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CONTE 

MOHA ICHWA ET LE CADI ...

Moulay Tahar exerçait la fonction de cadi à Magamane, petite bourgade au nord de Goulmima qui a été le quartier général des troupes de My Hassan 1er lors de son expédition dans le Tafilalet. Il avait comme prérogatives de trouver solutions à tout problème qui se poserait entre cette population du haut ghriss et de veiller à ce que Ougoug (petit barrage de dérivation) soit entretenu permettant ainsi d’assurer l’irrigation de la palmerais N’Igoulmimen. Notre magistrat qui est très apprécié par l’ensemble de la population avait une fille d’une beauté sans égale! Des yeux noirs en forme d’amandes traduisaient dans leurs regards un grand potentiel sexuel à la limite d’une obsession ! Le corps élancé de la jeune fille qui venait de fêter les seizièmes printemps laissait apparaître la forme d’une forte poitrine qui serait le plus préféré des repose-tête d’un amoureux à cette beauté naturelle. La demoiselle ne cachait point de faire valoir ses atouts par des gestes, des éclats de rires d’une allumeuse. Le cadi lui même ne doutait point de la beauté de sa fille et toute visite d’un homme chez lui était suspectée. Mais ce qui le tourmentait le plus c’est qu’il était persuadé que sa fille ne serait jamais une femme fidèle qui se contenterait de son mari. D’ailleurs il en avait fait la confidence un jour à Assou Bou Wahrir, un jour qu’ils étaient seuls assis sur Tatoukante devant le ksar il raconta à Assou que son seul souci demeure dans la crainte d’être objet d’un scandale de mœurs dont l’origine serait sa fille ! Alors comment lui Cadi homme respecté devant donner l’exemple pour la population supporterait il un pareil scandale ? Le meilleur moyen d’éviter tout ça lui dit il est de n’accorder la main de sa fille qu’à un étranger du bled ! ! Ainsi on cas d’adultère de sa fille lui au moins il serait épargné d’un éventuel scandale. Mais les circonstances décidèrent autre chose ! Moha Ychwa tomba follement amoureux de Zenouba et décida d’en faire son épouse ! Quelques amis tout en mettant en valeur la beauté de Zenouba lui déconseillèrent de se marier avec elle. Elle ne sera jamais une bonne épouse pour toi ! lui dirent-ils. Elle est trop belle et puis surtout elle n’est pas quelqu’un qui se contenterait d’un coup tous les deux jours ! Ça se voit qu’elle serait une « broyeuse » d’hommes. Alors si tu n’as pas les reins solides et un souffle de marathonien écarte-toi de son chemin car non seulement tu risques de mettre en doute ta virilité d’homme mais d’être le plus populaire des cocus du bled car tout le monde le saura !
Moha, ne tint pas compte de tous les avertissements de ses amis, il décida d’aller le vendredi demander la main de la belle Zenouba.
A la sortie de la mosquée après la prière d’Le Asr le vendredi, Moha Ychwa habillé d’une djellaba d’un blanc immaculé, des babouches neuves aux pieds demanda au cadi s’il peut s’entretenir un moment avec lui ? Le cadi lui répondit qu’il serait heureux de l’écouter et lui proposa de l’accompagner à Tighazouine pour voir si le Khemass à finit d’irriguer le champs de luzerne. Chemin faisant, Moha s’adressa au cadi et lui dit.

Honorable Cadi, je me présente à vous pour vous demander la main de votre fille Zenouba !
Quoi ? répondit le cadi surpris. Et après un moment d’hésitation enchaîna par:
Serais tu à la hauteur de satisfaire ma fille ?
Oui honorable Cadi !.
Elle aime le confort et le bien être à Moha
Je le sais honorable et je veillerais à ce qu’elle ne manque de rien !
Elle adore l’argent et les bijoux et donnerait n’importe quoi pour en avoir !
Elle sera la plus parée de toutes les femmes honorables cadi
Et si ….
Quoi si ? Honorable Cadi
Nous allons parler entre hommes et je vais être franc et directe avec toi ! Je pense que ma fille fait partie de ces femmes qui ont un appétit dévorant sur le plan sexuel. Et je crains que malgré ta robustesse tu ne seras pas à la hauteur de son désir.
Mettez-vous en doute ma virilité Honorable Cadi ?
Non pas ça Moha ! Mais je ne veux pas demain me trouver dans une situation délicate essaie de comprendre ce que je veux ! Je suis presque sûr que d’une façon ou d’une autre ma fille te trompera ! Alors supporteras-tu la situation ou viendras-tu me demander de divorcer ?
J’essaierai de ne point être cocu honorable Cadi. Mais si votre fille allait jusqu’à être infidèle je viendrais vous voir pour divorcer !
Et c’est là le problème mon enfant. Car pour divorcer il faut que le cadi vienne avec deux hommes témoins constater de visu l’adultère !  Alors me vois-tu moi cadi venir constater ma fille en train de se donner à un autre homme que son mari ? Et quels sont ces deux autres hommes qui accompagneraient le cadi pour constater et témoigner de l’adultère de sa fille ? De toutes les manières si vous y tenez je ne peux que dire Amen, mais je vous aurais averti !
Message reçu honorable Cadi. Je ferais tout pour que ça n’arrive pas ! 
Et si jamais ça arrivait,  je tiendrais compte de votre avertissement, de votre statut de cadi et de beau père !

