Billet d'humour ou ballade d'humeur
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Aglaé - Michel Duprez - Michel Ostertag...  et plus




FABLES

par Michel Ostertag

1.

Un homme avait deux amis


Un homme avait deux amis, l’un riche et généreux et l’autre modeste et pingre.
Il était souvent invité chez le premier où il était reçu avec les plus grands égards, les meilleurs mets lui étaient servis accompagnés des vins les plus raffinés qui soient. Pour remercier son hôte, il mettait un point d’honneur à l’honorer de sa meilleure conversation qu’il savait émailler de mots d’esprit et  de pointes de méchanceté comme il sied d’entendre à tous grands de ce monde.

Les rares fois où il était invité chez le second, il prenait la précaution de dîner légèrement avant n’étant pas sûr de manger à sa faim tant les plats étaient pauvres et les boissons rares. La conversation ne brillait pas par des sujets intéressants, le seul sujet qui était de mise tournait autour de l'argent et des économies que l'on pouvait faire en allant acheter ici plu¬tôt que là afin de  gagner quelques centimes d'euros.

Malgré leurs défauts, notre homme voulait garder ses deux amis. Il savait s’adapter à leur manière de vivre et quand il les invitait chez-lui il faisait en sorte de les mettre à l’aise. L’un arrivait les bras chargés de cadeaux tandis que l’autre venait les mains vides. Mais n’importe, il ne voulait pas le voir.

L’amitié comme l’amour est aveugle.
Heureux sont ceux qui en bénéficient bien qu’ils ne le méritent pas toujours.


***

2.

Riches et mendiants

Un riche est souvent plus riche qu’un autre riche, mais, à coup sûr, il sera moins riche que tel autre riche. De même de la misère : tel mendiant paraîtra avoir touché le fond de la misère, mais que vienne s’installer à dix mètres de lui un autre mendiant à qui il manquera un membre et aussitôt notre compassion ira vers ce dernier.

Diviser notre obole en deux parts égales est toujours malaisé et la pire des solutions serait le renoncement. Trop de malheur nuit à la générosité.

Penser que donner uniquement aux plus démunis au détriment  de ceux qui n’ont pas touché le fond de la misère consiste à plonger les moins démunis  dans la catégorie des plus malheureux.

Vous allez me demander quelle est ma solution. Je n’en ai pas ! Restons éveillé à la misère qui nous entoure chaque jour davantage et laissons notre cœur s’exprimer librement.

Un ami prenait le métro parisien matin et soir. Comme il était d’une extrême générosité, il n’hésitait jamais à donner son obole aux nombreux quémandeurs qui passaient de rame en rame à vendre une revue que personne ne désirait lire ou à jouer de l’accordéon dans le brouhaha du métro. Un euro le matin, autant le soir, à la fin de l’année la somme donnée était coquette ! Faisant ses comptes, il se reprit et préféra plonger la tête dans le journal gratuit qu’on lui donnait à l’entrée de la station que de répondre aux multiples sollicitations quotidiennes. Il n’eut aucun remord, d’autant que son patron venait de lui annoncer qu’il serait licencié le mois prochain. Victime de la concurrence asiatique, il était contraint par les banques à déposer le bilan. Un court moment, il se vit, à son tour, déambuler parmi les passagers du métro à vendre un journal pour chômeurs...

Il s’en voulut d’avoir été trop généreux.

Quand les gros maigrissent, les maigres meurent, il pensa à ce proverbe chinois. Mais il était trop tard, il était parmi les maigres qui allaient encore un peu plus maigrir.



* * *


FABLES
par Michel Ostertag
pour Francopolis mars 2015


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Créé le 1 mars 2002

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