Avec Léah et Orlando, amis poètes
de la Micronésie
Poétique, nous avons passé deux jours
dans les marais de Brière en Loire Atlantique sur
les traces de René Guy Cadou. Né à
Sainte-Reine de Bretagne en 1920, René Guy Cadou
a laissé à 31 ans une oeuvre considérable,
fraîche comme les souvenirs d'enfance qu'il évoque.
Nous avons pu saisir pendant ces quelques jous, l'émotion
d'un poète pour son pays, cette Brière, morceaux
de terre où l'eau et le ciel prennent toute la place.
Mais aussi l'amour du poète pour sa femme Hélène
que nous avons eu le plaisir de rencontrer dans la maison
école où le poète a enseigné
avant de mourir des suites d'une longue maladie. Avant de
lire le témoignage
de Léah, Louisfert en poésie -Demeure
René Guy Cadou, René
Guy Cadou, aperçu poétique par Orlando
Jotape Rodriguez et l'itinéraire
poétique proposé par Cécile Guivarch,
voici une présentation de Cadou et de son oeuvre
par Isabelle Herbert.
Soleils de Brière, aquarelle de Jacques
Clavreul
René-Guy Cadou,
un poète et son oeuvre,
par Isabelle Herbert
René-Guy CADOU ou le poète
de l'effusion, pourrait-on écrire au sortir de sa
lecture, tant sa poésie a l'accueil chaleureux.
« J'appelle effusion cette fraternité d'armes
qui existe entre le poète et son lecteur ».
C'est dans l’œuvre de la nature
que la poésie de CADOU prend sa source, là
qu'elle s'enracine, et si profondément, dans cette
nature aimée comme une part de lui-même, dans
cet univers élémentaire et essentiel à
l'harmonie duquel il se sent participer. Car CADOU a toujours
voulu demeurer un rural, un homme qui préfère
aux clinquantes promesses de la ville non pas l'isolement,
mais la bruissante compagnie de la campagne.
"Ah ! je sens bien que je suis trop profondément
enraciné pour remonter comme un bouchon de liège
sur le saladier de punch de la ville. »
Il a passé les dix premières années
de sa vie en Brière, aux marges "du grand livre
des marais" et en a gardé pour toujours l'âme
un peu nostalgique, penchée vers l'enfance, attentive
aux silences humides de ces pays secrets.
I1 ne vivra à la ville, Nantes la proche métropole,
qu'entre sa dixième et sa vingtième année.
Triste période sans doute, puisqu'il y perdra successivement
sa mère et son père. Ce sera aussi le temps
"des tristes salles du collège
où officiait, entre huit et onze heures, un prêtre
en veston, agrégé de lettres ou de philosophie"
… "réduisant les tragédies raciniennes
à des colloques de Jésuites".
Mais c'est encore à Nantes qu'il rencontrera le poète
Michel MANOLL, dont la librairie recueillera bien souvent
le lycéen buissonnier. MANOLL l'aidera à reconnaître
en lui cette passion de la poésie à laquelle
il s'abandonnera tout entier désormais.
A vingt ans, il commencera la vie d'instituteur de campagne
qu'il mènera jusqu'à sa mort. Sa maison d'école
à Louisfert, le village de Loire-Atlantique où
il se fixe finalement avec sa femme Hélène,
devient chaque soir quand il écrit (et il écrit
presque tous les soirs), non pas le lieu fermé d'une
méditation repliée sur elle-même, mais
plutôt "l'avant d'un
navire qui fend les hautes vagues de la campagne".
Il y a un mysticisme certain dans l’œuvre de
CADOU, surtout depuis ses échanges et son unique
rencontre avec le poète Max JACOB. Mais bien plus
que d'un christianisme classique, c'est d'un panthéisme
implicite qu'est imprégnée toute la poésie
de CADOU, d'un humanisme si profond qu'il ne se limite pas
même à l'humain mais vise à retrouver
l'essentielle harmonie des lois élémentaires
de la nature. Aussi l'amour du poète, fondement de
toute sa création, est-il un amour à longue
portée qui balaie le monde familier, le dématérialise
en le rendant à la dimension humaine, en même
temps qu'il ouvre l'homme et sa pensée sur l'universel.
Le souci d'élargir sa poésie, de lui accorder
l'espace nécessaire à cette communauté
spirituelle, se retrouve à maintes reprises dans
son oeuvre.
« Qui dit poésie, dit poésie habitable.
»
La voix poétique doit avoir valeur de chant, d'incantation,
et être "portée
par un rythme suffisamment agissant et voisin des battements
du coeur, jusqu'au moment unique où son chant rejoindra
l'universel concert". Ainsi doit-on retrouver
la simplicité fondamentale du sacré.
On comprendra aisément que les conceptions de CADOU
quant à la création se traduisent par une
volonté souvent réaffirmée de rendre
la poésie au plus grand nombre.
"La poésie sera mémorable ou ne sera
pas, attendu que cette formule vaut pour le peuple tout
entier et non pour une mince catégorie d'amateurs
..."
Reste à découvrir par chacun ce chant simple
et profond, chant de « pleine poitrine » d’un
poète fauché à trente et un ans, afin
que se réalise son espoir tranquille :
« J’écris pour
des oreilles poilues, d’un amour obstiné qui
saura bien, un jour, se faire entendre. »
Louisfert
en poésie -Demeure René Guy Cadou - témoignage
de Léah
René Guy
Cadou, aperçu poétique par Orlando Jotape
Rodriguez
Itinéraire
poétique par Cécile Guivarch
Bibliographie et liens
René Guy Cadou, Poésie la
vie entière – Œuvres poétiques
complètes, éditions Seghers (2001)
René Guy Cadou par Michel Manoll, présentation
et anthologie, éditions Seghers Poètes d'aujourd'hui
(2001)
Louisfert-en-Poésie, Michel Manoll, éditions
Serpenoise (1992)
Cadou, Loire intérieure, Jean Rouaud, éditeur
Joca Seria (1999)
Ce texte de Jean Rouaud a été écrit
pour le film : "René Guy Cadou" dans la
collection "Un Siècle d'écrivains"
sur France 3 dirigée par Bernard Rapp. C'est ce film
qui est projeté aux visiteurs de la Demeure René
Guy Cadou.
Une vie entière ; René Guy Cadou, la mort,
la poésie Par Hélène Cadou, éditions
du Rocher (2003)
Forum
Micronésie poétique
Centre
René Guy Cadou
Esprits
nomades
René
Guy Cadou, de Louisfert à Rochefort-sur-Loire,
un film de Jacques Bertin
Par Léah, Isabelle Herbert,
Orlando Jotape Rodriguez et Cécile Guivarch
pour Francopolis
octobre 2005
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