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Coup de coeur : Archives 2010-2011

  Une escale à la rubrique "Coup de coeur"
poème qui nous a particulièrement touché par sa qualité, son originalité, sa valeur.



 
( un tableau de Bruno Aimetti)


À Francopolis,
la rubrique de vos textes personnels est une de nos fiertés.
Elle héberge un ensemble de très beaux textes, d'un niveau d'écriture souvent excellent, toujours intéressant et en mouvement.
Nous redonnons vie ici  à vos textes qui nous ont séduit que ce soit un texte en revue, en recueil ou sur le web.


Poème Coup de Coeur du Comité
DÉCEMBRE 2012


              
choix de Gertrude Millaire
...     Hélène Soris
choix de Dana Shishmanian...  Françoise Urban-Menninger
choix d'Éliette Vialle...            Ernest Pépin
choix d'André Chenet...          Angel Miguel Queremel
choix de Michel Ostertag...    
Nashtir Togitichi
                






ERNEST PÉPIN

M

Ernest Pépin,
né le 25 septembre 1950 à Pointe à Pitre Guadeloupe, habite actuellement à Lamentin, il est écrivain et participe à la revue : Vents Alizés Revue, choix d'Éliette Vialle

 

Nous sommes nés d'un miracle d'eau salée
Nous sommes nés de tout le bleu
de la vulve des volcans rouges
de ce tremblement d'ombres errantes
de toutes ces îles vorace du sang noir

(in Poèmes " Solo d'îles")




NASHTIR TOGITICHI


Nashtir Togitichi, ces trois textes montrent une palette poétique d’une grande originalité. C’est une belle découverte pour cette fin d’année, choix de Michel Ostertag

Rencontre
 
Pour répondre à ton sourire
j’ai pris un coin de ciel bleu
la fuite à l’orée d’un bois
et j’ai fermé ma fenêtre
 
Pour répondre à ton clin d’œil
j’ai baissé les paupières
interrogé mon dedans
regardé mes ornières
 
Pour répondre à ton annonce
silencieuse et complice
j’ai parcouru mon CV
bafouillé deux ou trois phrases
surpris mes pas perdus
secoué mes habitudes
 
Pour répondre à ton sourire
je ne savais pas quoi faire
 
 
 
 
La pleine saison
  
Des femmes marchent
Et passent dans nos vies
Ou demeurent en nous
Comme un souffle au cœur
 
On dort sur le sable
De l’espace partagé
Mais le temps du plaisir
Est trop court
 
Et le chapeau vole
Emporté par le vent
D’été ou d’hiver
 
Tout est clair
Tout est là
Effacé et présent
 
Pour vaincre
L’aigreur la tristesse
Atteindre la nostalgie
Des vieux jours peut-être
Tout ce qui peut
Etre encore
Vivre pleinement aujourd’hui
 
 
  
Sans rien dans mes poches

Je tourne en rond
Je perds mon temps
A marcher en rêvant
Somnambule éveillé
Cherchant ce que je suis
Peut-être rien du tout
Juste un cri
Mais non
juste un grognement
Dans la houle du Temps
Près de femmes connues
Dans les souffles qui s’épuisent
A la même cadence
Dans les notes oubliées
De musiques jouées
Dans les paroles échangées
Dans les mots perdus
 
Un jour un jour
Il y aura du sang partout
Ce jour
Il y aura de la douleur
Et le vent toujours
Qui emporte le Tout.

 
* Publication sur le site Capital des mots.




FRANCOISE URBAN-MENNINGER



Françoise Urban-Menninger, poète et nouvelliste, choix de Dana Shishmanian

roses anciennes

les villes où j’ai longtemps habité

me traversent aujourd’hui

elles ont mis leurs pas

dans ceux de ma mémoire

 

mes rêves ont pris forme

et s’accrochent aux balustres

de mes premiers souvenirs

fleurant bon les roses anciennes

 

que ma mère taillait

les soirs d’école où je rentrais

mon sac sur le dos

ma tête dans les nuages

 

l’écriture prolonge

par-delà les années

cette tige du silence

où fleurit l’âme alanguie


*************

jardin de ciel

jardin de ciel

sous ma peau de soleil

où l’herbe broute

jusqu’à la racine des ombres

qui nous font et nous défont

 

sous la chair vive de l’ennui

saille le cri inaudible

qui déchire l’invisible

quand je traverse les silences

ma mort en épitaphe


il gèle à cœur fendre

il gèle à cœur fendre

sous la peau de ma rime

où se blottissent les voix oubliées

de ceux qui ne sont plus

 

il gèle à pierre fendre

dans le cimetière des mots

où les ombres se figent

dans l’encrier des larmes

 


******************


nos pensées

quand nous ne serons plus

qu’adviendra-t-il de nos pensées

repousseront-elles dans les jardins

comme les fleurs du même nom

 

les vivants s'inclineront-ils

sur ces pétales infimes

saurons-nous leur faire signe

au-delà des mots

 

dans la transparence d’un poème

où l’air sera plus léger

que le fond des cieux

et où notre âme nue dansera

 

poème dédié à mon amie écrivaine Saime Bircan

 

 

Extraits du recueil De l’autre côté des mots, Editinter, 2012.

