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Actu : Juin  2009




Textes de l'atelier d'Écriture animé
par Philippe Vallet

Un atelier d’écriture

Au lycée Louis Lapicque d’Epinal, l’atelier d’écriture est installé depuis cinq ans. Il y a l’atelier hebdomadaire qui réunit  jusqu’à 15 élèves (en moyenne 5/6). Il y a l’atelier qui vient dans la classe une fois, à l’occasion du printemps des poètes. Dans le premier les élèves sont volontaires et les différents niveaux représentés dans l’établissement se croisent, se rencontrent écrivent ensemble, dans le second c’est le professeur qui décide.

L’atelier est le temps posé d’une mise en commun consacrée à l’écriture. L’écriture est provoquée par des consignes, ces consignes construisent une suite d’écritures qui guident et produisent du texte. L’objet de l’atelier est bien de « produire du texte » de facilité l’expérience, et d’entrer en écriture parmi un groupe réunit pour ça. Dans son déroulement l’atelier permet  à chacun de vivre l’expérience  de lire son texte directement venu  de sa main, de sa langue, de ses mots.

L’animateur trouve son rôle dans le choix des inducteurs, dans l’organisation, leur distribution dans le temps. Ce choix reflète à la fois les pratiques de lecture-écriture de l’animateur ainsi que ses choix philosophiques, politiques. Le rapport qu’il établit, qu’il institutionnalise avec les participants parlent de ses choix.

Les ateliers que j’anime sont portés par la volonté du «  tous capables ». Le Groupe Français d’Education Nouvelle a fait naître, et mis en application dans ces pratiques cette idée il y a une trentaine d’années.

Sur chaque atelier il est pris un temps de retour, au cours duquel les participants sont sollicités pour interroger l’animateur, sur l’organisation de l’atelier, sur ses choix, et ils peuvent ainsi s’emparer des outils (techniques, pédagogiques, littéraires…)  qu’il utilise, l’objectif est de construire avec  le groupe une réflexion afin de permettre une appropriation de la démarche.

La suite de textes que vous allez lire provient d’ateliers qui se sont déroulés durant l’année scolaire 2008/2009. Le choix parmi l’ensemble des textes a été réalisé par un groupe de six élèves.

Bonne lecture.

Philippe Vallet
Animateur d’atelier d’écriture

06 59 17 12 41

***

Marina Braga

Ici et ailleurs
Une chute invisible
Dans mon passé en noir et blanc
Ici et ailleurs

la musique de la photographie
Vers un monde indispensable

Ici et ailleurs
Saisie par mon mercredi après-midi
Cinéma, livres et blabla
Ici et ailleurs
Le bus rouge
Dans mon esprit ressoude les deux rives
Ici et ailleurs
2004, amitié et Angleterre
Le canard de mes espoirs de ce
qu’il faut

***

L’anémone du soir et les dominos d’or battent les forêts et le vieil astre, sa bouche à l’envers, fait une chute invisible dans le ciel lavande. Au travers de tes yeux, je déshabille la nuit et dans un murmure le souffle l’Harmonie des fougères noires et l’écume blanche. Ici et ailleurs, je sais que ce n’est jamais une erreur.

***




Rémi Girardet


Dissolution glaciale

La mer avec le manque
blême dans la nuit
les âmes, les souvenirs clos
l’harmonie céleste
s’installe   bam !
s’emmêlent les fougères
des envies, ce sont des envies
qui poussèrent
tremblantes au
milieu des lavandes
le besoin bat
les flots invisibles car
la mer avec le manque,
absence,
calme
ses yeux murmurent
ses dernières faveurs
le gouffre profond
s’installe
malaise
d’une bouche à l’envers.

***




Astrid Schumacher

Le visage du néant

Un train solitaire s’enfuit au loin.
 
Impasse des mots qui ont disparu,
Que tu as effacés de ton silence.
 
Dans le désert les ombres s’allongent.
Se confondent,
Et la nuit les engloutit.
 
La vague me recouvre déjà,
Je n’arrive plus à respirer,
Je me noie.
Mes lèvres sont violettes,
Mon regard est figé dans le néant.
 
Pourquoi me regardent-ils ?
 
Je suis morte depuis longtemps,
Même si mon esprit erre encore et encore
Dans des lieux abandonnés,
Ces ruines du passé.
 
Je vois ton regard qui cherche.
Pauvre fou.
Avancer dans le temps et dans l’espace,
Ce n’est pas s’approcher de soi-même.
Mais n’oublie pas d’écrire,
Il faut des mots
Pour alimenter nos rêves.

