SQUARES DE PARIS
aux migrants
L’herbe était verte au jardin
public,
Mais il était interdit de s’y
promener.
Les vitrines sur les grands
boulevards
Étaient garnies des plus beaux
cadeaux
Qui soient. Mais attention pas
touche, sinon
Les Flics.
Tu veux apaiser ta soif ?
Seule la fontaine
Wallace peut t’offrir un gobelet
d’eau fraîche.
Tu es fatigué, tu veux prendre le
métro ?
Sans monnaie, tu marcheras à pied.
Paris est ainsi.
Il ne te reste que le ciel bleu ou
gris,
C’est selon, le rire des jeunes
filles flânant
Devant les bouquinistes, les
mendiants qui
Tendent la main, ceux-là qui
viennent chez
Nous de l’autre bout de la planète.
Comme toi.
Ne te sens pas rejeté, mais
seulement
Spectateur d’un monde qui ne t’est pas offert.
Frères humains, que sommes-nous
devenus ?
Square de Paris, poème dédié à nous
tous.
RUE
CORIOLIS
Connaissez-vous la rue Coriolis,
Pentue et d’équerre ? Celle
qui
Longe les voies ferrées de la gare
toute proche
Celle des départs en vacances.
Méfions-nous de ne pas se retourner
Trop brusquement : l’effet Coriolis
Pourrait vous faire perdre la tête,
Braves gens !
J’y monte le buste penché en avant
Et la tête parallèle aux murs
Je t’ai rencontré et je ne t’ai pas
vu
Bougre que j’étais, toi si
jolie, tu descendais
Virevoltante du haut de la rue. Le
lendemain,
Il pleuvait, j’avais un parapluie
et toi un parapluie,
Nos parapluies se sont rencontrés,
se sont
Entremêlés et nous avec.
Et depuis rue Coriolis, les jours
de pluie,
Nous sortons, toi et moi, chacun
avec une capuche
Sur la tête, bras dessus bras
dessous,
La tête bien droite.
MUSÉE
VICTOR HUGO
On marche sous les arcades,
Le cœur joyeux, l’esprit léger
On a rendez-vous avec un ami,
Un patriarche, le meilleur d’entre
nous,
Une idole, une icône, celui qu’on
aurait tant
Aimé connaître pour de vrai,
Le père Hugo
Nous allons entrer dans son
intimité,
Son bureau, sa chambre, son salon.
Il nous invite chez lui, il va
rentrer
D’une minute à l’autre. J’entends
déjà les clés
tourner dans la serrure de la porte
d’entrée, non,
je rêve, ce n’est que le gardien…
PARIS
DE LA COMMUNE
Paris commune qui fouette le sang
de l’histoire,
Le Paris qui excite les âmes
prudes,
Appelle à l’insurrection et déroule
les pavés
Des rues sous forme de barricades,
Qui croit à la justice universelle,
qui ne veut
Plus un seul pauvre dans la cité
Et qui n’a pas peur de présenter sa
poitrine
Aux fusils versaillais.
Ce Paris-là est effacé de
l’histoire, comme
Une marque de honte, je cherche
partout
Trace de ton passé, en vain.
Le Mur des fédérés, seul endroit où
je te retrouve
Il faudrait aller en Nouvelle-Calédonie,
Au bagne de Nouméa… mais je suis
vieux
Et je n’ai pas l’argent pour ce
voyage.
©Michel
Ostertag
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