UNE VIE, UN POÈTE

rencontre avec un poète du monde

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Vie-Poète -  ARCHIVES

 

 

Une Vie, un Poète :

Nadine LEFEBURE

 

 

Elle nous a quittés…

Un courriel de l’ami Christian Deudon, poète et comédien, nous informait, le matin même, du  décès de Nadine Lefebure, survenu le 12 octobre. Christophe Bregaint, qui a repris, avec Catherine Jarrett, l’animation du Territoire du Poème, l’a à son tour annoncé sur Facebook le même jour. Les amis ont réagi immédiatement, et nous avons pu lui dire au revoir le vendredi 21 octobre au crématorium de Père Lachaise.  Mais il ne faut pas chercher des échos dans la presse… même Internet est muet. Elle est partie discrètement, la grande d’âme...

La seule notice biobibliographique la concernant se trouve sur le site « Les amis de Jean Neuberth » d’où nous la reproduisons ici.

 au Club d’Essai du poête Jean Tardieu, Nadine Lefebure publie, entre autres ouvrages, Partances (1953 édit. Caractères,) ensemble de poésie en prose ; des romans, Les Portes de Rome, Les Sources de la Mer (Gallimard), et Le Chemin de Lato (Jean-Jacques Pauvert), et quelques ouvrages documentairess au Club d’Essai du poête Jean Tardieu, Nadine Lefebure publie, entre autres ouvrages, Partances (1953 édit. Caractères,) ensemble de poésie en prose ; des romans, Les Portes de Rome, Les Sources de la Mer (Gallimard), et Le Chemin de Lato (Jean-Jacques Pauvert), et quelques ouvrages documentai

Une notice trop discrète

Après des études de philosophie à la Sorbonne, sa participation au mouvement surréaliste La Main à Plume sous l’Occupation, la mise en scène du Chemin de Damas de Strinberg en 1949, joué pour la première fois en France, et ses premières pièces radiophoniques au Club d’Essai du poète Jean Tardieu, Nadine Lefebure publie, entre autres ouvrages, Partances (1953 édit. Caractères),  ensemble de poésie en prose ; des romans, Les Portes de Rome, Les Sources de la Mer (Gallimard), et Le Chemin de Lato (Jean-Jacques Pauvert), et quelques ouvrages documentaires.

Producteur à la radio (France Culture) elle écrit une cinquantaine de pièces, puis fera des centaines d’émissions : Histoire de la découverte du monde, Histoire de l’Inde, Histoire des Sciences, grands anniversaires. (ex : Gandhi, Jacques Cartier, Lapérouse, Kipling, etc.)

Tous ces travaux sont entrecoupés de voyages – Afrique, Inde – et surtout de navigations à voile qui l’entraînent des îles grecques en Manche, des Antilles au Canada, et jusqu’au Groënland.

Outre ses travaux personnels - romans, nouvelles, poésie - Nadine Lefebure s'est consacrée dernièrement à la mise en valeur de l’œuvre de Jean Neuberth, rencontré en 1966, et dont elle a suivi la carrière jusqu’à sa disparition en mars 1966. (http://www.jeanneuberth.fr/contenu.php?id=37 )

 

Sa présence sur le Net

Pour mieux la connaître, et encore la lire en s’imaginant l’écouter dire des poèmes de sa voix forte et claire, comme pour couvrir la houle d’une mer trouble :

 

http://www.francopolis.net/francosemailles/francosemailles-juin2012.html

http://larencore.blogspot.fr/2014/02/cetait-hier-apres-midi-le-territoire-du.html?m=1

http://www.francopolis.net/salon/LefebureN-Salondec2014.html (poèmes inédits)

http://lefeburedeudon.blogspot.fr/search/label/NadineLefebure

 

 

 

Nadine Lefebure au Territoire du poème

Au Territoire du poème, le 31 janvier 2014

(d’après le blog de Patricia Laranco)

 

Le Territoire du Poème du Vendredi 18 Novembre 2016 à 15h30 sera consacré à NADINE LEFEBURE

« LA CLAIRIERE DE NADINE »

Lectures, témoignages, découverte d’un texte inédit intitulé :

 

« ECRIS-MOI ET REGARDE LA MER»

 

(texte dit par Catherine Jarrett et Christian Deudon

A LA BRASSERIE « LE FRANCOIS COPPEE »

1, Boulevard du Montparnasse  Paris 6è  (M° Duroc)

 

 

 

 

Elle a largué les amarres

à  Nadine Lebefure

le 12 octobre 2016

 

Il était temps pour elle de nous quitter….

