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L'ombre dans les corps, par Michaël Ludwig


Beaucoup de poètes plus ou moins amateurs utilisent internet pour montrer leurs écrits. L’un des ces poètes, parmi les plus talentueux qui circulent sur la toile, a choisi d’aller un peu plus loin, en proposant un choix de ses textes, d’une façon originale et, selon moi, rafraîchissante par les temps qui courent.

Ainsi qu’il l’explique sur son blog, «V.I.T.R.I.O.L», Michaël Ludwig prend le parti de bousculer les conventions de diffusion en offrant un court recueil, téléchargeable gratuitement à partir de son « lab/oratoire du Mercure fugace ». Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la notion de cadeau n’est absolument pas usurpée ici, tant ce recueil aurait sa place chez nombre d’éditeurs classiques, pas les dragueurs de Goncourt, non non, les encore passionnés, ceux qui suent. Ceux qui « à droite à gauchent ».

L’ombre dans les corps rassemble une quinzaine de poèmes écrits entre 1999 et 2000, précédés d’une épigraphe très à propos de Léonard de Vinci. Les visiteurs du site de Michaël Ludwig, ou ceux qui ont lu le salon de lecture qui lui était consacré sur Francopolis en juin 2005 (sous le pseudonyme Triplex Nomine), ne seront sans doute pas dépaysés par l’écriture faite de lyrisme et relevée d’onirisme propre à cet auteur. Les poèmes s’enchaînent, des courts, des plus longs, et pas un instant le rythme ne s’essouffle. Il y a de l’ombre, bien évidemment, beaucoup, tour à tour imposée, suggérée, à peine devinée, et cependant l’on peut sentir de la lumière (des soleils, du cristal…) jamais très loin, presque omniprésente, dirait-on prégnante, car elle-même source d’ombre.

Comme le titre l’indique, tout se passe, tout naît ou tout se rend dans les corps, on pourrait même dire les deux corps : le sien et celui de la femme aimée. Les tourments, les tempêtes qui remuent l’être sont décrits avec une force, une brutalité troublantes. Cela nous offre certains des plus beaux passages du livre, d’une sensibilité très aiguë (Et il roule d’autres épines de haine et d’autres algues glacées/ qu’il abandonne aux rives rougies de mes plaies). Et comme avec l’obscur, il y a toujours une lueur qui persiste, et qui souvent émane du deuxième corps, celui de la femme, où dans le sein se « recueille une offrande d’amour ».

Le dernier poème sonne comme un point d’orgue, où les sentiments se rejoignent et s’emmêlent, inéluctablement, dans ce clair-obscur insaisissable qui fait l’âme.

Michaël Ludwig ne nous offre pas seulement un recueil de grande qualité, mais une conception de la poésie comme acte de partage. A cela rien d’étonnant, quand on connaît le personnage, ce qui n’empêche pas de le souligner, crénom !

A noter le tableau de Cendrine Rovini¹ qui illustre de fort belle manière le recueil, et que vous pouvez voir en couleur sur son site : http://cendrine.rovini.over-blog.com

 

1 : du 3 au 11 décembre 2005 à la Biennale Internationale d'Art Contemporain de Florence



Par Teri Alves
pour francopolis
novembre  2005 




Créé le 1 mars 2002

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