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			 Illustration de couverture par Sever Miu Chaque mois, comme à la grande époque du roman-feuilleton, nous
			vous présenterons un chapitre du roman de l'auteur roumain Sever Miu,
 Des
			pas sans traces.
 Une invitation à découvrir ou rédécouvrir
			cette moitié d'Europe
 dont nous avons été longtemps privés
			et dont nous pouvons
 désormais réentendre la voix.
 Table
			des chapitres
 Chapitre 11b  : Chez grand-mère
			(deuxième partie ) 
 
			 
          								
					| Des pas sans traces
 
 Chapitre 11 deuxième partie
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			Présentation par l'auteur  "Des pas sans traces" est un roman-poéme sur le monde 
de 			l'enfance aprés la deuxieme guerre mondiale dans un faubourg 
de Bucarest. 			La Roumanie
 était sous l'occupation des Russes et dans
une période 			de la dictature
 totalitaire.
 Commencé en 1986, puis revu, complété, il est terminé
 			en 2003.
 La poésie de l'âme d'un enfant protégé par 
ses parents 			se tisse avec les
 événements réels, comme 
veut le dire l'édifiante 			priére de l'enfant du début 
:
 "Mon Dieu ,aide moi à porter 			pendanttoute ma vie mon âme 
      d'enfant".
 Dans ce livre,vous découvrirez des traditions,toutes lescoutumes 
      des gens
 pauvres, ceux qui formaient une mosaïque ethnique -Grecs, 
Italiens,
 Tziganes, 			Juifs, Bulgares .
 L'école élémentaire, 
      le collégeet 			la faculté sont trois sortes deharnais
 qui 
recouvrent et dirigent l'esprit 			de l'enfant.
 L'épilogue essaye de déchiffrer le sens de l'existence.
   
			
			
			
			********* Chapitre 11
 CHEZ GRAND-MÈRE (DEUXIÈME PARTIE)  Sur la radio pendait "la Jérusalem",une icône énorme qui
 -avec deux sacs defeuilles de laurier- venaient du
 pelerinage que l'arrière grand-père-Ilie Le Futé- avait
 fait à Jérusalem.
 L'ancien cabaretier du centre d'Obor avait vendu deux
 corps de maisons pour partir sur les traces des Passions
 de Jésus.
 L'icône qui occupait la moitié du mur,avait été fabriqué
 e récemment quand l'arrière grand-père l'avait achetée.
 Sur elle on avait écrit:Dimitri Keni ,1911.
 Maintes scènes bibliques peintes sont restées dans ma
 memoire, comme l'image du Jugement Dernier.Un pauvre
 mortel se tenait sous une balance flanquée d'un côté
 par un ange et de l'autre par le diable. Non loin
 du chérubin il y avait la Porte du Paradis,
 il est vrai encore verrouillée, à côté de Saint-Pierre
 prèt a l'ouvrir.
 Au contraire, dans le voisinage du diable,attendait le
 monstre impatient d'avaler le pécheur. Le chemin vers
 l'enfer était ouvert...J'avoue que l'image du monstre
 avec sa bouche ouverte, impatient d'avaler sa proie,
 a été, pendant longteùmps, le garant de ma sagesse et
 je crois que,depuis qu'il a disparu dans le
 brouillard des années passées,j'ai oublié decompter
 mes péchés...
 
 Dans les maisons de ma grand-mère j'ai frappé les deux
 balles symboliques de mavie- c'était un jeu et un grain
 d'univers...
 
 La première était confectionnée avec un soulier comme
 enveloppe et des haillons en son centre.
 
 Elle appartenait à Fuli,le petit-fils de de rousseur,
 les joues rebondies et le nez aquilin,coéquipier ou
 adversaire dans mes premiers matches de football.
 Je ne me rappelle pas nous avoir jamais entendu échanger
 des cris et des insultes pendant ces débuts sportifs.
 On préférait se crêper le chignon sérieusemment
 jusque sous les fenêtres des grands-mères d'où les
 menaces retentissaient plus fort que les alertes
 antiaériennes.
 La deuxieme"balle" qui a reçu un"shoot" de la
 contrée du rêve dans celle, aride, de l'astronomie
 à été... la lune.
 À la télé de Beca,j'ai visionné,quelques dizaines
 d'années après, l'alunissage des Americains.
 Il était plus facile pour eux de trouver la lune
 que le chemin vers nous.!
 
 Mon jeu était interrompu par les visites que grand-mère
 faisaitparfois. Alors,j'étais enlevé des rues et redonné
 à la civilisation.On allaitchez la Marraine-Mme Eleonora
 Haragea-l'épouse de l'un des premiers ingenieurs roumains
 avant que le programe d'industrialisation forcée ne soit
 lancée(programme dont il a résulté; que, dans la branche
 ont apparu aussi des ingenieurs de"sarmale"(boulettes
 de viande hachée,enveloppée dans une feuille de chou )
 comme mon père disait.
 Son mari était mort avant ma venue au monde et la marraine
 habitaitmaintenant avec une nièce-Jeni - épouse de colonel
 récemment épuréet passé" à peiner à la raison qu'il
 avait lutté sur le front russe.
 Le pauvre homme avait essayé toute sorte d'emplois,
 dont il était"avec vigilence répéré comme un "élément
 haineux " et vite licencié.
 Là, je rencontrais Carmen, la fille des Savescu.
 Tous l'appellaient,inexplicablement Gabi. Elle
 représentait pourmoi le petit morceau de cornichon
 confit qui me permettait d'avaler la grande cuillère
 à l'huile de foie de morue de la visite.
 Ils vivaient à Nerva Traian,dans une grande maison
 avec des colonnes à lafaçade,quelque chose de
 semblable au manoir de Scarlet O'Hara du film
 "Autant en emporte le vent",vu quelques années après.
 Après avoir monté les quelques marches du perron,
 on pénétrait dans une suite de chambres imposantes,
 pleines de miroirs,cristaux etmeubles de style une
 maison de boyard dans le crépuscule d'une existence,
 qui me communiquait de la peur,me poussant coller le
 visage de plus en plus sur la jupe de grand-maman...
 Une dame en noir,les traits fins et le cheveu grisonnant,
 serrés dans un chignon à la nuque, se levait avec peine
 du canapé en velours,trainant ses jambes gonflées;
 s'appuyant sur le batôn à pommeau d'argent.
 Elle nous souriait tristement:
 
