
Jusqu’à construire un point lumineux sur ton horizon
 




Mots de la vie
 
 
 
A vingt ans
Je mettais mon pied dans l’étrier du vent
A la découverte des océans
Des poèmes de la vie
Du nombril de la prophétie
 
 
Je peuplais mon cœur
Des chants des oiseaux des flots marins
Des rivières
Des sentiments éclos entre les cils des matins
 
 
Je gouttais des sources de l’éphémère
Accrochées aux sommets de la magie des instants
 
 
Aujourd’hui
A l’embouchure de ma planète
Envahie par les cendres du temps
Je ramasse les reflets de toutes les images
Pour les conserver dans ma mémoire avant l’ultime voyage
 









Chant des ancêtres


Trois chevaux attachés à un fil de pluie
Livrent leur méditation
Au silence des cèdres  éternels
Qui étendent leurs ombres majestueuses
En marge de  l’écho des sources de la vie


Un torrent né de l’ondulation du fleuve
Disperse sur l’écume blanche des eaux
Des images cueillies des buissons de la mémoire
Et des écrits transcrits sur les paupières du ciel


Je m’accroche à la mélodie des flots
Témoins des chimères du temps
Pour couvrir mon émotion
Prise en otage par les reflets des saisons
Une femme sculptée dans ma pensée
Emerge de l’écorce  du passé
Elle peint  dans mon regard la vallée de mon enfance
Qui emprisonne mon cœur dans la nostalgie des souvenirs des espaces millénaires
Sur lesquels reposait le chant de ma mère

Des cavaliers parés de leur histoire
Surgissent de l’ombre des siècles au rythme du bandir
A la cadence du mouvement des épaules
Et le fléchissement du corps des danseurs

L’âme se ravive dans l’espace des grandes légendes
Détourne la rotation de la terre
Place l’éclipse de la lune au dessus  des prairies verdoyantes
Gardées par la fierté des monts de l’Atlas


Une foule enveloppée de sérénité et de noblesse
Enivrée de chorégraphie et  de sentiment
Traverse la mémoire par fidélité ancestrale
Entoure les chanteurs
Dont les voix s’étendent à l’infini jusqu’aux premiers murmures du temps

Le bandir
Solitaire
Fleurit les âmes suspendues aux astres
S’harmonise avec les claquements des mains des femmes envoûtantes
Qui tracent les gestes et les sons de leurs traditions
Dans le sillage des couleurs de leurs robes éclatantes d’amour


L’héritage rythmique gardé en secret dans les cimes des montagnes
De l’autre versant de l’histoire
Se prolonge toute la nuit

L’instant se détache de la réalité par ses nuances mélodieuses
Reprend les mots clamés par les poètes des montagnes
Accompagnés des murmures des arbres enflammés de fraîcheur
Ils dénouent les symboles tissés dans le mystère
De la blancheur immaculée de leurs capes
Pour les offrir à la brise du soir brodée sur les étoiles

L’espace en délire couvre de son épaisseur tous les chemins des tribus
Assoiffées d’entendre le testament de leurs aïeuls
Tatoué dans les frissons des corps en transe
Et qui résonne dans chaque goutte des sources de la vie

Le cèdre énigmatique
A la recherche des premiers lueurs du jour
Interroge la nuit réfugiée sous les tentes
Dressées  dans le  cœur  des hommes

Il cueille les ondes des amours  construits
Dans chaque feuille d’arbre planté à travers les siècles




Un duo s’interpelle

La femme chante

Lorsque ta mélancolie me blesse
Mon cœur se  décompose et se  mue en une infinité d’émotions
Que je ne peux endiguer
Je me noie sous cette violence  qui m’entraîne dans ton mystère
Puis me rejette dans l’océan de ton regard

L’homme répond

Aux premiers murmures des caresses de tes doigts
Je m’accroche à la  fluidité du temps
Au chant de ta chevelure
A l’éclosion de ton soupir
Au bruissement des battements de tes cils
Mes sens répondent à la résonance des balbutiements de tes lèvres
Par une montée de la rosée du désir

La femme enchaîne

A l’orée des promesses puisées dans la magie des mots
Ta sensualité s’agrippe à la tendresse

À l'aube
Les lumières s'éteignent
Le c hant se repose sur la verdure des sentiments
Veillés par l'espoir du lendemain
Et la chaleur des étoiles





textes  et créations

Aissa Ikken
JUIN 2008


Créé le 1 mars 2002

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