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Ou les mots cessent de faire la tête et revêtent un visage.

 

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 GUEULE DE MOTS –ARCHIVES

(2010-2017)

 

 

GUEULE DE MOTS



Où les mots cessent de faire la tête et revêtent un visage...

Cette rubrique reprend un second souffle en 2014 pour laisser LIBRE  PAROLE À UN AUTEUR... Libre de s'exprimer, de parler de lui, de son inspiration, de ses goûts littéraires, de son attachement à la poésie, de sa façon d'écrire, d'aborder les maisons d'éditions, de dessiner son avenir, nous parler de sa vie parallèle à l'écriture...etc.

 

 

http://www.francopolis.net/rubriques/sakurai06.gifJANVIER - FÉVRIER 2018

 

Libre parole

à Dominique Zinenberg

 

Parfum d’hiver (extrait)

 

Ils restent des anonymes.

Ils ont vécu, ils sont morts.

Ils vivent encore, peut-être.

On ne sait rien d’eux

Ou plutôt, tiens,

On apprend que tel enfant aux cheveux noirs et encore potelé

Dont on ne connaissait pas l’existence mais dont les larmes des parents ne tarissent plus

Est mort. Il gisait sur la plage, rejeté par la mer.

C’est la mort d’un enfant.

Tout un chacun s’attendrit, s’émeut, est remué.

Mais pour autant, empêche-t-on désormais qu’une telle chose arrive ?

Les responsables ont-ils été écroués ?

La mer n’est-elle plus un danger ?

N’est-elle enfin plus un cimetière ?

Qui fait front ? Qui empêche les noyades ?

Ce qui gémit n’est pas le vent

Ce qui hurle n’est pas la lune

Ce qui sanglote n’est pas la mer

Ou désormais l’écho dans la montagne

Il faudrait plus d’une gifle pour nous réveiller d’un tel cauchemar

Il faudrait plus d’un cœur pour faire barrage à ces tueries.

 

Ils restent des anonymes

Agonisent ou survivent

Défient la mer ou la montagne

La neige et le froid.

Qui aurait l’outrecuidance de déclarer :

Ils sont inconscients ceux qui bravent les horizons sombres

De l’hiver !

Ils fuient les villes vides, les éboulis, les ruines.
Ils fuient les viols, les armes, la vie impossible

Sur la balance il n’y a plus que la mort ou la mort,

Mais aussi l’étincelle obscure de l’espoir qui les fait partir sans se retourner

Vers le froid, le manque, le danger, le rejet, la crasse et la faim.

Pas à pas même pour rien ils auront tout tenté et ceux qui meurent comme ceux qui respirent sont

D’étranges étrangers, d’infortunés étrangers, de drôles de héros décharnés, dépossédés et que

L’Europe opulente et peureuse

Rejette !

 

 

©Dominique Zinenberg

 

Janvier - février 2017