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Coup de coeur : Archives 2010-2011

  Une escale à la rubrique "Coup de coeur"
poème qui nous a particulièrement touché par sa qualité, son originalité, sa valeur.



 
( un tableau de Bruno Aimetti)


À Francopolis,
la rubrique de vos textes personnels est une de nos fiertés.
Elle héberge un ensemble de très beaux textes, d'un niveau d'écriture souvent excellent, toujours intéressant et en mouvement.
Nous redonnons vie ici  à vos textes qui nous ont séduit que ce soit un texte en revue, en recueil ou sur le web.


Poème Coup de Coeur du Comité
FÉVRIER 2012


choix d'Eliette Vialle...          Edmond Fayet
choix de Gertrude Millaire
...   Denis Emorine
choix de Michel Ostertag...   Jean Barbé
choix d'André Chenet...        Angye Gaona
choix de Dana Shishmanian... Frédéric Parcheminier
                





EDMOND FAYET
Edmond Fayet, (choix d'Éliette Vialle)

L’orée.

Au dessus de mon village
Un chemin
Une côte
Un virage
L’orée de la forêt
Une vue dominante
Prairies de tournesol
Champs moissonnés
Vignes entretenues
À perte de vue…
Au sol
La sauge
L’aigremoine
La centaurée scabieuse
La jacinthe des bois
Le bleuet des champs
Plus belles les unes que les autres
En l’air
Un couple de buses
Prend les courants ascendants
Et tracent dans le ciel
Des cercles réguliers
Un épervier vole sur place nerveusement
Il guette sa proie
Pour plonger d’un instant à l’autre
Des tourterelles roucoulent
Des palombes soudainement s’envolent
Des passereaux chantent
À ne pas en finir…
Une brise chaude
Et légère
Me rince le visage
Âme !
Viens te reposer !

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Sur Facebook



DENIS EMORINE

Denis Emorine, je découvre cet auteur de Théâtre, de Nouvelles et de Poésie. Je connais peu sa poésie mais ce poème m'a fait un clin d'oeil... peut-être que la froidure  est liée à ces instants de petits et grands deuils où on se sent orphelin. Je ne sais... (Gertrude Millaire)


Je déchiffre par-delà les jours
Les mots tuméfiés d’un instant.
Je détourne la tête à l’appel de mon nom
En pensant à tous les amis qui ont cessé d’exister.
Je suis orphelin de ceux
Dont j’ai toujours refusé d’inscrire la mort en moi
Sans jamais y parvenir
 
Nous sommes tous dépositaires d’un secret millénaire
Qui ne s’éteindra jamais
Jamais.


Visiter son site  
ainsi que notre rubrique Francosemailles
où Dana Shishmanian vous présente l'homme de théâtre.


JEAN BARBÉ

Je voudrais rendre hommage à un poète que j’ai connu dans le cadre du site Écrits-vains, il y a quelques années. Son nom ? Jean Barbé. Immense talent, non seulement de poète mais aussi de chanteur. Son œuvre est d’importance. (Michel Ostertag)

Les bécots

On s'est connus
( C’était hier)
Nous avions l'âge des ruisseaux
Nos baisers troublaient les bécots que sur l'eau font des éphémères
Nous nous aimions
Une rivière nous emporta
Comme un torrent
Comme deux bouchons dans le grand lit de la vie primesautière
Et les cascades bleues
Les bulles
Les roues à aubes des moulins
Et chaque galet se souvient de nos bécots
Ma libellule
Mais peu à peu
De ponts en ponts
De quais en digue où le flot s'use
Entre un méandre et une écluse s'évanouissaient les tourbillons
Et nous voici
Deux passagers
Lents et chenus comme des cygnes
Sur un grand fleuve rectiligne bordé de saules éplorés
Ce triste fleuve débonnaire
Où s'en va-t-il à ce vau-l'eau ?
Oh ! Redonne-moi un bécot et tiens ma main...
Voilà l'estuaire.

