Revues papiers, revues électroniques,
critiques et coup de coeur du livre.








 
actu  
  archives

 

 

 


Du coté romanesque:

GLÖGG d’Anne Maillé 
par Christian Degoutte


Ne tournons pas autour du punch (Glögg n’en est pas un) : si vous n’aimez pas qu’on vous prenne par la main, comme un enfant, pour vous entraîner les yeux bandés sur un chemin inconnu, ce livre n’est pas vous. Maintenant pour les autres : matériellement ce livre semble composé de nouvelles (24) ; on peut même les lire, une à une ; chaque nouvelle est un instant mystérieux, énigmatique, onirique au cours duquel réel et imaginaire s’entrecroisent ; mieux, même : on passe de l’un à l’autre en changeant de phrase. Onirique, énigmatique ne veut pas dire hermétique. C’est écrit en phrases simples « Armée de ciseaux de jardinage, j‘ai tailladé tout ce qui se trouvait à ma portée. Je voulais tout atrophier, tout réduire en bonsaïs. De dos, je ressemble à une enfant de 10 ans. Je mange peu, beaucoup de crudités, et parfois, le soir, je m‘offre un petit cigarillo de La Havane, âcre et à la vanille», en général brèves, ce qui donne un rythme rapide, presque haletant parfois à ces nouvelles remplies de naines, de bègues, de gens qui rapetissent, qui s’envolent, de boiteux, de mères mortes, de pères partis, d’enfants qui ont perdu le nord. Ceci c’est le premier effet Glögg, mais quand on empile les nouvelles on est victime du deuxième effet Glögg : d’histoire en histoire, les événements se répondent « Au rayon parfumerie, Edith remarque une cliente qui a l’air de s’ennuyer… Brusquement, elle s’empare d’un parfum et le cache dans sa poche. Edith croise son regard et fait comme si elle n’avait rien vu » (p 55) et « Aujourd’hui je suis en colère, quand c’est comme ça, pour me calmer, je pique dans les magasins… J’essaie les produits, je traîne dans les rayons…j’attrape un flacon. Il est passé dans ma poche, je jette un coup d’œil. La blondasse me regarde droit les yeux. J‘attends sa réaction. Elle détourne le regard… », les événements s’emboîtent, les lieux se télescopent. Les personnages paraissent, ils se débattent devant nous, on les perd, on les oublie et v’an ils nous reviennent dans le pif des dizaines de pages plus loin. Qu’est-ce qui mettrait fin à tout ce bazar ? Ce qui a tous a manqué, d’une manière ou d’une autre : de l’amour.
GLÖGG pourrait faire un sacré livre électronique avec des liens associés aux noms, à certains mots clés, un livre comme un labyrinthe. Pour une lecture aléatoire. Sans fin.
En attendant on lit GLÖGG une fois dans le sens de la marche, puis à rebours pour retrouver (par ex.) où apparaît Papakino pour la première fois, ou Hugh (ils sont des dizaines), puis encore par bonds on tache de les suivre au fil des pages.

Décidément L’ESCARBILLE a le chic pour attirer des textes peu communs
(LA GNIAC de Nathalie Potain, LE DICTIONNAIRE JEANNE PONGE de Fabienne Mounier, pour n’en citer que 2)

GLÖGG d’Anne Maillé
(160 p, 14 €
éd L’ESCARBILLE - B P 92431 NANTES Cedex 3
***



Christian Degoutte
     pour Francopolis
mai 2008


Créé le 1 mars 2002

A visionner avec Internet Explorer