***




Camille

Orange, bleu, jaune, blanc, vert
Tout est coloré.
Tout est délabré.
L’eau de pluie s’accumule encore dans les ornières du chemin qui mène à l’étendue déserte.
Plaine aride, la route sinueuse traverse son âme.
Le vent agite doucement les feuilles des quelques palmiers qui se trouvent encore debout. Une feuille tournoie, s’envole.
Le sable s’effrite sous ses pas, comme autant de cristaux dorés.
La musique, elle, n’adoucit plus ses peines depuis bien longtemps.
La plaine morte lui sourit, lui tend les bras.
Elle court, la misère fleurit partout ou elle va. Il est temps.
 Elle a trop attendu dans l’embouteillage de sa vie.
Il pleut. Une goutte s’échoue sur l’océan grisâtre.
Tout est calme, plus un souffle, plus un bruit.

***

De ses grands yeux ébahis, elle contemple la route qui s’étend à l’infini. Tant de chemin déjà parcouru, et il en reste encore bien trop à faire. Elle n’en peut plus. Les cailloux blancs qu’elle a laissé tomber tout du long ne se distinguent plus du sable fin et chaud…si chaud… Les effluves marins effleurent ses narines et imprègnent son cerveau d’une douce mélancolie. D’un geste, elle efface le chagrin. Moulin à vent, elle court, s’enfuit, tente de s’échapper du coeur de l’horreur. Voyage incertain, connaissance trop partielle, croyance improbable. Où va -t-elle ?
La bouche pincée, un sourire se dessine sur ses lèvres. Au loin, une lumière brille. Son cerveau est un chocolat au lait sucré. Elle pleure de joie.
L’espoir persistera

***



Véronique Bart

Rituel
laisser l’herbe pousser sur le bureau
ni table ni tabou

laisser l’emmaline émulsionner le cerveau
la sève s’amuser silencieusement
de petites pensées palpitent sur la langue
laisser pousser les fleurs

dans la tourbe des vents, du ciel, de l’océan
découper les éclats glissants des étoiles filantes
peut-on jouer aux dés les mots
menue monnaie de nos navires nocturnes ?

les larmes plantées dans la tête
prennent le temps
patience
à reculons viendront les phrases
sous le regard bleu d’un soleil intérieur
mordiller le crayon comme on suce son pouce
c’est toute la forêt qui déferle
sous la tour du château
chantait le chevalier
pour sa belle cruelle
faut-il des instruments pour dérouler, aplatir, découper
dédoubler, découdre, rafistoler, réparer, séparer ……
les mots ?
que la langue soit de tonnerre
que cela fuse bougrement
ouragan de papier
mon poème enfant
gardien de mes silences

***




Didier François

Plisser les yeux, paupières mi-closes – effacer et l’affiche et les rails – les morts, les mutilés – ceux qui partent – et de ce qui reste (cette silhouette) effacer l’homme, et la lumière ; ne garder que les traces allongées ; oublier, oublier les arrêts, oublier que d’autres respirent mieux – encore – dans les lignes – de fuite – tisser l’épure de la lumière comme une ligne qui se meurt, les entraîne, d’où ne règne – reste – finalement, tissée, que l’aposiopèse : une silhouette sombre qui s’efface d’y songer, lors que le monde continue à tourner.

***

Et me revoilà encore à te chercher, sans médire, Mélusine, mon amour, ma Mimine, sans métaphore, je voudrais te dire, Mélu, méli-mélo, Mélu-mélusine, te souviens-tu ? La gare maritime… ma Mélusine… Tu sais, la gare loin de l’usine ? Les poissons, la Méditerranée, moi qui fume, eux qui bullent, toi qui humes, t’essouffles amère, qui rumines à la mer, mon mérou, mon merlan Mélusine, à m’écouter hurler et mimer : « La lune se transforme prodigieusement à ton fessier ! à ton cul Mélu ! » t’avais-je dit Mélusine, avoué, de but en blanc, comme un wagon-restaurant : preste, mais dans l’attente de goûter. Quand j’y repense, ce sont quatre-cents fenêtres ouvertes à ma mémoire, et les quatre  cents claques qui de tes mains m’ont fait rougir, ma petite mule câline, ma Mélusine. Sais-tu Lulu, de cette histoire, j’en suis maussade, j’en suis marmelade. Cet aveu, quelconque de ma part, prends-le comme tel Mélusine, ma morve, ma marée sans amarre, je suis une illusion, tu es une sirène, mon thon, ma moule, mon huître Mélusine, ma perle crachée comme un hoquet, mon calcul rond dégoulinant. Mais je te dirais, ma morue, si tu n’étais mon mollusque de mer, tu serais une campagne hallucinée, ma Mélé, mon escargot imbibé de Bourgogne. Je sais ce que tu te dis : l’axe crasseux n’a pas fini de tourner dans sa tête d’ahuri… Mais tu n’as pas pris mon âme, ma poupe Mélusine, ma grosse truie, mon poulpe, ma tête de mort, le drapeau mon crapaud, tu m’as volé mon encre. Compte tenu, et en conséquence, au vu et en raison de cet état de fait su, et pour ces raisons (supra citées à ton fessier), conséquemment, et nonobstant tes attraits, je te lâche mon dernier jet, pour faire fuir par la parole, par laquelle jadis tu sus que je t’aimais, notre relation et nos entretiens en queue de poisson.

