Non je ne suis pas gentil
enfin si je suis sympathique, tendre, méchant,
lâche et courageux
je suis tout ce que vous voulez
mais je ne suis pas gentil
je ne suis pas l'indigène chaleureux
qui prend le temps de vivre
qui se prélasse sur la plage et qui joue à la guitare
sous les cocotiers
( d'ailleurs à la mer je n'y vais que trois fois pas an )
je ne suis pas le mec-des-îles
chaud lapin qui séduit toutes les belles filles
je suis pas celui qui n'est pas «tout a fait comme nous»
créature qui n'a pas 'les mêmes soucis que nous'
je ne suis pas quelqu'un de simple qui vit simplement
j'aime bien le fric et mon trip
quand cette foutue vie me flanque la nausée
est de lire Jean-Paul, Albert et l'Imam Ghazaali.
en d'autres mots je ne suis ni un fantasme exotique ni cet objet de
compassion
que vous découvrez – et la faut dire que vos accents de
générosité
sont temporaires -
quand la misère et ses catastrophes nous atomisent
je suis seulement un homme qui se démerde pour vivre
et non l'île n'est pas belle
enfin si les plages sont pas mal
et les paysages se laissent regarder
et puis le tourisme ramène une bonne dose de fric
qui remplit les poches des grands capitalistes
et fournit de l'emploi aux chômeurs
mais l'île n'est pas belle
(et qu'en savez-vous puisque vous résidez dans des hôtels
parfaits,
aseptisés et clonés)
car le mauricien a fait de la laideur un métier
existe-t-il un autre endroit au monde ou les maisons
ressemblent a des gâteaux d'anniversaire ?
certes c'est l'œuvre de nos nouveaux riches mais même la
bêtise a des limites
et nos villes sont affreuses
assemblage hétéroclite du minable et du médiocre
avalanche de bagnoles qui puent les exhalaisons de la cupidité
on se croirait dans un film de science-fiction post-apocalyptique
ici c'est le règne du n'importe quoi couplé au n'importe
comment
et la on ne parle pas de la corruption, de nos politiciens ou des
inégalités
cessez donc avec cette connerie
qui consiste à dire que j'ai de la chance de vivre là bas
dans les îles
non, c'est pas une chance
car ici c'est un bordel comme partout ailleurs
ni pire ni meilleur
et croyez-moi je ne suis décidément pas gentil
ni les autres mauriciens (ils ont la passion du coup de gueule)
sauf ceux qui sont payés pour vous sourire.
Aphorismes
Flirter ou l'art du sous-entendu à son paroxysme.
La nostalgie rend des couleurs aux passages médiocres
du passé.
La certitude d'être dans le Vrai est le plus grand Mal
qui afflige l'homme.
On est passé, en moins de quelques décennies,
de la femme-soumise à
la femme-objet. L'habillage a certes changé mais l'homme a
toujours
tout pouvoir sur la femme.
Le mariage signale l'inéluctable divorce de l'amour.
Le mariage. Avant : on vivra de pain et d'amour.
Après : on vit
d'ennuis et de malentendus.
On découvre notre mortalité quand on comprend
que certains rêves ne se
réaliseront jamais.
Le Temps a pour mission d'enlever la chair de notre
squelette.
On rencontre des femmes dont la conversation ressemble
à de la
publicité pour des produits de lessive.
On rencontre des hommes dont la conversation ressemble au
scénario
d'un film pornographique.
La mort est un outil éminemment démocratique.
Il fauche sans
discrimination aucune.
Cette foule qui, à l'heure des festivités, se
rue, comme une bête
sauvage, dans les lieux de commerce est l'un des signes inattendus de
l'apocalypse.
En tout athée il y a un potentiel croyant en
puissance et en tout
croyant il y a un potentiel athée en puissance.
Les yeux sont bien plus que le miroir de l'âme, ils
sont le miroir de
ce que tous les hommes ont en commun.
La mort de l'enfant signale le sacrifice de toutes nos
prétentions au sens.
Dieu créa l'homme puis lui insuffla l'Art pour l'en
consoler.
Le caractère uniquement tragique de l'homme tient
à ce qu'il croit
tout savoir alors qu'il ne sait rien.
Et voir son recueil
d'aphorismes.
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Umar Timol
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