Le Salon de lecture

 

Des textes des membres de l'équipe ou invités surgis aux hasard de nos rencontres...








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Triplex Nomine

La naissance des oiseaux
suivi d'un poème pliable




 





Naissance des oiseaux XI

C'était la nuit en coupe où boire son absence
enragé de son manque et moi perdu de moi
en allé à ses monts et vallées à son nom
enlacé elle en mon tréma entremêlée
aux neiges de mon ventre en tourmente pour elle
moi d'elle torsadé d'elle nouée en pluie

C'était la nuit en coupe en souvenir du jour
où drapé de son corps elle vêtue de moi
et moi d'elle tressé d'elle à moi amarrée
où voguant à son eau elle en lames de fond
où livré à l'écume elle en vagues languides
où tremblant sous ses mains elle en pluie torrentielle

C'était la nuit en coupe et violente beauté
d'elle les bras au ciel moi en racines d'elle
de moi en lèvres d'elle en lever de la lune
d'elle en neige flambée en couronnes d'éclipse
et en poignards plongés dans ma blessure d'elle
blessée aussi de moi endolori d'aimer

C'était la nuit Phanès veillait le serpent d'eau
enroulé à son corps Eros en sa vigile
égarait notre songe aux layons de ses bois
et poussé de la terre il montrait son visage
en chair et feuillage en arbre privé d'écorce
en cri de soif au ciel pour la pluie à venir

C'était la nuit tirée en rideau de nos pluies
et nos mains au travers en lunes ruisselantes
en corps mélangés d'âme ou fleuves en merveille
et nos mains à travers pluie font lacis de foudre
nos mains en entrelacs sont d'elle de moi et d'ailes
déployées et tournoient cibles navrées d'Eros

C'était la nuit où sabre au clair les mots fleurissent
d'elle en sang de lui d'elle en sang de moi sans elle
comme versé au creux des mains pour nulle lèvre
moi-même décoché en flèche qui me saigne
versé au fond du ciel je retombe sans pluie
et m'habille de sang - vêtu de toute absence

C'était la nuit grisée de lune en liqueur d'elle
en neige fondue d'elle ardente et vif-argent
en sable blanc grainé pour l'appel de l'écume
sable et verre étamé miroir d'elle en soleil
et moi à ses monts et vallées sentir son souffle
frémir chair et feuillage en joie tirelirant

la naissance
des oiseaux






 

 



Naissance des oiseaux XIV

Au lacet de son feu au lacis de ses veines
ensablées dans la cendre enlacées en racines
mes mains en tremblement mes mains vont gémissantes

Sur mes mains détrempées coule l'âme jaillie
en fleuve et sang écrit en rouge éclat de l'eau
en cavale alezane arrachée à la terre

Ses flancs vacillent se marquent de rouge et s'ouvrent
- Beauté éperonnée saigne en estafilades
en fleuve et sang écrit de mes mains pour que vienne

la naissance
des oiseaux





 



Naissance des oiseaux XVIII

mes mains ses courbes et mes mains
en mer ébahie rouge d'algues
et vorace de lunes
mes mains ses courbes en mes rêves
et maintes pluies au rouge aigu de ses roses
et maintes lunes
au puits de l'oracle
ou veinées ou
effrangées dans les eaux
et les mains pleines d'astres
une lune à chaque doigt
les mains portent la coupe gorgée d'oiseaux
où diluvienne en ses courbes découvertes
la mer ébahie rouge d'algues
devient elle-même courbe de ses seins
à mes mains envolées à tire d'ailes de sa robe inverse
et se fond au ciel d'eau
ou se tort en chevelure mouillée
dans le sang de ma terre et la sienne
mes mains et ses courbes
et ses seins comme vagues c'est
la mer soulevée en dômes de Lune c'est
la terre enlevée vers ma langue tendue c'est

la naissance
des oiseaux


 




Naissance des oiseaux XIX

D'azurée mémoire et de songeuse étoile
je disais le poème éperdu de désir
je disais le dieu vif sous son masque tissé
de rides et de pluies je disais il s'éjouit
des semailles de feu et du soc qui chavire
toute la terre éprise et du soc qui chavire
la femme féconde et toute prise à son feu

Sous son masque tissé de rides et de pluies
le Frémissant s'éjouit des noces de la vigne
et du sang et s'éjouit de ces mots que le vent
porte de ces mots qui germent dans la matière
grise qui grise de vin se gonfle d'azur
et devine le lien qui l'unit à la terre
et devine le rêve infondé du divin

Je disais le poème et ses poignards de brume
loin plantés dans ma chair excédant ma douleur
je disais le désir ailes déployées d'elle
humide et brûlante et languide amante ô Muse
ma Cendre inouïe versée en murmure de pluie
et son pas sur mes vers comme une danse nue
pour elle je dirai

la naissance
des oiseaux





 



La Baume de Ronze (poème pliable)

Baume de Ronze ouverte ô mes veines de vert
sous la percée du jour à travers le feuillage
pluie des feuilles versée goutte à goutte à la pierre
dans Son sexe de roche au silence du vert
pierre évasée qui se perce aux perles de l'eau
et toujours chute infime en arbre-pluie inverse
arbre surgi de pluie venu de goutte en pierre

mon amour

à lui-même se lie de la terre à la terre
et l'arbre à mi-chemin du ciel se lie à l'autre
entrailles creusées d'eau au grand labour du temps
et semence du sang de mes veines offertes
goutte à goutte versée ô pluie lente et solide
voie lactée douce aiguë d'étreinte minérale
en versement de lait au ruisseau de la pierre


 


 

Créé le 1 mars 2002

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