Un mois après, le mariage fut célébré avec éclat, on fit sortir le saroual taché de sang de Zenouba comme preuve de sa virginité et on dansa des heures devant la porte du ksar. Quelques semaines passèrent, notre mariée devient encore plus belle, ses hanches marquèrent plus de rondeur et elle n’hésitait pas à les faire dandiner en marchant. Elle prenait du plaisir à laisser apparaître une partie de sa poitrine encore ferme à chaque fois qu’elle se penchait pour remplir d’eau sa gargoulette. A chaque fin d’après midi Chani venait jouer au voyeur en contemplant ce qui apparaissait des seins de Zenouba à chaque fois qu’elle plongeait sa gargoulette dans la séguia.
Moha à chaque fois qu’il sortait de la maison donnait l’impression d’avoir couru un dix mille mètres. Les longues chevauchées quotidiennes avec Zenouba ne lui laissaient plus assez d’énergie pour les autres travaux des champs. Voyant que cette mise à l’épreuve était devenue contraignante, il décida de réguler son activité sexuelle limitant à deux fois par semaine ses rapports avec Zenouba. Ce qui comme on peut le deviner ne satisfaisait pas Zenouba et l’emmena à être plus bienveillante aux avances à peine discrètes de leur voisin Ali, et finit par le prendre comme amant.
Durant leurs rencontres galantes, Ali s’avérait un bon amant à la hauteur de ce qu’espérait Zenouba à tel point qu’elle le préférait à son mari. Avec lui elle se sentait libérée et donnait cours à tous ses fantasmes. Ali lui fit découvrir tous les préliminaires de l’amour, ce qui enflammait encore son ardeur et son désir. Elle attendait avec impatience l’appel du muezzin pour la prière d’le Asr, heure de sortie de son mari pour demander à son amant de la rejoindre dans son lit.
Moha Ychwa voyant l’ardeur et la sollicitude de sa femme changées commença à douter. Il décida de surveiller de près les alentours de son domicile, son guet ne fut pas trop long et ce premier jour de surveillance fut le bon. Il vit Ali raser les murs avant de rentrer furtivement chez lui. Bien qu’à moitié surpris, il reconnut au fond de lui même sa part de responsabilité dans cette situation vu son incapacité à suivre le rythme effréné que lui imposait Zenouba; mais cela ne l’empêcha pas de ressentir un pincement au cœur et il se rappela les conseils et les avertissements de son beau-père le cadi
A l’intérieur de la maison Zenouba et Ali se donnaient comme à l’accoutumée à leurs ébats amoureux ne se souciant de rien qu’à part se faire plaisir et vivre pleinement leur relation amoureuse. Leurs vêtements jetés un peu n’importe comment sur le tapis reflétaient l’envie de passer sans attendre à l’action. Les préliminaires ça sera pour la deuxième ou la troisième mi-temps ! Zenouba préférait étancher d’abord sa soif avant de prendre du plaisir à savourer le goût ! Tout d’un coup ils entendirent le bruit de la serrure quelqu’un essayait d’ouvrir la porte de la maison sans y arriver car Zenouba de l’intérieur a laissé la clé dans la serrure. Zut ! cria t'elle ! Ça ne peut être que Moha mon mari ! Elle jeta pèle-mêle ses habits et ceux d’Ali sous le lit et ordonna à son amant de se cacher sur la veille armoire, seul meuble de la chambre. Ali essaya de son mieux de se rendre le moins apparent, mais l’espace était exigu et laissait apparaître les fesses de l’amant. Zenouba gardant son sang froid se présenta devant la porte et l’ouvrit comme si de rien n’était !

