Noël
pour tous
S'il est une fête chrétienne,
témoignage de solidarité et d'espoir c'est bien
Noël.
La Noël, c'est la fête bénie par excellence comme un
cadeau
que l'on offre à l'humanité, le don de soi autant que le
présent
symbole du partage. Il y a le père Noël et ses bras, sa
hotte
chargée de cadeau, le petit Jésus qui sous sa bonne
étoile arrive et nous présente un message de paix, de
concorde, de
présence aimante à l'autre, d'acceptation de la
différence
comme point d'appui au grandir de chacun.
Dans notre société
commerçante c'est la
fête
aussi, l'époque des cadeaux, de ces cadeaux que l'on attend, au
contenu
inconnu parfois, il fait briller les yeux des enfants, mais pas
seulement.
C'est aussi le cadeau offert pour recevoir un sourire, un rire, un
instant
de surprise. Ce présent nous dit que le monde réserve
encore
quelque chose comme un étonnement, découvrir, un espoir
de
vie en quelque sorte qui donne envie de vivre, de continuer joyeux dans
le
cour.
Enfant de cour nous les adultes en âge nous avons
encore
l'espoir de vivre cette fête, cette promesse de Noël comme
en
monde merveilleux qui inscrit l'avenir sous le signe chaud et reposant
de
l'amour simplement.
Le monde de l'entreprise s'est
emparé
de ce père Noël, occasion de faire un cadeau à
l'ouvrier.
Le comité de Noël généralement offre des bons
d'achat
pour les enfants mais aussi pour les adultes, cette redistribution
d'une
cotisation obligatoire ce fait par la poste, mais le plus souvent lors
d'une
soirée ludique, conviviale, lors d'une fête, d'un repas
spectacle.
Une culture en marche pourrait-on croire, un rêve d'enfant
rejoué
pour préserver l'esprit de "famille" de l'entreprise, tout le
monde se côtoie, se fait un sourire, un faire semblant qui ne
dure
que le temps d'un instant, celui de Noël.
Tout ce beau préambule à peine idéalisé
pour arriver là, là où le conte tourne à
l'aigre,
devient grinçant, cauchemar presque. Où des raisons de
violentes
colères pourraient s'exprimer, où presque "on pourrait
les
comprendre".
Ce beau conte commence
comme toutes
les années dans cette entreprise des rives de Moselle par la
préparation
du "cadeau-colis" de Noël. Ils pèsent son poids de
victuailles
et de boissons pétillantes afin d'agrémenter le repas
partagé
en famille. Porc fumé et alcool cette année. Que penser
de
ce beau colis quand, dans cette entreprise où travaillent 650
personnes, cinquante ont déclarée ne boire ni alcool ni
manger de porc,
suivant les enseignements de leur religion, deux cents autres sont
d'origine
musulmane.
Beau cadeau offert sans
arrière pensée (les années dernières ce
voeu avait été respecté), ou affront
délibéré, provocation, incitation
à la haine, mise en demeure de sa différence.
En effet l'année dernière un de ces cinquante, un de
"ceux là" a fait la demande au comité d'entreprise
"pouvait-il
avoir aussi de l'alcool ?". Cette année tous en ont.
C'est
la démocratie de la non différence, de la mise en tas
ridiculisante
et confondante.
Comment parler après du droit de vote, et y croire,
d'intégration si dans l'entreprise les ouvriers se renient entre
eux, est c'est là qu'il est possible de se rendre compte du
pouvoir insidieux de l'argent, de
la naissance, de la couleur, qui séparent ceux-là
même qui pour survivre doivent partir ou subir. Pour survivre
dans le lieu d'exil, dans l'entreprise il ne peuvent le faire que
collectivement en se respectant soi et l'autre en un difficile aller et
retour sur lequel se construit l'intégration.
Il est bien connu diviser c'est régner, on imagine dans l'ombre
de père Noël de la mondialisation libérale qui se
frotte les mains : "les guignols s'entretuent, tout va bien ! Je
conserve ma cravate
et le carnet chic de chèque de vie et de mort, tout va bien !
Séparez-vous,
battez-vous ! J'existe encore pour longtemps !"
Pas de morale à cette
histoire sinon que c'est toujours les perdants qui croyant gagner
écrasent
un "plus perdant qu'eux" pour tenter de se survivre un peu dans
la
misère, mais satisfait d'avoir fait quelque chose pour leur
faire
comprendre où est leur place à eux et tenir la sienne.
Philippe Vallet
décembre 2003
Vous voulez nous envoyer des billets d'humeur?
Vous
pouvez soumettre vos articles à Francopolis? par courrier
électronique à l’adresse suivante :
à sitefrancopcom@yahoo.fr.