***



Adeline

Ame palpitante

L’ombre de
Mon âme
Dévore mes
Lèvres palpitantes
De sang
Quelle pitre !
La pâle et
Aveugle mémoire de
La trahison
D’un sourire.
Un instant
Spirituel, pourtant
La joie éternelle
Sur le chemin
Un lapin sur
La route de
La sagesse.
Un murmure,
Une odeur de
Lait, de la terre
Secret du
Talent intarissable
De la rêverie
Friable de mon
Monde à moi
Le pli, l’envol
D’une feuille dans
La paume de
L’enfant qui vieillit
C’est un ailleurs
Confus







Lumière religieuse
Dépouillée de
Mystère
Empreinte répétée
De l’indifférence
Etouffement, repli
Du soleil
Rien qu’un
Appel inquiet
Vers le ciel
Appel à une présence
A une âme
A l’horizon
Abîme profond
Appel alors
Insaisissable
Une faille
Vertige vertical
Disparition des
Heures, des années
Du temps
Espace de
L’enfer où
Rien ne bouge
Fontaine du néant
Qui coule telle
Une vague de silence.

***



Marina

drôle de  mœurs

aux archives des miroirs
sur les marches du sacré
défense de cracher par terre

ne tournez pas la tête
même dans les cimetières
le soleil se lève à l’est
donnez le bon exemple
ne réduisez pas en poussières
l’humeur de vos jours
dévoilez le mystère multiple du vivant

d’une alchimie du savoir
nos mémoires se promènent
mystères incongrus des insolites inattendus
fleurs des bonnes recettes au linge double
des liqueurs offertes à la topette refroidie
chaque jour refait bouillon
et les secondes en bouteilles, opiniâtres
observent avec tranquillité vos lendemains
où se décuit la parole
inépuisables exégétiques à la source de nos décors
nos coffres se garnissent aux documentaires inépuisables




des cartes funéraires tapissant les murs
archives dépecées aux hasard de nos campagnes
marquées aux excès des questions dispensées
aux chants nourris nos décrets circulaires
levant le compte rendu du cahier en route
aux foyer de votre pays, modèle à l’usage
conservez d’un minutier sans frontière
le témoignage incarné d’un remède
d’une recette à votre pharmacopée de poche
retrouvez vos déclarations de guerre
écrits au prise avec la parole
pas de livre sans raison
aux sensibles des provinces sans horizon
aux linéaments d’une histoire ressentie
une dévotion ordinaire sans victoire
drôle de moeurs.

***

texte écrit à deux mains : Véronique en premier pour la partie centrale puis Marina
à lire comme le souhaite, ligne à ligne  ou colonne colonne, ou décalage de ligne en mélangeant… peut être utilisé comme le support d’une lecture improvisée


La vie est une vaste comédie dont

le Scapin
et le long
le jeu
un instant
l’amoureux
transi

et
je me promène


grenouilles
qui ne vivent que de
et
qui
en forme d’
vie comme
est-il possible de sortir de
comédie

dont la
burlesque
est bien loin


je suis le fou


des longues plaines

je suis l’affreux

aux gestes

hyperbolique
dans l’humide

le berceaux des

souvenirs peu
remémorables
je pose mes
arborescences

la poésie


date   

d’aujourd’hui

le bouffon


je prolonge

de

mécaniques

 et
marchandant



catholiques
à
conditions
de voir la

de la


de création

***

texte de l'atelier d'écriture de Philippe Vallet
pour Francopolis juin 2009.


Créé le 1 mars 2002

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