Pourquoi es tu revenu si vite, toi qui devrais être aux champs lui lança t'elle ?
Je crois que je vais mourir ma chère. Je sens mes entrailles se déchirer, je pense que je suis en train de vivre mes derniers moments. Sans attendre Moha se dirigea vers la chambre à coucher, tenant son ventre entre ses mains et gémissant de douleur. Il se coucha sur le dos ferma à demi les paupières mais sans avoir au paravent repéré l’endroit où se cachait l’amant de sa femme.
Veux tu que je te prépare un breuvage lui lança Zenouba ?
Non chérie ça ne servira à rien. Je pense que je vais mourir! Que dieu te préserve ma chérie, toi ma douce moitié, qui n’aime que moi! Que deviendras-tu sans moi ? qui aimeras et qui t’aimera aussi fort comme je t’aime ? Aîe, aîe je sens que ma vie prendra fin avant ce soir ! Mais vois-tu chérie ce qui me chagrine le plus ce n’est pas de mourir car un jour où l’autre nous allons tous y passer, mais le fait de partir sans t’avoir fait donation de tous mes biens et j’ai peur qu’après ma mort les ayants droit viennent et te privent des biens que j’aurais aimé te laisser !
Ne meurs pas Misérable s’écria Zenouba ! Tiens bon au moins jusqu’à ce que tu me fasses don de tes biens, Tiens bon chéri ne pars pas si vite !
Et d’une voix d’un agonisant moha dit à sa femme : cours vite chercher ton père. Dis-lui que Moha se meurt et dis-lui d’amener avec lui de quoi établir un acte adoulaire. Mais surtout qu’il soit accompagné de deux témoins hommes pour l’authenticité de l’acte.
Zenouba prit de son armoire une djellaba et faillit faire tomber le malheureux amant toujours perché dessus. Elle l’enfila vite et courut chercher son père.
Quelques minutes plus tard Moulay Tahar accompagné de deux adouls fit son entrée dans la demeure de Moha précédé par Zenouba qui de temps à autre laissait sortir un petit gémissement.
Ma Ikoune bass a Moha dit un des témoins
Où as-tu mal demanda le deuxième homme?
Etablissons d’abord l’acte de succession avant de poser toutes ces questions qui peuvent attendre répliqua moulay Tahar !.
Alors que veux-tu léguer à ma fille? demanda Moulay Tahar à Moha
Khalaqua Allah ma yachae !!! répondit Moha
Que veux tu dire ? insista le cadi
Khalaqua Allah ma yachae !!! dit encore moha
Nous ne comprenons rien de ce que tu veux dire par Khalaqua Allah ma yachae !!! reprit le cadi. Pardi explique nous !
De ma vie je n’ai jamais vu cette horloge en forme de fesses sur ma vielle armoire !
D’autant plus qu’elle me semble bien réglée car elle vient de marquer l’heure avec précision par un petit «Tozz».
D’un même geste les trois hommes levèrent la tête et virent les fesses du malheureux Ali qui débordaient du rebord de l’armoire.
Et d’un bond énergique tel un félin, Moha se mit debout et dit en s’adressant au cadi : Veuillez consigner cher cadi ! Vous avez devant vous toutes les pièces du puzzle : la femme adultère, son amant, les deux témoins et vous le magistrat !
Moulay Tahar se rendant compte du traquenard, tira de sa choukara un registre et un stylo et rédigea l’acte de divorce en présence des deux témoins qui s’échangeaient furtivement des regards complices, contents d’assister à cette situation inconfortable dans laquelle s’est trouvé l’honorable cadi.
Après avoir fait parapher l’acte par les deux témoins il le remit à Moha et d’un geste sec, prit le baluchon de sa fille sur son épaule et demanda à celle-ci de sortir de la maison. Zenouba sans dire un mot marcha pour une fois devant lui et les deux adouls sans dandiner les hanches
Moha fit descendre délicatement Ali de son perchoir et lui dit d’un ton calme : Nous avons partagé la même femme … partageons maintenant un bon verre de thé et restons bons voisins! Ali ne demandait pas mieux lui qui s’attendait plutôt à être bien puni. Il s’habilla et jura sur la tête de sa future belle mère à Moha de ne plus courtiser la femme d’un autre..
Bien des années plus tard et à l’occasion de chaque rencontre les deux amis ne manquaient de pouffer de rire, Ali rêvant des fesses de Zenouba et Moha se rappelant les fesses d’Ali en forme l’horloge qui en plus à chaque heure faisaient :«Tozz» !!!


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Les adouls sont des religieux habilités à marier sous le double sceau de la religion et de l'état civil. D'un point de vue juridique, le mariage est consacré par la conclusion d'un "acte adoulaire" établi par des "Adouls" qui font office de notaires, en présence de témoins. Il équivaut à un acte de mariage et constitue le contrat fondateur de la famille.



Ali Sékou Ouidani
pour francopolis juin 2008
recherche Ali Iken


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Créé le 1 mars 2002

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