Je suis né sous un signe d’eau

Je suis né sous un signe d'eau
A l'heure où le jour croise la nuit
Comme un rocher qu'entre chien et loup
Lente la mer découvre à la marée

La vague va comme une main légère
Dans ses cheveux mouillés de goémons
Comme un baiser le ressac à son front
Tremble longtemps dans le cœur de la pierre

J'ai grandi les deux pieds dans l'eau
Aux souvenirs des rêves d'enfant
Les yeux flous et les lèvres salées
Je vais nager parmi des bulles bleues

La vague est là d'une main légère
Dans mes cheveux comme des goémons
Et les baisers du ressac à mon front
Tremblent toujours dans mon coeur lapidaire

Je suis parti un jour à vau-l'eau
Par le monde et les quatre horizons
Mais ce bon soir je reviens sur mes pas
Pour m'endormir au cloître des rochers
Où vient la vague avec sa main légère
Dans les cheveux mouillés des goémons

Résonneront à jamais sous ma pierre
Les longs baisers du ressac à son front
Vent

Là-bas c'est le vent qui remplit les blancs corsages
Des barques penchées sur la mer
Le vent qui souffle en courant d'air
Pour les bras tendus des moulins
Pour un nuage
Un cerf-volant
Un albatros
Des chevelures blondes
Des drapeaux tricolores
Et c'est le vent qui chante encore
La nuit venue
Dans les feuillages de guipure

Là-bas le vent toujours tiède vient réciter
Le credo des béatitudes
Mais en changeant de latitude
Il s'engouffre rapide et froid dans mon quartier
Et aux milles balcons grêlant les murs cradingues
Derrière où dorment des ilotes
Le vent fait sécher les culottes qui sèchent :
Ex-voto en patchwork sur ralingues.


Entendre quelques chansons
dans la
Boîte à chansons du site Écrits-vains


ANGYE  GAONA

Angye Gaona, (Bucaramanga, Colombie, 1980) poète colombien, membre de Prométhée et de l'équipe organisatrice du Festival International de Poésie de Medellín. (André Chenet)


Au long du canyon

J’emprunte le chemin du sternum,
je cherche l’origine de la soif,
je vais au fond d’un canyon aux parois argentées,
solides grâce au temps,
mouvantes pendant la crue,
pendant l’enfance, ère glaciaire.
 
Je collecte les radicelles de la pensée.
Je les charge sur mon dos érodé
avec l’oubli agreste qui s’échappe de moi.
 
Émergent
de petites grottes
les signes de la douleur ;
véloces ils trompent les regards
et retournent se cacher dans la peau du canyon.
 
Inscrites sur les parois
les coordonnées indéchiffrables
du rayon préhistorique
qui modela ma face.
Temps de la profondeur,
temps sans syllabe,
où je ne suis qu’un son
en marche vers la fatigue.
 
Je cherche une source
qui baigne la question rivée à mon histoire.
Je cherche la vie tout juste née
et je trouve la soif.
 
J’emprunte le sentier du sternum.

Traduit du castillan (Colombien) par Pedro Vianna
Site: Poésie pour tous

**
Les questions retentissent,
claquements dans les tympans officiels.
S’éveillent les noms harcelés,
les écartelés sans sépulture,
occultés sous la fange impunie.
Les noms se raniment dans les voix ;
les murs des prisons peuvent s’effondrer,
les trônes peuvent être pris,
les frontières se diluent,
si on invoque ces noms.
Aucune arme, aucun affront, rien,
ne devra répliquer à ces noms calcinants.

Extrait du poème Le volcan parle
        Traduction française de Pedro Vianna


Cañón adentro

Sigo el camino del esternón,
busco el origen de la sed,
voy al fondo de un cañón de paredes plateadas,
sólidas merced al tiempo,
movedizas cuando el aluvión,
cuando la infancia, era glacial.
 
Colecto las raicillas del pensamiento.
Las cargo a mi espalda erosionada
junto al agreste olvido que cae de mí.
 
Se asoman,
desde pequeñas cuevas,
los indicios del dolor;
veloces burlan las miradas
y vuelven a ocultarse en la piel del cañón.
 
Inscritas en las paredes,
las coordenadas indescifrables
del rayo prehistórico
que formó mi faz.
Tiempo de la hondura,
tiempo sin sílaba,
cuando soy sólo un sonido
en tránsito a la fatiga.

 
Busco un manantial
que bañe la pregunta adherida a mi historia.
Busco la vida recién nacida
y hallo la sed.
 