Françoise Urban-Menninger est poète et nouvelliste, critique d’art et de littérature. Elle contribue régulièrement à la revue littéraire en ligne Exigence Littérature et à la revue de poésie féministe Le pan poétique des muses dont elle est directrice du numéro 3 depuis septembre 2012.

Consultez son site :
Littérature.net
Pan des muses




ANGEL MIGUEL QUEREMEL


Angel Miguel Queremel, (Coro, Falcón, 1900 - Caracas, 1939) est un des plus importants poète du Vénézuéla, choix d'André Chenet


MANIFESTE DU SOLDAT QUI S’EN REVINT-EN-GUERRE

Sachez-le. Les balles perdues meurent dans la bouche des morts oubliés.
Je l’ai vu. Et j’ai vu aussi les fusils enterrés, ensemencés par la pluie
pousser et fleurir dans la fumée noire, et les alouettes nicher entre les faisceaux des baïonnettes

Sachez-le.
J’ai recueilli des pensées et des secrets calibre douze sous les casques vides
où l’eau croupie découpe encore un ciel de jour aboli.

Sachez-le.
J’ai écouté le vacarme des poitrines qui se fracassent comme des navires,
j’ai hissé les voiles de paupières blanches d’agonie, et j’ai trempé mes mains dans les eaux amères des océans célestes peuplés d’archanges-capitaines.

Sachez-le.
Je le connais le froid de ces mains crispées qui cherchent une pierre dans la carrière de l’aube et une croix éperdue dans le vol de l’hirondelle.

Je sais ce qu’est le souvenir qu’on attrape et qu’on mord à s’en déchirer les lèvres ; et crier son propre nom dans le silence des camarades qui ne peuvent plus vous répondre, ni vous reconnaître …

Sachez-le.
J’ai mangé la terre de ma sépulture comme un plat fait du premier miel du monde. Et j’ai compté les jours – et les nuits de lune indifférente - sur le calendrier de mes cicatrices.

Sachez-le.
Je connais l’impact de la balle qui frappe le corps du camarade déjà mort,
et ce que dit le vent qui pince la harpe des barbelés …

Sachez-le, camarades, et oubliez.
Oubliez. Oubliez. Oubliez.

Je reviendrai avec eux.
En vie je reviendrai, et même sans.

Emporté par les fées qui habitent la brise ou la verte chanson des accordéons,
emporté par les sanglots et les blasphèmes, dans la cohue des avenues et des carrefours …

Mais ne me posez jamais de questions. C’est un secret, camarades.
Un secret !

Sachez-le.

Angel Miguel Queremel, vécut plusieurs année à Madrid où il fréquenta les mouvements d'avant-garde durant les années vingt. Il fut influencé par la tradition moderne lyrique espagnole dans ce qu'elle a de meilleur mais aussi par le surréalisme. De retour au Vénézuéla il fut considéré comme le chef de file de la jeune génération montante des poètes. Il fonda sa propre revue (La revue Homonyme). Il est mort à l'âge de 39 ans n'ayant publié que quatre recueils de poésie et un livre de nouvelles.

 


HÉLÈNE SORIS


Hélène Soris, sa poésie fait toujours naître un arc-en-ciel, choix de Gertrude Millaire.

Juste une lueur

Je voudrais…

 
souffler sur ces graines cachées sous la paupière
trouver la clé qui ouvre la porte du fond
tracer une marelle avec des violettes
ne pas laisser mourir l'hiver

 
Cueillir des plants  de pluie aux nuages des jours

 
dessiner le passé
un arbre au paradis pour les ombres de brume
d'un grand chapeau de paille inviter le soleil

 
De la première fleur cueillie tombera un pétale…
comme une larme

 
L’horizon fissuré laisse place au vertige
Dis…
où choisir un sentier pour retrouver la trace d'une monnaie d'étoiles ?

 
Une échancrure dans la nuit
filtre un faisceau de silence bavard
se reflète sur les dents d'un vieux sourire




Coeur Encrier

Au fur et à mesure que les mots noirs

se posaient sur la virginité de la feuille

derrière le poète

une ombre grandissait

 

complicité de la plume assoiffée

du coeur encrier

qui s'allégeait de ses douleurs écrites

qui palpitait de ses amours tracées

 

devant l'âme

sur la table de chêne rongé

dans l'eau du verre bleu

aux lueurs de la lampe

se dessinaient les yeux...les fleurs.. La terre..

 

et les gouttes de pluie sur la vitre d'en face

étaient autant de larmes qu'il n'avait pas pleuré


**
Visiter son site Ombres contre Vent
Et venez la rencontrer, Libre est sa parole.




Coup de coeur de 
 Éliette Vialle, Dana Shishmanian,
  Michel Ostertag, André Chenet
et Gertrude Millaire
 

  Décembre 2012

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