Billet d'humour et d’humeur - aphorismes-pensées
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ARCHIVES: HUMEURS & APHORISMES

 

Mai-juin 2023



Michel Ostertag : La boudeuse

 

Dessin par l’auteur

 

Sa réputation était toute faite : née boudeuse, elle est restée boudeuse toute sa vie, on n’a jamais pu la dissocier de cet état de caractère, car pour un oui, un non elle savait bouder et connaissant tellement bien ce réflexe, elle savait parfaitement doser l’intensité et la longueur de sa bouderie : cela pouvait aller de deux ou trois heures à une journée entière voire plusieurs jours si le motif le valait.

On se méfiait d’elle comme de la peste ; on faisait tout pour se montrer aimable à son égard ; on mesurait ses propos afin de ne jamais la vexer, mais rien n’y faisait vraiment, on n’était jamais à l’abri d’une saute d’humeur, d’un mot de notre part qui aurait été mal comprise par elle et qui aurait déclenché le processus.

La moindre note d’humour était à analyser avant de la lancer dans la discussion. Si elle était comprise et partagée, tout était au beau fixe, dans le cas contraire il fallait s’attendre à des mouvements d’humeur non contrôlés.

Petite, à l’école communale, en classe primaire, la réflexion de la maîtresse à son égard l’avait incité à lui faire la tête pendant toute la journée, récréation comprise. Cela n’avait pas plu à la maîtresse alors elle lui a donné une punition. Un début !

La suite de sa carrière ne fut pas différente de ces premières années, à voir les années collège ou pire l’époque de la faculté où la libre parole était de mise entre garçons et filles, alors là, certains garçons et filles étaient supportés par elle, mais en réalité une petite frange, quant aux autres ils devaient subir ses mauvaises humeurs déclenchées par une réflexion inappropriée à ses yeux.

À l’âge de trouver un travail, sa difficulté à se plaire dans un emploi compliqua un tantinet la recherche. Finalement être intérimaire lui convint le plus : changer d’emploi très souvent à durée variable, ne pas avoir le même chef sur une longue période lui convenait le mieux, ainsi sa susceptibilité exacerbée passa beaucoup plus facilement.

La vie ne lui permit pas d’avoir d’enfants, tout compte fait, cela lui a été profitable, car on n’aurait pas bien vu, comment elle s’en saurait sortie avec cette charge émotionnelle que cela incombe.

Quant à nous, à ses relations amicales de longue date, il faut bien reconnaître, qu’au fil des années, la compréhension de notre part s’est peu à peu émoussée pour finir consciemment à ne plus trop la comprendre ni la supporter ni la fréquenter, surtout de la part de nos compagnes qui ne supportaient plus cette façon de se comporter de sa part.

Plusieurs années après, les distances prises, nous ne savions plutôt ce qu’elle était devenue au quotidien. Un jour, nous avons appris que son mari l’avait quitté, cela ne nous surprit aucunement et nous avions formulé le vœu qu’elle puisse trouver un nouveau compagnon qui lui corrigerait son fichu caractère…

Les années ont passé, aujourd’hui nous ne savons plus ce qu’elle est devenue mais nous lui souhaitons une retraite paisible plus en harmonie avec son entourage que par le passé.

 

©Michel Ostertag

 

 

Michel Ostertag

Francopolis – mai-juin 2023

 

 

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Créé le 1 mars 2002