MAI 2008
Aphorismes
par Aaron de Najran
-Prononcer vingt-cinq aphorismes par jour et ajouter- :
«Tout est là»
(Jules Renard)
Aphorismes
de
ROBBERT FORTIN
J’écris pour accomplir ma
présence en ce monde.
*
Le bonheur bafouille encore aux portes
comme une bête oubliée dehors.
*
Il n’y a rien à apprendre
le long des routes tracées d’avance
*
La renommée surfaite n’est jamais à la hauteur
de ce que les autres attendent de l’auteur.
*
Le bâton qui soutient le ciel
affermit la terre.
*
L’humilité marque
le désir de grandeur de l’homme.
*
Rien n’est aussi transparent
qu’un mot d’espérance
dans la tête du rêveur.
*
L’air s’agrippe à la fragilité d’un brin d’herbe.
*
La recherche de l’absolu ne doit pas sacrifier
ce qui la fait vivre.
*
Même une gorgée d’eau neuve
n’a pas le même goût dans un verre brisé.
*
Le regard qui se réfléchit trop longtemps sur l’eau
s’anéantit au moindre coup d’orgueil.
*
Une bouche qui aurait toutes les réponses
ne retient rien de l’essentiel.
"Je vais à la
convocation de ma naissance", Prise de parole, Sudbury,1997
Note :
Nous venons d'apprendre que Robbert Fortin, poète et
directeur de la collection de poésie «L’appel des mots
» à l’Hexagone, revue consacrée essentiellement
à la relève de la poésie québécoise,
est
décédé à l’Hôpital Notre-Dame de
Montréal le lundi 14 avril en après-midi à la
suite d’un malaise cardiaque. Il était âgé de 62
ans.
Robbert Fortin vivait à
Montréal où il organisait fréquemment des
récitals de poésie ainsi que des ateliers en milieux
scolaires et universitaires. Avec son troisième recueil, Peut-il rêver celui qui s’endort
dans la gueule des chiens, il a remporté le Grand Prix du
Salon du livre de Toronto en 1996 et le Prix d’excellence de la
Société des écrivains canadiens pour Je vais à la convocation, à
ma naissance en 1998. Il a également été
finaliste du prix Trillium en 1998 pour Jour buvard d’encre. Il
était membre de l’Union
des écrivaines et des écrivains québécois.
En 2006, il a publié Les
dés de chagrin, son dixième recueil. Toutes nos
sympathies à la famille et amis.
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APHORISMES
D’ALBARÈDE
Paradoxe des religions :
un irrationnel qui veut avoir raison!
*
Mort subite au printemps :
la gelée qui cingle les roses en économise la
pureté.
*
Face au couchant dans les
vitres les éphémères sont plus longues à
mourir que le soleil.
*
A chaque époque
l’homme s’est paré d’inusité pour dissimuler son usure.
*
L’herbe du désert
est sous-entendue.
*
Nous ne touchons jamais la
vérité à mains nues, mais toujours avec le gant du
préjugé.
*
Ne pas s’étonner
des médiocres saisons d’aujourd’hui quand c’est la
médiocrité, sur cette terre, qui fait la pluie et le beau
temps.
*
Le passé est
l’avenir du vieillissement.
*
L’homme est tellement
«naturellement bon», qu’il veut à toute force faire
le bonheur de son voisin. Il est prêt à l’assommer pour
cela.
*
La faiblesse ajoute un
brin d’herbe au pavé de la force. La force est un pavé
soulevé par un brin d’herbe.
*
Depuis que quelques dents
me sont tombées, les créneaux me font rire horriblement.
*
Tout tourne autour de
tout. Et réciproquement.
*
Ultime et rocailleuse
lucidité du torrent qui, à sec, devient draille.
*
Il n’y a pas de
vérité en art. Il n’y a que des manques de recul.
*
Plus la lumière est
vive, plus l’ombre est noire.
*
Dès qu’il a
publié le poète va à la rencontre d’autres
poètes, qui ont aussi publié, pour confraternellement
échanger leur oeuvres : le poète est un échangiste.
*
La poésie ne
s’écrit jamais en liberté, mais c’est en liberté
qu’on doit la recevoir.
*
La douleur du
pressentiment adoucit le mal d’espérer.
Pensées
de poche
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