Le Salon de lecture

 

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Le chant d'un été perdu

par

Lucia Sotirova

 

 


 



Dans les hautes herbes



Champs moissonnés, nudité dernière
la chaleur des tournesols à la dérive
n'est plus
les cigales replient leurs violons
sur les étés à venir
absence
de ton corps d'homme, ton corps d'eau
rivière imprévisible

sous la plume les syllabes transparentes
se sont tues
mais ô dans les hautes herbes
chavirent les lapins
ensorcelés par la flûte du fauve
dans les trèfles une faux aveugle tâtonne
les nids des perdrix

c'est comme si l'on chantait
les ossements blancs d'une lumière vierge
c'est comme si une main
qui n'est pas la mienne
pétrissait la solitude
à son image et ressemblance




 

 

 


Voie ouverte

(para haïkus)

La nuit s'écoule
sous une dune de lumière
au bord du sommeil

*

lente fuite d'horizons
lieu-aube d'étonnement
le long de tes bras

*

mes pas d'eau inondent
la pendule d'une horloge
qui ne chante plus

*

silence clandestin
entre deux solitudes
il n'y a personne


 

 



A contre sens


Je ne voyage jamais
loin loin loin ton pays de chlorophylle insomniaque
ces vers te parleront de mon Sud en dérive
les champs de tournesol languissent de toi
s'échappent déferlent sur les rumeurs du quotidien

pourtant ton ouïr les effleure à peine

mes paroles marchent étrangères
à travers les poèmes à venir
la langue dans laquelle je m'exprime
contient des galaxies vierges et frileuses

engendre le mutisme ancestral

où regard et voix se séparent
espoir et doute, quintessence et néant -
métamorphose du Tout immortel
que mes sens projettent et confirment
et par qui je suis définie et comblée

mais c'est pour toi que j'anime ces chimères
homme de vent, passager
toujours un autre élancé vers l'instant palpable
c'est pour toi que je joue la pantomime secrète
les gestes du commencement
j'écris la perpétuité des chemins et leurs promesses
je te rejoins dans la musique des sphères -
humbles cellules flottantes
chuchotant nos corps de fougères
transfigurés par la lumière de l'accouplement absolu


07.11.2004




 

 



Automne à Sofia


à Georges

Eté, paradis perdu
ta dernière pluie lave
les âmes encore vertes
des marronniers
la ville porte l'empreinte de l'eau
c'est mon signe
c'est bon signe
la flaque en forme de coeur
devant ma porte

Je plonge
dans la fraîcheur du matin
peuplée soudain
d'un chat au nez humide
et aux pieds nus
d'une rose trémière
qui tourne sa tête mauve
et m'interroge muette
et d'une gitane
qui balaie le trottoir
et ne regarde personne

Un rayon de soleil
brille au hasard
dans mes yeux tout flotte
le coeur d'eau
le chat
et les rues
parmi les âmes
des marronniers

*
(aujourd'hui il fait un temps superbe !)




 

Lucia Sofia Sotirova


 

Créé le 1 mars 2002

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