Voix enregistrée
de l’un des personnages.
– Les gens, ils croient, ils
passent leur vie à croire. On a beau leur dire que, ils continuent à
croire. Au début, on se dit, bon ils croient mais ça ne va pas durer, on va
être un peu patients, on va leur expliquer gentiment. Et puis, on
s’aperçoit que ça dure, ils croient toujours. Et parfois ça s’accroît en
vieillissant, comme si.
C’est cela qui est troublant. On
a pourtant tous les arguments, eh bien, ils n’en démordent pas, ils
persistent à croire.
Certains disent qu’ils ne
croient plus, que c’est fini depuis longtemps et tout et tout.
Et pourtant quand ils sont
seuls, loin du regard des autres, ils se remettent à croire, en douce, mine
de rien. Je le sais parce que là où je suis, j’entends leur silence, je les
entends tous dans leur silence.
Parfois, je les envie de croire,
je les appelle même pour croire avec eux, mais ils ne m’entendent pas, car
là où je suis, personne ne peut m’entendre.
Je me dis que je suis bien là où
je suis à entendre tous ces gens dans le silence de leur foi.
Il m’arrive même de rêver que je
crois et puis le rêve s’arrête, je redescends sur ma planète, et je
m’engouffre dans ma nuit.
F. Minod, Toc à Trac, suivi de Le déplieur,
Editions Hesse, 2011
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