Brèves de conversations III
de Michel Ostertag
MARCEL. Vous
imaginez, si Gustave Eiffel avait installé son bureau au 1er
étage de sa Tour et non au quatrième, ce qu’il aurait
entendu : « Pas fou, le monsieur, il a
préféré s’installer au 1er, près du sol,
au-lieu de venir habiter tout en haut, c’est dire la confiance qu’il a
dans sa construction !»
PAUL. Oui, mais il
aurait eu plus de place, car là-haut c’est vraiment un
réduit, non ? Et puis, songez à la panne possible de
l’ascenseur, le type bloqué dans son bureau sans eau ni
commodité. Et sans nourriture!
MARCEL. Finalement, il a été courageux !
PAUL. Ou
insouciant. Mais qui nous dit qu’il ne revérifiait pas ses
calculs à chaque fois qu’il montait à son bureau, une
façon de se rassurer !
MARCEL. Moi, si j’étais médecin, je me sentirais frustré ;
GEORGES. Pourquoi cela ?
MARCEL. Eh bien par
toutes ces années d’études, dix ans quand même,
pendant lesquelles j’aurai étudié, appris dans les
moindres détails plusieurs centaines de maladies pour, en fait,
soigner toujours les mêmes: bronchites, rhino, allergies,
entorse, dépression, surpoids, diabète… Un
généraliste, à Paris, combien a-t-il de chance de
soigner un paludéen ? Aucune !
Un tuberculeux, guère plus.
GEORGES. Donc la
solution serait d’étudier seulement ces maladies courantes…
Faire d’un généraliste un spécialiste en telle ou
telle maladie.
MARCEL. Sur sa
plaque serait gravé les maladies qu’il aurait
étudiées. L’esprit dégagé,
désencombré de toutes ces pathologies qu’il n’a aucune
chance de voir un jour, il aurait une vie bien plus agréable, je
pense!
GEORGES. On vient
de créer la « multi spécialisation » et
partant de là, on pourrait réduire
considérablement les études médicales.
MARCEL. Et le
déficit de la Sécu ! Le petit problème, ça
serait de connaître à l’avance sa maladie pour aller vers
le médecin correspondant!
GEORGES. Donc,
aller vers un «
généraliste-généraliste », c’est
à dire celui qu’on connaît aujourd’hui!
MARCEL. En fait, je m’aperçois que c’est une fausse bonne idée… Dommage…
GEORGES. Donc on ne
change rien ! On reste comme nous sommes ! Quoique l’idée est
à creuser, une nouvelle catégorie, entre infirmier et
médecin…
MARCEL. A ne pas souffler au Ministre de la santé, on ne sait jamais !
MARCEL. Un voisin que j’avais à la campagne, il y a plusieurs
années, avait fait un truc, pas croyable : il avait lu dans une
revue pseudo-scientifique que le fait de couper sa respiration pendant
au-moins une minute rajoutait une espérance de vie d’une
journée ou quelque chose de semblable. Un truc
complètement fou. Le voisin a cru à cette idée et
pendant plusieurs mois, trois fois le matin et autant le soir, il se
mettait en apnée, et avec l’entraînement, il
dépassait la minute à couper sa respiration. Il avait
calculé, qu’ainsi, il avait prolongé sa durée de
vie de plus de quatre ans, je crois…
GEORGES. Et alors ?...
MARCEL. Une nuit, une douleur au cœur qui s’affole, du mal à
respirer, sa femme appelle les urgences, il est emmené à
l’hôpital et après examen, on lui place un peace-maker
dans la poitrine !
GEORGES. La vie lui avait repris ce qu’il croyait avoir gagné sur elle. C’est ça la morale de cette histoire.
MARCEL. Faut-il être crédule à ce point pour tomber dans un tel panneau de bêtise ?
GEORGES. On dit que plus c’est gros, plus les gens « gobent
» le propos. Mais quand même, là, l’article devait
être super étayé pour faire croire à une
telle ineptie. Il s’était pris pour Jacques Mayol du
«Grand bleu!»
MARCEL. Lequel Jacques Mayol n’est pas mort centenaire, sois dit en passant!
PAUL. En ce moment, je recense ce que j’appelle « Les pires »
GEORGES. C’est quoi, « les pires » ?
PAUL. Eh bien, c’est tout ce qui est faussement vrai… Exemple : parmi
les hommes politiques, il y a ceux qui ont fait de grandes
études, Sciences Po, l’ENA et qui ne peuvent s’empêcher de
nous le montrer, dans leur façon de parler, de nous expliquer
les grands modèles économiques qui régissent le
monde et il y a ceux qui font tout pour le cacher au point de parler
comme Monsieur-tout-le-monde et de nous faire se demander s’ils ont
bien été à l’école…
GEORGES. Oui, mais pour moi, les pires ce seraient ceux qui n’ont pas
été à l’école et qui parleraient comme ceux
qui ont été à l’école, histoire de se faire
mousser et de rehausser leurs compétences apparentes…
PAUL. Vous voyez que la méthode est bonne ! Et qu’il suffit de ne pas se laisser endormir par le paraître.
Et lequel est le plus dangereux ?
GEORGES. Tous et aucun, c’est à nous de les étudier et de
se faire notre opinion. Reprendre à notre compte, le temps de la
réflexion, les idées de tel ou tel et voir si l’ensemble
tient la route, comme on dit !
PAUL. En matière de richesse, c’est peut-être là
que fleurissent les plus beaux cas : les riches qui cachent à
tous leur fortune et vivent chichement de peur d’être «
tapés » ou dépouillés par des malfrats et
surtout ceux qui n’ont pas un rond et qui «flambent» devant
les filles afin de les séduire.
GEORGES. Façon « Bob, le flambeur ! »
PAUL. Tout à fait.
PAUL. Depuis le temps que les hommes du gouvernement nous «
bassinent » avec leurs histoires de «niches fiscales»
et avant qu’ils les suppriment toutes, il y a une niche que j’aurais
bien aimé voir.
GEORGES. Laquelle ?
PAUL. Une niche à ma façon !
GEORGES. Je m’attends au pire !
PAUL. Donner aux « anciens », aux retraités, qui
fréquentent les Universités, et je sais qu’il y en a
énormément, un avantage fiscale, un abattement sur la
feuille d’impôts. Des gars de soixante ans et largement plus, qui
réussissent une licence, une Maîtrise, devraient recevoir
une récompense de la part de l’Etat, ne croyez-vous pas ?
GEORGES. C’est tout bon pour la Sécu, ça, non ?
Sûrement, du moment que les anciens se portent à
merveille, ça va bien pour elle, mais attention au stress des
examens, le pépé qui s’écroule dans la salle
devant sa copie blanche…Mauvais effet !
Il faudrait alors prévoir un poste de secours, ce jour-là !
PAUL. C’est vrai, avec des infirmières pas trop jeunes, sinon… Bon, il faut creuser l’idée, je pense!
Mais on peut déjà la soumettre au Premier ministre…
GEORGES. Je ne pense pas qu’en ce moment de restrictions
budgétaires tous azimuts, ça soit une bonne
idée...!
***
voir aussi
Brèves de conversations I
Brèves de conversations II pour francopolis juin 2010
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