Le Salon de lecture

 

Des textes des membres de l'équipe ou invités surgis aux hasard de nos rencontres...







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dans la tanière du loup
Jean-Marc La Frenière





Le Nid

Un oiseau a fait son nid dans ma boite à malle. Je l'ai défait. Il l'a refait. J'ai du faire un nid tout à côté pour recevoir mon courrier. Peut-être qu'une lettre pondra des mots d'amour.








Quand je ferme les yeux
c'est encore toi qui rêves derrière mes paupières.
Je n'irai plus pour toi dévaliser la mer
ni faire le marché dans les plis du soleil.
Je n'irai plus pour toi fleurir le nid du cœur
ni ramasser des oeufs qui gisent en débris.
Je reste seul debout sous le mépris du temps
avec ta mort stupide qui enfle dans mon coeur.
Couvert d'ombre et de larmes
je n'y suis pour personne.
Je ne frappe plus aux portes
pour réveiller les hommes.
Mes mains ne servent plus
qu'à chercher ta présence.
Mes mots ne servent plus qu'à dire ton silence.
Tout ce qui manque au monde
y manque plus encore.
Je me perds de vue
comme un vêtement sans corps.


tiré du recueil "L'AUTRE VERSANT "
Editions Chemins de plume





Je suis qui je suis

Je suis ce que je suis. Je suis ce que j'entends.
Je suis ce que je vois. Je suis ce que j'écris.
Je ne suis pas le troupeau mais la peau et les os.
Je passe les frontières par les chemins de contrebande.
Je ne suis pas la ligne mais la mine du crayon.
Je suis le fou sans roi sur le damier du monde,
la bouche de la soif dévorant la lumière,
la langue de Villon dans le brouillage du temps,
une fleur de bitume qui cherche ses racines.
Je ne sais pas si je grandis.
Je ne mange pas à la table des grands.
Je couche dans l'étable.
Je bois à l'eau des dégouttières.
Je suçe un glaçon pour apprendre l'hiver.
Je veux toucher le ciel avec un doigt d'enfant.
Dans les mots que j'écris
il y a des acrobates sur une patte
qui font la courte échelle,
des aveugles dessinant pour les sourds,
des muets qui chantent pour les morts,
des fleuves qui aboient sans laisse ni collier.
des singes debout comme au début de l'homme,
le visage d'un ange entre deux mitraillettes.
Je suis ce que j'ignore. Je cherche qui je suis.
 




L'insoumission

On se soumet aux riches, aux dieux, aux horaires.
Pourquoi pas aux pierres, aux nuages et au temps ?
On se soumet aux ordres, aux drapeaux, aux slogans.
Pourquoi pas aux mots, au rêve, au hasard,
aux pauvres, aux parias, aux enfants ?
Pourquoi aux pluies, au soleil et au vent ?
On se soumet aux trusts, aux banquiers, aux notables.
Pourquoi aux morts, aux lézards et aux tables bancales ?
On se soumet aux cons et aux bulletins de nouvelles.
Je me soumets à la révolte et à l'insoumission.











Au lever du soleil

Je t'aime au lever du soleil,
au zénith, au couchant,
du crépuscule au nadir
et d'aval en amont.
Je t'aime du nord au sud,
de l'est à l'ouest,
de la grotte de Lascaux
jusqu'à l'Eldorado,
de l'eau qui brûle
jusqu'au fleuve sans lit.
Je t'aime de la base au sommet,
de l'image dans l'ombre
jusqu'au révélateur,
de la mémoire à l'acte,
de la parole au geste.
Je t'aime de la pierre au poème,
de la terre entre nous
au clair de tes yeux,
de l'épeautre à l'épaule,
de la plaine à la mer
là où la source perd son eau
pour devenir la vie.
Je t'aime à l'improviste,
à l'imprévu, à la chance,
du trait d'encre à l'épure,
des images en éclats
au vitrail du ciel,
de l'infime à l'immense.
Je t'aime de jour en jour,
de plus en plus,
de mieux en mieux,
de mon ombre polaire
jusqu'à ton cœur solaire,
de mes bras à tes mains,
de l'espace à l'espoir.
Je t'aime à l'impossible,
du corps jusqu'à l'âme,
de l'archet au violon,
de l'arbre à la musique,

de la tige à la fleur,
de la vie à la mort.
Je t'aime à l'infini,
de babord à tribord,
de la soif à la source
et du réel au rêve
comme la terre boit son eau.



photos/Gert et peinture/Armillaire

textes
Jean-Marc La Frenière


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JUIN 2009


Créé le 1 mars 2002

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