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Ou les mots cessent de faire la tête et revêtent un visage.

 

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 GUEULE DE MOTS – ARCHIVES

(2010-2017)

 

 

GUEULE DE MOTS



Où les mots cessent de faire la tête et revêtent un visage...

Cette rubrique reprend un second souffle en 2014 pour laisser LIBRE  PAROLE À UN AUTEUR... Libre de s'exprimer, de parler de lui, de son inspiration, de ses goûts littéraires, de son attachement à la poésie, de sa façon d'écrire, d'aborder les maisons d'éditions, de dessiner son avenir, nous parler de sa vie parallèle à l'écriture...etc.

 

 

http://www.francopolis.net/rubriques/sakurai06.gifMai – Juin 2018 (1)

 

Libre parole à

François Minod

 

PALIMPSETE OU LES COULISSES DE L’HISTOIRE

 

 Je t'ai vu, tu essayais de me gratter.
 Moi?

 Oui toi, tu essayais de m'effacer en me grattant.
 Mais...
 Il n'y a pas de mais, tu voulais m'effacer et prendre ma place, en me recouvrant.
 Non, non, je voulais simplement dire avec mes mots d'aujourd'hui ce que tu disais hier.
 Tu croyais sans doute que je ne m'en apercevrais pas?
 Mais tu es toujours là, en filigrane.
 Tu parles, il faut vraiment arriver à me trouver après tout le nettoyage que tu as fait.  Heureusement qu'il me reste un peu de quant à soi, sinon il y a longtemps que j'aurais été totalement effacé, éliminé de l'histoire.
 Notre histoire.
Tu n'en as rien à faire de notre histoire. Ce qui t'intéresse, c'est d'écrire l’histoire en faisant comme si.
 Comme si quoi?
 Comme si c'était la tienne pardi. On appelle ça du plagiat.
 Ou du pastiche, peut-être. A moins qu'il ne s'agisse de parodie. Ou de transformation.
 Transformation de quoi?
 De toi, la source, l'original.
 Et pourquoi vouloir me transformer?
 Parce que c'est la vie, l'évolution, l'histoire justement.
 Et moi, l’original, là-dedans, qu'est-ce que je deviens?
 Toi, tu es, comment dire ?

L’Odyssée et moi je suis Ulysse, tu me suis?
 Hum...
 Pas d'Ulysse sans L'Odyssée.
 Encore faut-il qu'on le voit L'Odyssée.
 Pas la peine, il est présent.
 Où ça?
 En dessous, justement. Ya qu'à gratter un peu.
 Et si on ne gratte pas?

 Tant pis pour eux.
 Qui eux?
 Ceux qui ne prennent pas le temps de gratter.
Ils ne me verront pas?
 Non, car ils ne te méritent pas.
 Donc tu es en train de me dire que pour lire toute l'histoire, il faut gratter.
 En quelque sorte oui.
 Gratter jusqu'à l'original?
 Quelle histoire!
 C'est le cas de le dire. Une histoire hypertextuelle.
 Hyper quoi?
 Non rien, on verra ça plus tard avec Genette*.
 D'accord, je retourne dans mes coulisses.
 De l'histoire ?
 Exactement.

 

 

* Gérard Genette : critique littéraire et spécialiste de narratologie, auteur, entre autres, de Palimpsestes, la littérature au second degré, Paris, Seuil, 1982

 

 

©François Minod

texte inédit

 

Mai - juin 2018