 -Sois la bienvenue,Didina..as -tu apporté aussi
 le petit?
 
 Ses mains froides, pleines de bijoux,s'égaraient
 quelques secsondes sur ma houppe à peine peignée
 par grand-maman,aprèsquoi elle nous invitait à
 nous asseoir,d'un mouvement très élégant.
 Je me sentais gené,me cachant derriere le dossier
 de la chaise,et seule l'apparition de Gabi me
 décidait à quitter cet endroit.
 Elle glissait parmi les meubles du salon,habillée
 d'une petite robe bleue,pleine de volants,semblable
 à un liseron.Arrivant à côté de moi elle prenait
 ma main:
 
 -Viens voir ma nouvelle poupée!
 Bien sûr que la poupée ne m'interessait pas,
 toutefois je la suivais comme un chiot mené par
 la laisse. Je ne rappelle pas l'image de la poupée,
 mais seulement les cheveux chatains- bouclés
 de la petite, que je me retenais de caresser
 à grand-peine.
 
 Parfois,le salon était plein d'invités.On servait
 du sorbet de framboisesou de la confiture de noix verts,
 on buvait du café.
 De tous les personnages de ce monde, je me rappelle
 deux vieilles femmes, les lesjumelles-les demoiselles
 Paraschivescu, semblablement habillées,le pendant féminin
 des heros de Gogol-Bobtchinski et Dobtchinski.
 Quand elles entraient dans le salon, elles marchaient
 solennellement,à grands pas, se dandinant comme les
 cigognes...
 
 L'une d'entre elles avait étudié la médicine et je la
 regardais avec du respect et de la peur.
 
 Les piqûres avec péniciline que mon père m'administrait
 souvent,me déterminaient d'accorder àcette branche une
 estimation magique.J'avais entendu grand-maman,commenter
 ironiquement,que la doctoresse
 "n'avait pas ordonné une seule aspirine toute sa vie"..
 
 Elle aurait pu faire une carrière comme médecin de
 laboratoire ou d'épidemiologie,quelque chose hors de la
 médecine curative,mais en ce temps-là je ne me préoccupais
 pas de ces questions et la vieille femme diminuait
 son importancee...
 Les temps étaient accablants, et cette société,destinée à
 périr de souffrance et de misère, sentait le desir de
 s'évader de la tristesse vers une goutte de bleu..
 Ainsi,la Marraine me dit directement:
 -
 Vas- y, Sévérica;, dis-nous la poésie avec le "réveil- matin"!
 
 "Le meilleur réveil-matin
 Est le coq d'exterieur
 Quand le premier ne marche pas,Père Cacanel
 En règle sa montre"
 
 L'omission de la lettre"r"
 du nom propre "Cracanel" en était le grain de sel.
 (N.E:Le mot Cracanel signifie un homme avec les jambes
 écartées,pendant que le mot Cacanel nel fait allusion
 à un homme qui est maculé de merde)
 
 Tout le monde éclatait de rire, déclenchant mon
 enthousiasme et je ressentais le besoin de les
 récompenser avec un bis:
 
 "Notre père
 dans votre grenier
 Quand il allait,radotait
 Quand il restait, volait
 il volait des pommes,
 il volait des poires
 Il en descendait sans culottes"!
 
 La poésie apprise dans l'atelier du tailleur de
 pierre de Mihai Bravu ne collait pas assez avec
 l'atmosphère fine du salon de"Nerva Traian".
 Quelques invitéees pouffaient de rires étouffés,
 deux ou trois chaises grinçaient à cause de la gêne.
 La Marraine m'offrait comme récompense un bonbon
 fondant rose, empêchant à la fois un répertoire
 qui devenait de plus en plus"imprévisible",
 et grand-maman m'envoyait vite à jouer.
 L'une des demoiselles Paraschivescu essayait
 de reprendre la discussion.Une main aux doigts
 secs, prête à se déchirer,agrafée de bagues,
 restait à caresser mes joues.
 .
 .
 -Que veux -tu devenir quand tu seras grand?
 Ma réponse, improvisée d'une bouche sèche,résonnait
 étrangement dans l' immense salon:
 
 -Enfant..
 Elles se regardaient étonnées, cherchant dans
 les yeux des autres autour d'elle si elles avaient
 bien entendu la même chose,secouant ensuite leurs
 têtes de consternation
 
 Je savais ce que je savais.
 *********
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 .
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 (À suivre, à vivre, rendez-vous dans notre
 prochaine édition pour la troisième moitié
 du Chapitre 11)
 .
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