Le Salon de lecture

 

Des textes des membres de l'équipe ou invités surgis aux hasard de nos rencontres...








 

Catrine Godin

photo Frédéric Massé, Brouages, rempart ouest

(en savoir plus sur Brouages)

 





Clameurs

Liquides alliages rugissements de pierres, oranges suées de grandes orgues chantant les éclisses d'étincelles, sous les tenailles et les vermeils, sous cette peau la montée du magma, émanation coulée, mer surgie vivante dont l'éclats brigue le souffle en durcissant les joyaux, épanchement d'or aux doigts vibrants, ce jour remué très simple par gestes lentement tendres de gouffre comme au ventre d'une femme, sous cette peau, la forge résonne les combes .

Ce n'est plus la main mais la voix, une échine ployée, cintrée de micas lucides ce n'est plus la main, mais le sang et ce désir d'écrouir, ne plus faiblir mais il brûle, la gorge le poitrail, or pour or au jour ou en l'ombre il n'est plus temps ni des pertes ni des comptes ni de rien de ce qui n'est pas ce sang, sidérurgie métabolique où l'éponge ne passe jamais aux sillons de ses fronts aux clivages de ses forêts sombres luttes à fléchir les résistances ou le fer ou le bronze mais tout ce qu'il se refuse scintille, redoute les fontis, éboulements d'usure, abandons

Faudra-t-il ouvrir au trépan forcer les plages, la silice lécher, fleurs de boursouflure aux lèvres craquelées l'assoiffement chaud, abreuver la fièvre à l'outre de peau nourrir de sèves, pleurs des laminoirs où dorment les ouvrages et, entendre la plainte du vif argent, longue attente sous des lunes de lait bleuit .

De ses grands arbres émaillés, mercures et astres sertis aux faîtes des solstices 
il ne voit plus que la limaille .

Clameurs

des marées de magma
ne forge point ton joug
mais ta respiration



o3 o4 oo4

 








Lettre pour tes yeux


peut-être faudrait-il encore un peu de ces minutes qui s'éternisent quand un seuil resplendit soudain, vif comme un midi surgissant ou alors contempler la lente agglomération des grains blonds quand ils se sculptent au gré des condensations, des Gestalts, pour que germe très doucement en l'abri calme de tes paupières le regard peut-être viendrais-tu au monde clairvoyant d'entre les clairvoyances peut-être viendrais-tu vraiment au monde pour la toute première fois

nous naissons vagissants expulsés sur un claquement de laps clignant des yeux éblouis on dirait une voile gonflée trop vite emportant tout, tout, les couleurs les fibres et les vents, nous passons d'infimes boucles en infimes boucles, nous passons mensongèrement grandis graines de dendelions ébouriffés en rêve de germinations tendres et floues nous ne savons rien pas même l'enfance nous ne savons rien sinon des orgueils et des vanités et à peine si peu les douleurs outre le corps et encore à peine si peu la pensée que nous fuyons nous fuyons nous fuyons

à chercher l'éclat minutieux la teinte de l'instant en sursis déposé sous tes yeux sans que tu ne l'aperçoives à trouver sans doute à quelques frôlements ou à tes pieds la petite pierre des achoppements, les petites pierres, l'insu des espaces lovés entre tes perceptions, à trahir le moment à tant le prendre et l'échapper sans cesse et sans le goûter ni l'embrasser entier qu'est-il acquis sinon la perte

j'aimerais tant savoir tracer pour toi le dessein duquel tu fais partie et qui n'est rien sans toi ni sans ta continuité sans la quête des accomplissements simples pour border les lacunes immenses bleues d'attendre le jour en la nuit


o5 o4 oo4 

 




i n u t i l e

fracas 
le ciel ou l'onde vocifère la lumière
les innocences
trucidées
s'amoncellent

là-bas ce tertre
nous y planterons un olivier
la voix des cadavres chantera 
dans la pulpe 
et l'huile


les landes entre les sabliers
labeurs et chants
hommes et femmes
se meurent

l'enfant des cendres
s'immole
sans écho

kamikaze 
la frappe est un cri
inutile
à la fleur exsangue de tes lèvres

 

 





Les ailes closes ( extraits )


tant d'épines aux pieds
et les chardons

regarde
sur ta bouche
la tache

quand le ciel s'écroule

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l'apocalypse
chiens
pierres
en parlent au silence

...pense l'univers, il est

le chien dit soit
et le monde est une chienne

 

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les pierres fendent
et tombent

elles blessent ton front

averse les éclats
survoltés sillages
de ta lapidation

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comme il te trompe
ce mouvement d'épaule

 l'aveugle touche
la voix
le désert 

des nids

il sait que la mort frappera
dans son dos

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la chair s'épuise
à transfuser l'horreur
belle
comme un charnier

la conscience dans l'hélice
nos blessures grincent
sculptent

elles ombrent le monde

 

 

 

 

 

 

Créé le 1 mars 2002

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