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Pieds des Mots : Archives

(2010 - 2016)


 

  PIEDS DES MOTS
http://www.francopolis.net/rubriques/sakurai06.gifOù les mots quittent l'abstrait pour s'ancrer dans un lieu, un personnage, une rencontre...

Le principe des Pieds des mots
est de nous partager l'âme d'un lieu,  réel ou imaginaire,  où votre coeur est ancré... ou une aventure.... un personnage...

 

JANVIER 2017

 - Hiérophanies

 

Petits textes pour de grandes rencontres

 

         J’ai de prime abord hésité. Je viens d’entrer au musée Thyssen- Bornemisza pour déambuler dans les salles de la collection permanente.

         Dehors, Madrid est de lumière vive en même temps que les rythmes s’ordonnent en mesures méridiennes, lento ma non troppo. Je viens pour un rendez-vous, avec Santa Casilda de Zurbaran notamment, et un ange polychrome. J’aurai traversé la galerie des primitifs flamands pour me laisser guider ensuite par la chronologie et les haltes qui me ramènent dans le hall.

         J’aurai rejoint la cafétéria. Là, se prolonge la sensation de légère apesanteur qui associe ce lieu, quel que soit le musée, à l’entrepont d’un bateau ou d’un ferry. Il s’agit précisément d’accalmie après le vent et les embruns, état bienheureux consécutif à la partance. Le bruit du réel prend la régularité de la houle. Le regard fixe un lointain propice à laisser affleurer dans leur confusion les impressions que ne manque pas de susciter l’entrée dans le tableau. Le décor très sobre et le bruissement des langues étrangères complètent  la perception première. J’affirme que le thé ou le café y ont un goût particulier. C’est ainsi.

         A la caisse j’ai changé mon billet. J’ai décalé le rendez-vous avec Santa Casilda, repoussé la pause à la cafétéria. J’ai suivi l’oiseau sur l’affiche de l’exposition temporaire consacrée à Braque.

         Pourquoi avais-je définitivement associé ce peintre au compagnonnage cubiste avec Picasso et ignoré la part de l’oeuvre qui m’est révélée. C’est une exposition d’une juste portée, d’un goût sûr. Peu d’œuvres dans chacune des salles.

         Est-cela qui donne à la rencontre avec l’“Héracles” sa force, sa nécessité?

Dans la pénombre, le tableau inscrit sa matière noire que traversent des scarifications de lumière. On sait, aux lettres grecques qui le gravent, qu’il s’agit d’Héraclès mais  le héros apparaît plus clairement encore dans le mouvement des courbes androgynes et de la chevelure,  la presque naïveté du trait et l’incision du blanc. Silhouette de cordes et de spirales, il chevauche des éclats solaires que la matité du noir rend plus éclatants. Je resterai longtemps, puis je m’éloignerai pour y revenir. Sa provenance de la fondation Maeght  est un gage de rendez-vous futur. Je me plais à le penser.

©Mireille Diaz-Florian

 FRANCOPOLIS
janvier 2017