Articles sur les poètes et la poésie francophones
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Le Corbusier, Orion
et l’aventure humaine ou Firminy, la
« ville novelle », par Nicole Barrière La
plaine de Firminy s’étend depuis Saint Etienne, longeant la vallée de l’Ondaine, depuis Bellevue, on traverse les villes du
bassin minier, la Ricamarie, le Chambon Feugeroles.
Autant de noms que de luttes, autant de mémoires minières, coups de grisous
et grèves, une école de résistance et de dignité humaine. Ville
de mine, d’acier et de forge, Firminy, le savoir-faire des ouvriers s’ancre
dans l’innovation et la haute technologie. C’est la ville Le Corbusier,
véritable novateur en matière architecturale. Aujourd’hui devant le Centre civique qui rassemble la Maison de la Culture,
le stade, la piscine et l’église, on est un
peu dépaysé devant autant de béton… mais ce béton armé brut de décoffrage a
une histoire. Elle est née de la volonté d’hommes politiques et d’architectes
travaillant selon les principes de la Charte d’Athènes, de sortir des
bidonvilles et habitat insalubre, les familles ouvrières entassées dans une seule pièce, sans eau ni
électricité. La consigne de l’époque
est aux espaces verts, et les fonctions de l’habitat sont : « la
maison comme machine à habiter » et « habiter, travailler, se
recréer, circuler » c’est-à-dire s’épanouir dans un cadre « soleil,
espace verdure ». Le béton a sa beauté… si l’on songe au bel immeuble de Niemeyer
place du colonel Fabien à Paris, ou au stade de Firminy, à sa maison de la
culture. L’esprit des
architectes de l’époque, leur vision pour faire face au manque de logements
confortables, en vue d’absorber les populations venant s’installer dans les
villes en pleine mutation industrielle. Habiter, le passage de
la vie d’une famille logeant dans une seule pièce, à des appartements opérant
la séparation de pièces qui constituent aujourd’hui la banalité des
appartements courants, est une révolution ; parents et enfants ont leur
chambre séparée, cuisine et salle à manger, salon sont séparés, quant à la
salle de bain, inexistante auparavant, elle est dotée d’une baignoire,
véritable luxe si l’on songe au travail des ouvriers des mines et aciéries. Travailler, tout d’un
coup le verbe prend un ton lui aussi révolutionnaire à une époque où on ne
parle que de chômage, de fermetures d’usines et de licenciements. Se récréer… ici prend
place le stade, stade magnifique, de plus de 4000 places, épousant parfaitement la géographie du
lieu, laissant apparaitre le rocher, offrant du haut des tribunes, le
spectacle de la colline en face, toute boisée. Et derrière une vue dominant
le panorama qui s’étend jusqu’ai Velay. C’est ainsi qu’en ces pays de plaines
et de collines, on apprend qu’il n’est nul besoin d’être haut pour voir loin… A côté du stade, la
piscine, et face au stade, la Maison de la culture, long édifice de 112 m,
implanté sur une ancienne carrière de grès houiller, cette maison de la
culture est une danse, tant dans sa forme que dans ses couleurs, normal… puisqu’elle
est l’œuvre de Le Corbusier et Iannis Xenakis. Elle
est grandiose… inclinée, pas arrogante pour deux sous mais là ouverte à la
création et à la vie. L’église a été
construite en dernier, mais quels dieux pourraient l’habiter ? Comme de
nombreuses églises, elle est vide ! L’église est une sorte de grosse cloche,
dans laquelle on se demande bien quels dieux pourraient y séjourner… mais
justement n’est-ce pas d’autres esprits qui s’y invitent ? Il semble que sa
construction fut laborieuse, s’étirant dans le temps… Eglise placée sous la
constellation d’Orion… la lumière pénètre dans la coupole par les orifices qui dessinent la constellation. Pourquoi Orion ? Une des
constellations connues la plus ancienne, et présente dans de nombreuses
civilisations des deux hémisphères, déjà présente dans l’Antiquité, dans les
récits et poèmes de Virgile et Homère,
dans la Bible et autres récits religieux. Orion le chasseur légendaire de la
mythologie grecque, la lumière immédiatement
reconnaissable par sa forme aux étoiles très brillantes. Ne symbolise-t-il
pas la jeunesse et l’invincibilité ? La nébuleuse fourmillante d’une
mythologie complexe, et d’une histoire à construire, à venir…tant de versions
existent. Depuis
l’homme marchant à l’horizon des Egyptiens, le
géant Nemrod des Assyriens, comme l'habitant de la montagne chez les Grecs, le berger authentique des cieux en
Mésopotamie, le fils de Shiva chez les hindouistes, seigneur des esprits et
des karmas, le combat contre la nuit et l’hiver. Je veux
voir là la figure d’un peuple pugnace, d’une humanité, véritablement géante
en marche, habitée de progrès et de dignité humaine. Utopie… combien
cette utopie est aujourd’hui vivace, vivante,
et combien nécessaire, quand on voit les conditions de vie de tant de
gens, travailleurs pauvres, chômeurs, réfugiés. Il est
temps, plus que temps de s’inspirer de ces géants penseurs et artistes qui ont
façonné l’histoire après la seconde guerre mondiale, il est temps de
retrouver cette utopie première de vivre, de créer, et d’aimer. Utopie ?
Cette utopie est présente chez de nombreux poètes : « Accours, grande nature, ô mère
du génie. Accours, reine du monde, éternelle Uranie, Soit que tes pas divins sur l'astre du Lion Où sur les triples feux du superbe
Orion Marchent, ou soit qu'au loin,
fugitive emportée, Tu suives les détours de la voie argentée, Soleils amoncelés dans le céleste
azur Où le peuple a cru voir les traces
d'un lait pur; Descends, non, porte moi sur ta route
brûlante; Que je m'élève au ciel comme une
flamme ardente. André
Chénier Jeu muet Avec mes dents Courte parvenue, René Char ORION Blaise Cendrars Vogue ; les
brouillards sous lui flottent dissous ; La vie est
sur le pont du navire éclatant. ------------------------- Faisant à l'homme avec le ciel
une cité, Victor Hugo, La légende des
siècles ©Nicole Barrière Reproduit,
enrichi de photos communiquées par l’auteure, de son blog http://nicoletta.over-blog.com/
Sa fiche
d’auteur aux éditions de l’Harmattan Invitée au Salon
de lecture de juin 2014 |
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Créé le 1 mars 2002
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