Elle avait trop tardé près de nous, enfants de la peur

elle la Dame de la grande mer

elle devait regagner le large

en finir avec cette cage même si dorée d’amour…

 

Le souffle du vide enfle ses voiles déploie ses ailes

un regard bleu nous fixe toujours

une voix nous agrippe nous empoigne l’esprit

une voix de tempête de lumière claire

une voix de vent et de paroles volantes

qui ne se retiennent pas sur cette terre

ne se clouent pas au sol

elles sont engendrées pour durer

par-delà les naufrages

qui nous attendent

elles portent le germe du Verbe

que nous ne connaîtrons pas

mais qui peut-être nous ensemencera ailleurs

à notre insu

 

Dana Shishmanian

 

Partance

À Nadine Lefebure, in memoriam

 

Nous sortons de l’hiver – rentrons dans l’hiver

nous sortons du fantôme – rentrons dans le fantôme

nous sortons de la neigée – rentrons dans la blancheur

mon visage est une lune inconnue – une lune cachée dans le noir

l’autre est personne et nulle part est son éternité

délétère comme l’hémoglobine d’un crépuscule

moby dick est un four pour des vérités non comestibles

le léviathan en est le chaos

le chaos X au centre duquel

je cuis, connu de personne

ou peut-être suis-je le noyau de toutes les parenthèses

qui me tiennent en suspens

nous rentrons dans le fantôme parce que nous n’avons plus

de place dans l’hiver

nous rentrons dans la neige parce que nous n’avons plus

de place en nous-mêmes

nous lisons ensuite les feuilles

non parce que leurs nervures cryptent des lettres

mais parce que le vent affile le bruissement qui les sépare

nous lisons le bruissement tel un texte à plusieurs voix

et sortons de l’enneigement des arbres

pareils à des syllabes solitaires,

nous fourrons dans nos poches la neige du possible –

le labyrinthe fond le long de nos jambes

et c’est ainsi que nous marchons sur l’eau…

 

Le pilote inconnu raconte dans l’obscur le mutisme des attentes

je suis le passager accroché à un parachute

qui discerne une échelle dans l’infini,

les autres se sont condamnés par réticence ou par dépression –

le vide les absorbe avec des lèvres de mort –

contraints par le système au seul péché irrémissible,

livides, exécutés déjà

l’un après l’autre,

-syllabes fauchées…

 

Je m’inverse en traversant des automnes non prononcés,

portes de noir, je vous contemple,

portes par lesquelles vous serez tous en fin de compte sortis,

les points se soustraient à la distance de la neige

sortant – balles sans but – du révolver de l’absolu,

les larmes ont épuisé la pitié

et l’éternité fauche avec son sourire de sécheresse

 

Le méconnu est une chanson inviolable

tous les textes s’effilochent dans un unique alphabet –

silence ou désert de parole –

nous sortons de la blancheur – rentrons dans la neigée

refroidis comme autant de fantômes,

personne ne ramasse tant de cendres ou de poussière,

tels des mouchoirs d’adieu s’agitent les étoiles

le noir seulement cache un espoir aux nombres effeuillés –

je suis parti, avec ma pâleur, de toutes les saisons

nous tous n’existons en fait que par le départ

le sourire est lame – et verrou – et réponse

sortie-entrée – paradoxe pleurant sur la patinoire asséchée –

la dernière voix est le coup de feu du couchant

nous sortons, oui, sortons de personne –

nous entrons, oui, entrons en nulle-part

 

Ara Alexandre Shishmanian

(Fenêtre avec esseulement, Harmattan, 2014)

 

L’auteur dédie ce poème à Nadine Lefebure, qui avait choisi de le lire au Territoire du poème, lors d’une séance dédié au recueil d’Ara Alexandre en janvier 2015, comme en écho à son propre recueil intitulé Partances (1952, réédition en 2014).