COUP DE COEUR
Sur le
livre d'Alessandro Baricco, "Soie"
Traduction Françoise Brun
Éditeur Gallimard
Une centaine de pages, un style lyrique et sobre, une histoire complètement
abracadabrante, un héros malgré lui, de nombreuses répétitions.
Voilà un mélange surprenant, et pourtant...
Et pourtant, la mayonnaise prend; pas un instant, on ne croit à ce
récit onirique, pas un instant on ne peut le quitter. Il se trouve
dans les voyages évoqués et dont il n'est dit que l'essentiel
un parfum de mystère. Le Japon, juste avant l'ère Meiji, ressemble
à celui d'aujourd'hui, avec le délicat qui côtoie le
cruel. Le parcours du personnage central, plus intérieur encore que
géographique, trouve chez le lecteur d'étranges résonances.
Voilà un héritier de Buzzati, le meilleur, celui du Désert
des Tartares, et un livre qui fait penser à Mishima. Les redites ont
des vertus incantatoires, elles introduisent une dimension poétique
à l'ouvrage.
C'est un conte, tel que je n'en ai pas lu depuis des lustres, le lire a été
pour moi un choc, de ceux que je connais une fois l'an, et encore, les bonnes
années. Un des derniers, c'était "Disparu sans laisser d'adresse".
Cette fois, le dit et le non dit s'emmêlent, on est plongé dans
les méandres du vrai, de l'imaginaire et du supposé. En si
peu de pages, comment Baricco peut-il parler de l'amour, de l'aventure, du
désir, de la vie et de la guerre sans qu'on ait jamais le sentiment
de banalité?
Comme j'aimerais que celles et ceux dont l'avis m'importe me disent ce qu'ils
en pensent. C'est mon épouse qui a la première pris connaissance
de la Soie et elle me l'a conseillé. Il est rare, quand l'un de nous
s'enthousiasme pour un livre, que cette passion soit partagée entre
nous. C'était le cas ici. Grâces soient rendues à l'auteur
et à son excellente traductrice.
par Armel Bazin
pour francopolis
novembre 2004
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