Duper le temps et faire „fleurir
l’éternité”
Le
recueil de Patrick Devaux Tant de
bonheur à rendre aux fleurs, en édition bilingue franco-roumaine,
publié par les Éditions Le Coudrier en 2019, est le fruit d’une heureuse
rencontre et collaboration entre poètes et peintres francophones.
Le titre
du livre annonce un rare état d’âme avec l’intention du poète de le communiquer
en images poétiques, de même qu’en vision lumineuse de la vie.
Les
poèmes très courts, sans titre ni ponctuation, ont la fluidité de l’eau
et s’apparentent aux haïkus par leur structure usant de l’image qui n’est
jamais pure beauté du paysage, mais point de réflexion, ce qui donne au
poème à la fois sa vibration lyrique et profondeur de la méditation.
Le poète
aimerait retenir les instants privilégiés vécus dans une sorte
d’enchantement extatique délicat, à l’écoute de toute respiration des éléments de l’univers, de ses appels lointains,
insaissisables: lumière, ombre, mer, fleurs, feuilles, soleil, lune,
étoiles, oiseaux etc. Il hume l’éternité de ces instants heureux de
contemplation par lesquels on accède à la beauté du monde retrouvant ainsi
l’accord parfait entre l’homme et le paysage, cette sérénité de l’âme que
l’on pourrait nommer le bonheur.
De sa
maison calme, le poète veille l’aube, le lever du soleil, le premier
oiseau qui va chanter, la première rose qui ouvre ses pétales dans la
tiédeur du soleil. Il sent battre son coeur émerveillé et débordant de
tendresse. Il aimerait arrêter le temps à la manière de Lamartine,
éterniser ces instants de grâce et de rêve.
Dans le
chant matinal des oiseaux se niche l’éternité qui rend la terre
habitable. Et chaque image entrevue dans la lumière de l’aube rend
conscient de l’éphémérité de la vie et fait naître le désir de ralentir
le rythme de celle-ci pour s’en
réjouir.
Patrick
Devaux chante la lumière de la vie, ses couleurs qui émerveillent l’oeil,
son éternité pressentie dans les instants fragiles de bonheur. Son âme se
nourrit d’un chant ou d’un vol d’oiseau, d’un rayon de soleil, d’une
fleur de son jardin au petit matin, du poème qui vit en lui pour retenir
toutes ces images et émois qui ne seront bientôt que mémoire du rêve, des
souvenirs.
Les
aquarelles de Catherine Berael et
les peintures d’Irina Petraş, en parfait accord avec le souffle des
poèmes de Patrick Devaux, rendent parfaitement le leitmotiv pictural du livre. Quelle
belle concertation entre deux arts pour rendre l’harmonie, à suggérer que
le bonheur est à la portée de tous, il faut le retrouver en nous-mêmes
pour sentir autrement la vie.
On
pourrait vivre le miracle d’être à la manière de Patrick Devaux, mais
combien de gens sont-ils arrivés à cette sagesse et à ce bonheur ? Ce
n’est que la joie, la vraie joie des instants indicibles de beauté et
d’apaisement de l’âme qui dupe le
temps et fait „fleurir l’éternité”.
©Sonia Elvireanu
Né à Mouscron en
1953, Patrick Devaux est
publié en tant que poète et romancier chez divers éditeurs. Citons les
nombreuses publications au G.R.I.L., depuis le sourire du héron,
premier recueil de poèmes, en 1988, jusqu’à l’archiviste du brouillard,
en 2011... Une quinzaine de recueils chez cet éditeur.
Poète, traductrice, animatrice d’événements
francophones, critique littéraire, Sonia
Elvireanu contribue couramment à cette
rubrique (pour son œuvre, voir Le silence d’entre les neiges, de Sonia Elvireanu au numéro
précédent).

Aquarelle de
Catherine
Berael
Architecte, fervente écologiste et peintre, Catherine Berael
a illustré, depuis 2011, plusieurs recueils parus aux éditions Le
Coudrier. Elle est aussi l’auteur (et – bien évidemment –
l’illustratrice) de deux récits : L’oubli n’a
pas suffi à effacer les pas (2012), avec en toile de fond la
Bretagne, et À nos vallées
enfouies (2016), carnet de voyage aux couleurs du mythique
GR20 (Corse).



Trois poèmes de Patrick Devaux,
traduits en roumain par Sonia Elvireanu,
extraits du recueil suscité

Peinture
d’Irina Petraş
Née en 1947, Irina
Petraş est licenciée de la Faculté de Philologie
de Cluj (1970) et docteur en lettres depuis 1980. Elle a publié plus de
35 volumes de critique, histoire et théorie littéraire, essais et a
traduit plus de 30 livres de l’anglais et du français (Henry James,
Marcel Moreau, Jacques de Decker, Jean-Luc Outers,
Michel Haar, G.K. Chesterton, Philip Roth,
Michel Lambert, Philippe Jones etc.). En tant que peintre Irina Petraş a organisé 15 expositions personnelles
(www.irinapetras.ro).
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