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Mélisou Marie, sélection
décembre 2008 elle se présente à vous
« La terre est bleue comme une orange Jamais une erreur les mots ne mentent pas Ils ne vous donnent plus à chanter Au tour des baisers de s'entendre » Paul Eluard J’ai vécu longtemps face
à la vie et, avantage sur quantité
d’inconvénients, je n’en ai jamais saisi les règles
précises. Ni les pousses, les extrémités, les
assurances, les sacrifices, les saisons suivantes, les mains molles et
sans résistance ; encore moins les disparitions. Quand la
destinée referme des bosquets.
J’ai vécu longtemps face à la vie et ses épreuves-types. Un fouet, une hache, un bourreau. L’emprise, les serpents, la magie. Sans oublier, les difficultés. Ni le flagrant délit. Putain de force de volonté ! Je respire, je m’arc-boute, je me noie quand même. Ou l’on me brûle, sur ce bûcher préparé si longtemps à l’avance. On a tous un bûcher prêt, pour notre pire cauchemar. J’ai vécu longtemps face à la vie et ses actes remarquables à noter se comptent sur les doigts d’une main. Du plus ancien au plus récent. Délicatesse. Souterraine. Mûre. Affamée. Mystérieuse. Sachant que le bout du monde est ici, tout à côté, sinon en nous et qu’il faut bêcher, bêcher encore, pour trouver son propre trésor. J’ai vécu longtemps face à la vie et, ce qui m’étonne en elle, c’est son désordre, son art de l’estampe ou sa nonchalance pure, le contraire du fond de l’âme qui existe. Cela s’échappe s’étale, vif et brillant, au passage de passes d’hommes de-ci de-là aux téléphones et oreilles prolongés, à la sensibilité en forme de point d’interrogation. Ou le manque d’élégance naturelle est claquement de porte sans prévenir. J’ai vécu longtemps face à la vie et j’ai été dévorée toute crue. Ma mémoire saigne encore. Les anges viennent lécher les plaies, mais à la croisée des univers, ils retournent s’endormir et je reste à vif. Tant de pierres pendent à mon cou, tant de ruelles que l’on foule, tant d’abreuvoirs vidés, tant d’heures en partance, tant de mots envolés qui résonnent. L’océan écarquille mes idées de beau et je m’allonge à même le sol, avec l’idée douce, non point folle, ni résignée, d’y arriver. Un silence rond envahit l’air cristallin. J’ai vécu longtemps, à gauche et adroite, pourtant je suis née hier, la mélancolie m’habite déjà. Le gravier crisse, mon ombre s’endort.
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Créé le 1 mars 2002
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