Sigo la senda del esternón






Suenan las preguntas,
chasquidos en los tímpanos oficiales.
Se recuerdan los nombres hostigados,
los desmembrados insepultos,
ocultos bajo lodo impune.
Se avivan los nombres en las voces;
pueden derruirse los muros de las prisiones,
pueden tomarse los tronos,
se diluyen las fronteras,
si se invocan esos nombres.
Ningún arma, ninguna injuria, nada,
habrá de replicar esos nombres calcinantes."


Extracto del poema Habla el volcán



Angye Gaona (Bucaramanga, Colombie, 1980) poète colombien, membre de Prométhée et de l'équipe organisatrice du Festival International de Poésie de Medellín pendant cinq ans. Elle a créé en 2001, le premier Salon international de la poésie expérimentale. Elle est également sculptrice. Elle a produit des nombreuses émissions culturelles à la radio. Elle exerce des activités visant à promouvoir la poésie dans sa ville natale. Ses poèmes ont été inclus dans des anthologies et des publications imprimées ou électroniques en Colombie et dans de nombreux pays. Plus récemment, un choix de ses écrits a été inclus dans une anthologie de nouvelles voix de la poésie colombienne publiée par l'Université de Monterrey (Mexique).
En 2009, elle publie son premier livre: « Naissance volatile » (Natalia Rendón illustrations), et participe à la Rencontre internationale du surréalisme, intitulée : «Le seuil secret » (Santiago, Chili), la plus grande exposition jamais organisée du mouvement surréaliste en Amérique latine.

Appel à la mobilisation
pour cette poète sur le site Danger-Poésie.
Cristina Castello, poète argentine vivant en France et amie d'Angye, lance un fervent appel de soutien à l'attention de la communauté internationale. Elle n'a que 31 ans, un talent fou et fait cause commune avec tout son peuple mais pour avoir dénoncer un génocide et des assassinats elle a été accusée de "Trafic de drogue", ce qui fait que si elle voulait s'enfuir de son pays elle  ne trouverait nul refuge à l'étranger, à cause d'un mandat  international qui serait élis.  A partir de maintenant, il est primordial que chacun d'entre nous veuille bien prendre une part active pour soutenir Angye Gaona avant le procès inique dont elle est l'objet.
Angye Gaona ou la liberté à tires-d'ailes





 FRÉDERIC PARCHEMINIER

Frédéric Parcheminier,
né en 1940, Parcheminier fait un début brillant vers le milieu des années 60, salué et encouragé par Raymond Queneau avec qui il forme le projet avant-gardiste d’une écriture interactive, où le lecteur peut intervertir les mots pour recomposer le poème à sa guise. Le poète sombre ensuite dans la schizophrénie et n’en émerge, partiellement, qu’après plus d’un quart de siècle, et pour seulement quelques années. Avec mon mari, j’ai eu le privilège de le rencontrer à plusieurs reprises dans cette dernière période de sa vie, grâce à son éditeur, Samuel Tastet (qui venait de publier également, en traduction française, le remarquable recueil Les ateliers de la poétesse roumaine Mariana Marin, décédée elle aussi peu de temps après). Ce recueil rassemble une sélection de la production poétique des années de folie hölderlienne de Frédéric Parcheminier. ( Dana Shishmanian )

ainsi soit

ma première

et unique

maison

surgie

sous le crâne

décollée

de son

arbre

dans le cerveau

entre les

synapses limpides

et fines

comme le tilleul

dans la lumière

la pensée

blanche

sans substance

est

ouverte à jamais

la seule

blessure


(Extrait du recueil Le carré des cinq lieus (Éditions Samuel Tastet, 1992). Cette première édition est épuisée.

Christophe Chabbert

FRÉDÉRIC PARCHEMINIER, POÈTE DU DEDANS
suivi de Le carreau de cinq lieues par F. Parcheminier

Espaces Littéraires
LITTÉRATURE ETUDES LITTÉRAIRES, CRITIQUES

Cette publication est l'occasion de découvrir une écriture de la folie, inédite et
révolutionnaire, dans sa forme comme dans sa réflexion.


(offert en version papier er numérique)




coup de coeur de
 Éliette Vialle, Gertrude Millaire, Michel Ostertag,
André Chenet et Dana Shishmanian
 

  février
2012

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